salade tomates oignons

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il kékro dans son grec comme s'il n'avait pas mangé depuis l'an 40. ça me dégoute un peu, y'a toute la garniture qui sort. mais bon, qui va demander à doum's d'être classe.

— manges gros, dit-il la bouche pleine.

— j'ai pas faim.

j'observe la clique qui s'est agrandie entre temps, éparpillés par clan dans les quatre coins de la pièce. ivy est en retrait avec l'hôte de maison, heureusement que je connais au moins doum's j'ai envie de dire.

— donc pourquoi t'es revenue au fait ?

je soupire d'ores et déjà. j'avais pas prévu de déballer ma vie ce soir. l'objectif c'était de l'oublier justement. mais ça, je doute qu'il le comprenne. dans mes souvenirs il était plutôt persévérant.

— nan pourquoi t'es partie, même ?

je le fusille du regard et bois dans sa canette.

— j'ai pas le droit ? je réponds, pour esquiver.

— eh t'aimes trop faire ça toi, arrêtes.

— j'voulais changer d'air, saoules pas les gens.

le brun aux yeux marrons se ramène et se pose pas loin de nous, avec sneazzy et un autre dont j'ai oublié le nom. ses pupilles dérivent une fraction de seconde vers les miennes et ça me fais rire intérieurement. on dirait que c'est plus fort que lui. tout comme c'est plus fort que moi. 

— et c'était comment le japon ?

— top.

— faut développer cousine.

— super top.

il m'assène d'un steak qui me retourne le cerveau et je lui saute à la gorge. j'ai des remontrances du collège et du lycée, le nombre de fois où nous nous sommes bagarrés lui et moi s'apparente étrangement au nombre d'heures de colle que je me suis ramassée toute ma scolarité. ingérable ce gars.

— lâches-moi, sale folle. crie-t-il par dessus la musique pendant que je lui tire les deux tiers de ses dreads.

— ta main pleine de gras sur mes cheveux, tu te crois où ? je rétorque sur le même ton.

—eh t'es trop insolente, comment les japonais ils ont pu te supporter ?

— t'es partie au japon ? j'entends à ma droite.

eye contact ne parle plus avec ses yeux mais avec sa bouche désormais. il s'est rapproché pour prendre part à la discussion. surprise, je me détache du cramé pour ne plus lui tourner le dos.

— euh... bah ouais.

— cool, tu trainais où ?

je me recoiffe d'un geste machinal et m'éclaircis la voix pour lui répondre. mon temps de réaction est anormalement long, je le vois qu'il hausse les sourcils.

— harajuku parfois... et surtout kabuchichō c'est animé la nuit... j'aimais bien.

— de ouf, t'es restée combien de temps ?

son regard pétille, il a l'air réellement intéressé. il sourit légèrement et se montre très patient. j'avoue je mets trop de temps à percuter.

kam reprends toi, wesh.

— trop longtemps, répond doum's à ma place.

— trois ans, j'ajoute enfin.

— archi dans l'abus, réplique le tressé.

— ferme-là.

— tout ça pour un gars.

— ta gueule.

il croque à nouveau dans son sandwich bourratif qui me donne personnellement très envie de gerber. je garde néanmoins mon sang froid devant le beau brun. je savais qu'ivy l'ouvrirait de toute manière.

— erreur de jeunesse, que veux-tu, dis-je nonchalante.

— t'inquiètes tu veux une anecdote ? doum's il a déjà bu de la javel parce qu'il pensait qu'il allait éclaircir. dans la catégorie erreur de jeunesse, c'est le pionnier lui.

le concerné manque de s'étouffer pendant que j'étouffe un rire. il m'arrache la canette des mains et répond.

— toi t'as de la chance j'suis pas d'humeur a chercher des dossiers sur ta gueule, p'tit bâtard.

je les regarde se clasher en silence et les commissures tremblantes. j'étais loin de m'imaginer qu'il était blagueur ce lascar. il avait l'air mystérieux et un chouya condescendant, je me suis peut-être trompée sur son compte, finalement.

— bref, je vais pas ternir ton image alors que t'as réussi à adoucir la demoiselle pour la première fois de l'année, reprend-t-il en m'ébouriffant les cheveux.

— dégage tes mains sales, putain.

— ça n'aura pas duré.

le sourire du brun à la casquette s'étire et il me jauge en ajoutant.

— sacré caractère de parisienne, faudra que tu me racontes un de ces quatre comment t'as survécu dans ces lieux si paisibles.

sur ces mots, il se lève et nous fausse compagnie. doum's n'a pas attendu qu'on lui demande pour en faire des tonnes sur mon attitude mais je ne daigne même pas l'écouter. je regarde mon ancien interlocuteur s'éloigner, un demi sourire aux lèvres tout en me répliquant pour moi-même.

tu peux rêver mon gars.

ShinkūOù les histoires vivent. Découvrez maintenant