14- Home Bitter Home

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- Tu n'as jamais envie de rentrer chez toi ?

Je me tourne vers Penguin et manque de renverser la cafetière.

- C'est vrai que tu t'es installée et tout. On ne va pas se plaindre mais ta maison ne te manque pas ? Désolé. Rajoute Bepo

Je soupire et sourit. C'est vrai que j'ai eu de la chance de débarquer ici avec mon sac de sport et la totalité de mes affaires de sport et de danse que je laisse normalement au club de sport au début de l'année c'est-à-dire le jour du « passage » dans ce monde. J'avais aussi les affaires que j'avais oubliées chez Jeff, c'est-à-dire un paquet de fringues calées dans une des poches de mon sac. C'est vrai que du coup je me suis installée sans trop penser à la maison.

La maison... une villa dans un quartier sympa de Koweït, trois étages, un grand sous-sol, le rez-de-chaussée pour la partie commune avec le salon, cuisine salle à manger plus la pièce pour notre gouvernante. Le premier aux parents, la coloc au second, et no... Mon étage au troisième, et un toit plat où glander. J'adorais cette maison. On la partage avec trois jeunes collègues de mon père, ils avaient pris les trois chambres au second et occupaient la cuisine de cet étage. On avait transformé le palier de cet étage en salle de jeux et celui du troisième en salle télé. Au troisième il y avait deux chambres avec leurs salles de bain, une bibliothèque qui sert aussi de bureau et une corniche avec l'échelle pour monter sur le toit. Devant chez nous, sur la fausse pelouse, il y a une petite tente de bédouin avec le salon arabe et une petite clim à cause de la chaleur et un barbecue.

Cette maison vu comme ça, elle est fantastique, on est sept dedans ou du moins on l'était, et y'a toujours une bonne ambiance, du moins la plupart du temps. Nos voisins étaient sympas, jusqu'à ce qu'ils divorcent et que la voisine reparte aux états unis, laissant seul notre voisin avec son spitz. Une espèce de boule de poils orange avec une espèce d'air toujours satisfait qui personnellement ne m'attendrit pas du tout.

Depuis la situation a changé et c'est tellement galère que rien ne m'incite à remettre les pieds dans ce bourbier. Je secoue la tête quand j'émerge de mes pensées. Ils me regardent bizarrement.

- Ma famille n'a aucun intérêt. C'est des nazes.

- Heuu c'est ta famille quand même... Lâcha Penguin.

- C'est bien ce que je dis, c'est des abrutis.

Je retourne dans les entrailles du sous-marin. Je vais à l'infirmerie pour récupérer les médicaments et pour que quelqu'un me refasse mes bandages. Il n'y a que Traffy.

Merde.

Je m'apprête à faire demi-tour quand il m'attrape le bras.

- Assieds-toi. Je vais chercher de quoi refaire tes pansements.

Je m'assieds sur la table d'auscultation alors qu'il met des gants.

- Tu as toujours mal ? Demande-t-il.

Naaaaaaaaan. J'ai encore la moitié du dos pelé mais je pète le feu !

- Le dos surtout.

- Je vais refaire tes pansements et normalement tu seras guérie dans trois-quatre jours.

Je hoche la tête et relève mon t-shirt. Je sens ses doigts courir le long de mes côtes. Il défait le bandage d'un geste expert et m'arrache un grognement de douleur en retirant le tulle gras qui a attaché à la plaie. Il va chercher une pommade que je ne reconnais pas et l'ouvre. A l'odeur ce n'est pas de la Biafine ou de la flamazine. Il remet du tulle gras sur la pommade et remet une nouvelle bande qu'il fixe avec une épingle à nourrice.

- Pourquoi tu ne tiens pas à rentrer chez toi miss Alexis ?

- Vous vous êtes passé le mot ou quoi ? Je ne veux pas en parler.

- Pourtant l le faudra bien.

Je fais la grimace et lui fait mon sourire le plus maléfique.

- Si tu me parles de ta propre famille. Tu avais des parents non ? et tu as eu quelqu'un pour t'apprendre la piraterie.

- En effet mais ça ne te regardes pas.

Je m'assieds sur le bord de la table d'auscultation et le regarde se laver les mains.

- Tu ressembles plus à ta mère ou à ton père ?

Il se tourne vers moi et fronce les sourcils.

- Et toi ?

- Aucun des deux. Et toi ?

- Mon père. Et plus honnêtement tu ressembles plus auquel de tes parents ?

- Le caractère c'est mon père. Le physique aucun des deux.

- Comment ça se fait ?

Je souris et lève la tête vers lui.

- Je les soupçonne de nous avoir achetés sur internet.

- Nous ?

M****. Trahie.

- Je voulais dire : ils ont dû m'acheter sur internet.

- Tu as des frères et sœurs ?

La question qui fâche. Non, je suis seule comme une chaussette après un lavage en machine.

- Et toi ? Tu es enfant unique ?

Il soupire et pose du tulle gras sur la plaie.

- Je le suis maintenant.

On échange un regard et je devine ce qui se cache derrière cette phrase ambigüe. Monsieur le taré a perdu un membre de sa fratrie. Je prends une grande inspiration et je ne sais pas pourquoi mais je l'attrape par le poignet.

- Ça fait longtemps ?

- Pas assez à mon goût. Lâche-t-il en évitant mon regard.

- La douleur ne cessera jamais, pas vrai ?

Il me dévisage en secouant la tête.

- J'ai fini. Tu peux rejoindre les autres.

Je me lève et le remercie d'un signe de tête. Son expression fermée m'indique clairement que « Confessions Intimes » est terminé et que je peux me gratter pour en apprendre plus.


Jaleckxis.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant