~Chapitre 22: Alexander~

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En 1838, une tragédie avait touché Londres et avait fait parler d'elle dans la presse pendant plusieurs jours. Les faubourgs de Londres, plus connus sous le nom de East End, étaient en proies à la pauvreté, la surpopulation et à la criminalité. Les méfaits et le non-respect des lois était chose courante là-bas et toutes les personnes haut-placées ou un minimum aisées ne s'en approchaient pas et considéraient cette zone comme les bas-fonds où se regroupaient tous les délinquants et criminels de toutes sortes alors le fait que cela se soit déroulé là-bas n'a, à première vue, étonné personne

De nombreux migrants et les personnes les plus pauvres s'entassaient dans les logements insalubre, cachés par les plus grands, où il n'y avait presque ni lumière, ni air. C'est là que vivait Alexander, un garçon originaire de Londres, abandonné dans ruelle lugubre par sa mère. Il avait été recueilli par un orphelinat de fortune qui avait bien vite dû fermer par manque d'espace et de soins disponibles. Le jeune homme qui avait alors 18 ans, s'était réfugié dans le seul quartier où il était accepté.

Il grandit là-bas et subvint à ses besoins en trouvant des petites tâches chez les uns et les autres et en volant. C'est cependant durant cette période sombre qu'il rencontra Heather, une jeune fille du même âge qui faisait partie de la grande vague d'immigration qui était arrivée jusqu'en Angleterre. Elle était sa source de bonheur lors de ces jours lugubres et il l'avait accueilli dans ce qui lui servait alors de logement. Heather était très mature et était très belle ce qui lui valait une petite réputation dans le voisinage. Sa peau plus bronzée que les habitants faisais sensation et les boucles infinies qui descendaient jusqu'au bas de son dos impressionnaient.

Cela n'étonna donc personne lorsque Alexander tomba amoureux de la jeune fille et qu'ils se promirent de vivre ensemble pour toujours. Cependant, cette belle histoire prit fin brusquement et violemment. Le jeune homme gérait de moins en moins son statut et souffrait de ne pouvoir obtenir plus. Il devint agressif, violent, toujours sur la défensive et Heather en payait les frais. C'est un soir d'hiver que le drame survint.

Sevan rentra dans leur pièce qui les abritait, Heather l'attendait déjà. Elle avait allumé un feu dans le petit âtre et avait préparé une soupe de légumes qu'elle était allée chercher au potager d'un de leurs voisins. Le jeune homme entra et vint déposer un baiser délicat sur le front de sa bien-aimée qui, en réponse, lui tendit un bol de soupe chaude. A ce moment, rien ne pouvait prévoir ce qu'il allait arriver et pourtant, dans cette vie, une minute, une seconde, peut tout faire basculer.

« -Alexander, à part deux autres légumes que le voisin a bien voulu me donner, il ne reste plus rien. Il nous faut de quoi manger. L'informa la jeune femme.

-Je n'ai rien gagné aujourd'hui si ce n'est des rejets. Tous ces aristos ne pensent pas qu'en nous refusant du travail, ils causent des morts et la pauvreté qu'eux-mêmes rejettent.

-Je sais que c'est dur, le rassura-t-elle en lui caressant tendrement le bras. Mais il nous fait cet argent où nous ne tiendrons pas longtemps. »

D'un geste brusque, Alexander repoussa la main de sa compagne et se leva.

« -Tu ne penses pas que je fais déjà tout ce que je peux pour nous ? Pour toi ?

-Enfin Alexander, ce n'est pas ce que je dis, tu le sais bien...

-Ce n'est pas toi qui te fais regarder comme un insecte, qui te fait rejeter à chaque fois que tu demandes ne serait-ce que de l'eau. Dit-il en haussant le ton »

Enervé, il jeta à terre son bol presque vide. Heather le regarda rouler au sol jusqu'à ses pieds, le ramassa, posa le sien et se leva vers le feu qui s'affaiblissait :

« -Alexander, je ne peux pas me mettre à ta place mais je sais parfaitement et reconnais tout ce que tu fais.

-Comment peux-tu dire ça ? Tu ne fais que cueillir des légumes chez le voisin et n'est pas capable de gagner un sou ! »

Cette dernière remarque résonna dans l'esprit de la jeune femme et la blessa. De nature calme et apaisante, elle se contint et lui fit signe d'approcher. Il marcha vers elle le regard embrasé et l'interrogea d'un signe de tête. Elle tenta un sourire et posa de nouveau ses mains sur les avant-bras de son compagnon pour le calmer et ajouta :

« -Nous faisons ce que nous pouvons.

-Arrête de dire ça. »

Sous le coup de la colère qui brûlait en lui, il la poussa une nouvelle fois mais plus violemment. La jeune femme tituba et perdit l'équilibre. Comme dans une scène au ralenti, il la vit vaciller, tomber vers sa marmite de soupe qui se renversa et venir tomber au sol telle une poupée de chiffon, sa tête percutant le sol de pierre froid.

Alexander resta un moment immobile, regardant la femme qu'il aimait au sol, la soupe qui s'éparpillait, s'infiltrant entre les dalles de pierre, la seule personne qui l'aimait sincèrement qui venait de tomber pour ne plus jamais se relever. Il s'effondra sur ses genoux et vint à ses côtés pour la secouer mais en vain. Il poussa un cri empli de douleur et de désespoir qui perça la nuit. A ce moment, plus rien n'importait, les portes des voisins qui s'ouvraient pour venir voir ce qu'il se passait, les restes de soupe qui mouillaient son pantalon effiloché et il ne vit pas les bûches éparpillées au sol ni les braises entrant en contact avec le bois et les feuilles dont Heather s'était servi pour allumer le feu.

Bien vite, leur habitation se transforma en brasier, les habitants de East End, et même certains des alentours, alertés par le feu, étaient rassemblés autour de la petite maison en feu où Sevan refusait de lâcher son seul amour. Le feu le brûlait mais cette douleur physique n'atténuait pas celle sentimentale ; une partie de ses vêtements et de son corps étaient déjà brûlés. Les flammes qui s'échappaient de leur petit habitat éclairaient la nuit sombre de Londres

Soudain, des sifflets se firent entendre ainsi que des coups de feu. La police essayait de disperser la foule et comptait s'emparer du jeune homme pour ce qu'il avait fait. Reprenant ses esprits, il embrassa une dernière fois le corps sans vie de sa compagne et prit la fuite par une fenêtre qui donnait à l'arrière, au moment où les policiers réussirent à passer les flammes. Il s'arrêta et regarda ses mains avec effroi ; ces mains qui venaient de tuer la personne qu'il aimait. Entendant les coups de sifflets se rapprocher, il voulu s'enfuir mais, après une brève course, il percuta un homme qui se trouvait là, dans une des grandes rues de Londres.

« -Où cours-tu donc ainsi vagabond ?

-J'ai une urgence à régler. Il voulut repartir mais l'inconnu l'arrêta.

-Ne me prend pas pour un idiot. Il y a un incendie et, à ce qu'on dit, un meurtre. Les policiers cherchent quelqu'un et toi, comme par hasard, je te trouve fuyant dans la direction inverse.

-Je n'ai rien à vous dire, laissez-moi.

-Je sais mais je peux t'aider. Il lui tendit la main. Je suis le baron Edward Lytton de Knebworth »

Moon & Elizabeth Lytton [CORRECTION EN COURS]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant