Chapitre 13 : Elenya, fille des étoiles

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Elwen regardait la mer. Elle était partie sans but, simplement en fuite. La jeune elleth avait laissé derrière elle les seuls êtres pour qui elle éprouvait de l'amour et avec eux, l'unique lueur de sa vie. Sa vie était redevenue sombre, son esprit noir et son être obscur.

Cela faisait trois ans qu'elle avait quitté le sous-bois qui abritait ses seuls amis. Trois ans que, chaque matin, il lui fallait trouver la force de se lever et de continuer sa route. Elwen avait pleuré malgré se l'être interdit. Les paroles de Legolas lui étaient revenues « Il est bon parfois d'être faible, Elwen ... »

Elle s'était accrochée comme elle avait pu à cette voix, à ces mots, et alors, seulement à cet instant, elle s'était permise de pleurer. Au départ cela n'avait été que des larmes silencieuses, gouttes glissant le long de ses joues. Puis, c'était comme si toute sa tristesse, sa colère et sa frustration s'étaient accumulées pour ne former qu'un être de douleur.

Elwen s'était mise à gémir tout en se tordant les mains et puis elle n'avait pu retenir ses cris et ses sanglots. Elle était brisée. Il s'était mis subitement à pleuvoir, le tonnerre grondait à l'unisson avec ses hurlements, la pluie balayait ses joues, mimant ses larmes. Mais le pire, cela avait été le vent. Une tempête avait arraché tout un bois, et elle était là, au milieu des arbres arrachés et de la terre soulevée par les bourrasques.

Ses cheveux volaient autour de son corps, l'auréolant d'écarlate. Ilestelwen, à genoux, avait laissé jaillir tout son accablement, toute sa souffrance. Le vent s'était mis à hurler plus fort autour d'elle, arrachant les buissons et les branches sur son passage. Et sa pure souffrance avait pu naître en un hurlement qui lui déchira la poitrine.

La tempête en elle sortait enfin pour la première fois.

Elwen ne se calma qu'au bout de nombreuses heures et ressentit un grand vide en elle qu'elle sentit bien vite se remplir à nouveau d'amertume et de douleur. Cela était sans fin, une souffrance éternelle.

Quand le vent avait enfin cessé, Elwen était retombée sans force sur le sol, repliée sur elle même, sanglotant encore, faisant le deuil de cette amitié.

Alors elle avait fait ce que son coeur la suppliait de ne pas faire : elle était partie loin de tout. Elle avait suivie les routes sans penser à où elle irait. Ses pas l'avaient menée à la mer de l'Est. Une mer chargée de souvenirs.

Elle aimait l'océan parce que chaque fois que les vagues quittaient la rive, elles revenaient toujours.

Elle aimait les voir revenir à l'infini et dans son coeur le même sentiment de joie naissait avec la même intensité. Les vagues revenaient, alors pourquoi pas ceux qu'elle aimait ? Pourquoi la force de vivre ne revenait pas comme les vagues, avec force et inéluctabilité ?

Elwen pencha la tête en avant, fermant les yeux. On ne voyait d'elle qu'une minuscule silhouette entourée de flammes, petite femme face la vaste étendue d'eau. Elle était seule, seule avec ses démons.

Elle devait voir la réalité en face : jamais elle n'avait eu tant envie d'entendre les jumeaux se moquer d'elle, de rire avec eux, de parler avec Legolas jusqu'à l'aube et de refaire le monde pour peu qu'ils soient à ses côtés.

Elle n'avait vendu que le collier et les pierres, gardant inexplicablement la clé et l'étrange carnet. Elle ne l'avait pas ouvert, une promesse muette lui intimant de ne le lire que quand elle aurait atteint son but.

À présent, elle se tenait face à la mer, dominant cette étendue d'eau bleuté qui paraissait sans fin. Mais elle ne savait plus. Pourquoi était-elle là ? Pourquoi être venue ? Rien ne l'attendait nulle part, elle avait simplement voulu se persuader que si. Le vent souleva du sable et forma un nuage doré à ses pieds.

La fille qui n'avait plus d'espoir | Tome 1 : Celle qui fuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant