Augustine Baudelaire - T.1 - Les disparitions mystérieuses

Chapitre 24 - La nouvelle amie

La cloche sonna la fin de la première heure de cours. Le professeur Keanan n'avait pas changé ses odieuses habitudes et continuait de torturer psychologiquement ses élèves. Chaque cours avait sa nouvelle victime. Ce jour-là, ce fut le tour de Soazic, l'inquiète jeune fille aux magnifiques boucles rousses, qui s'enfuit à la fin du cour en pleurant toutes les larmes de son corps. Le professeur Keanan l'avait assénée de questions plus tordues les unes que les autres et la note pitoyable par laquelle il l'avait sanctionnée avait achevé la jeune fille. Lorsque la cloche sonna, Augustine rangea ses affaires et tenta de récupérer celles de sa camarade.

- Mademoiselle Baudelaire, ce ne sont pas vos affaires ! Déguerpissez avant de recevoir une colle.
- Mais, Monsieur Kea...
- TOUT DE SUITE !

Terrorisée par l'impressionnant professeur, Augustine rentra la tête dans ses épaules et sortit précipitamment du cours sans avoir pu récupérer quoique ce soit. Avant de rejoindre le cours de lettres, elle patrouilla dans les couloirs à la recherche de Soazic qu'elle dénicha enfin dans les toilettes, toujours en train de pleurer ; des reniflements réguliers et des bruits de sanglots s'échappaient d'un cabinet clos. Extrêmement émotive, la jeune fille ne parvenait pas à se calmer.

- Soazic, c'est Augustine. Ouvre-moi s'il te plaît, tenta la brunette.

Des froissements, un verrou qui s'ouvre et la tranche d'un visage épuisé parut.

- Qu'est-ce que tu veux Gus' ? bégaya-t-elle.
- Je m'suis décidée à prendre le relais de Valentine puisqu'elle n'est pas là pour assurer sa fonction de déléguée et que Yannick s'fiche de tout.
- Laisse-moi tranquille ! Tenta la rouquine d'un ton peu convainquant.
- Soazic, j'te laisserai pas. Tu vas pas bien et c'est nor-mal. Keanan s'est comporté comme un c...
- Je vais me faire tuer à la maison...

Les larmoiements intensifs de Soazic résonnèrent à l'intérieur du cabinet. Plus aucun mot cohérent ne sortit de sa bouche et elle claqua la porte des toilettes qu'elle verrouilla. Augustine soupira. Que pouvait-elle bien faire ? Elle prit quelques minutes pour réfléchir, puis elle glissa quelques mots qui se voulaient rassurants à Soazic sans attendre sa réponse avant de disparaître derrière les portes battantes des toilettes des filles. La pleureuse songea alors que tout le monde l'abandonnait et lui en voulait et continua à vider son corps de toute sa tristesse et de toute sa rancœur envers le professeur Keanan. Elle avait eu une lueur d'espoir lorsqu'elle avait vu sa camarade, mais finalement, Augustine ne valait pas mieux que les autres.
En réalité, Augustine, cheveux bruns au vent, filait vers la classe de la professeure Delcourt pour excuser l'absence de Soazic et lui dire qu'elle la mènerait à l'infirmerie, elle y serait mieux pour se calmer.

- Monsieur Bignonen, surveillez la classe en mon absence. Mademoiselle Baudelaire, venez avec moi !

Surprise par le ton dur de sa professeure, Augustine la suivit sans broncher, la peur au ventre.

- Que s'est-il passé ?

Son ton s'était adouci, dès la porte franchie. L'élève se détendit.

- Monsieur Keanan...
- Laissez-moi deviner. Il a choisi Soazic pour sa séance de torture psychologique quotidienne ?

La collégienne hocha la tête.

- Il lui a mis un 8.
- Sa note fétiche... Il est grand temps de sévir, ce genre de comportement n'est plus possible !
- Je n'ai même pas pu récupérer ses affaires, elles sont toujours dans la salle de Monsieur Keanan.

La professeure Delcourt accéléra le pas. Elle paraissait hors d'elle. Augustine n'avait jamais remarqué à quel point cette dame était grande. Avec ses chaussures à talons qui claquaient le long des couloirs, elle semblait même géante. Son allure imposait naturellement le respect. Augustine rêvait d'avoir ne serait-ce qu'une once de cette grâce et de ce charisme lorsqu'elle serait adulte, mais elle savait très bien qu'avec sa silhouette en bâton, elle ne risquait pas de devenir une magnifique femme. En tout cas, elle s'en était convaincue depuis longtemps.
Elles arrivèrent devant la porte close des toilettes où Soazic s'était réfugiée.