si tu le regardes t'es une grosse bouffonne.
c'est ce que n'arrête pas de me répéter ma conscience depuis ce matin. mes yeux et ma tête ont improvisé un combat acharné que j'essaye tant bien que mal d'arbitrer.
— tu peux me mettre de la crème solaire ? demande ivy.
j'accepte d'un hochement de tête et m'exécute. je me cambre au max pour aguicher le brun à quelques mètres de nous.
je sais qu'il me regarde, je le sens.
et c'est tout ce qu'il pourra faire maintenant, regarder.
une partie de moi me trouve pathétique de réagir ainsi quand on regarde les règles que j'ai moi même pré établies. mais j'ai mes raisons, et elles sont plutôt logiques à mon sens. il y a une nuance entre se taper une meuf quand l'autre n'est pas là et se la taper devant elle, non ?
— t'en veux aussi ? je lui demande alors, quand mon regard croise le sien.
il sourit et se cache derrière son manga.
— ça va aller, merci.
amusée, je me rallonge et ferme les yeux. rien ne sert d'être en guerre contre lui, c'est beaucoup plus jouissif si on se parle comme si de rien n'était.
on a eu une chance de batard d'avoir un si beau soleil qui tape. la température doit avoisiner les vingts degrés à peine, mais au soleil, c'est largement suffisant. ivy qui est blanche comme un cul a même préféré prendre ses précautions et je la comprends.
seuls les mecs ont eu la foi extraordinaire d'aller à l'eau. on a voulu m'y jeter une fois ou deux; mais ils se sont ravisés par pitié.
on passe une journée chillax en perspective, le matin, on est parties se promener entre filles avec sana et ivy dans le centre ville et on a pris quelques photos puis on a rejoint les mecs à la plage qui est quasi vide.
— j'aimerais bien être aussi décomplexée qu'eux, on est en avril wesh, j'ai pas eu le temps de travailler mon summer body ! se plaint la brunette en regardant les gars se pavaner dans tous les sens.
— j'te jure, tema mon bide, ajoute sana en tirant dessus.
— tema mes cuisses, je réplique en les tapant.
elles gigotent dans tous les sens suite au choc et on rigole. puis on échange sur nos vergetures.
c'est chiant d'être une fille, ça complexe sur tout et n'importe quoi. des fois j'aurais aimé être un mec juste pour vivre tranquillement et ne pas me soucier de petits détails sans intérêt. ils tapent un foot devant nous, sneaz il arrête pas de parler triche, ce rageux.
plus tard, je me propose pour aller chercher à boire comme on est court de boissons. je prends les commandes et m'en vais au restaurant - bar de la plage à deux pas de nous. je fais l'effort de le saluer en grec puis énonce ma demande en anglais.
— quatre bières, deux bouteilles d'eau, deux sprites et un minute maid pomme, s'il vous plaît.
il comprend pas tout du premier coup alors je dois me répéter. mais on finit par s'entendre. il me met le tout dans un sac, je règle et m'apprête à partir, quand on m'interpelle.
— française, hein ?
je me retourne et fais face à un mec assis à l'une des tables. clope en bouche.
— ça se voit tant que ça ?
il sourit.
— ça s'entend surtout.
