La lune était haute dans le ciel, elle éclairait tout le village. Emaël la regardait depuis un long moment sans rien dire tandis qu'elle réfléchissait, assise en tailleur par terre. Qu'allait-elle faire ? Elle ne pouvait certainement pas retourner auprès des jumeaux et Legolas sans un mot ...
Elwen se prit la tête entre les mains et soupira. Elle faisait toujours tout échouer. Elle sentit que le jeune homme s'approchait d'elle le plus doucement possible.
- « Je suis vraiment navré mademoiselle ... Ce n'était pas voulu. »
- « Je le sais bien ... » soupira t-elle. « Qu'avez-vous là ? »
- « Oh ... C'est un coffret que les troupes de mon oncle ont rapporté avec eux de leur dernière mission. » souffla t-il en regardant le petit coffre entre ses mains. "Je l'apportais au manoir lorsque j'ai entendu des cris."
- « Je vais aller retrouver mes amis. Je vous souhaite une bonne nuit, Emaël. »
Alors qu'elle se retournait, elle surprit une étrange rougeur sur les joues du jeune homme, ou peut-être était-ce le reflet du bois ciré ...
Elwen ne dormit pas cette nuit là, elle était assise sur le toit d'une maison et observait les étoiles. Elle repensa au petit visage de Piàn, l'enfant de Daeley et Aldwyn. Il était si innocent, si angélique. En plus de sa vie, elle lui avait volé son bonheur. Pour cela, une punition lui avait été donnée, durant chaque nuit durant deux ans, elle avait revécu cette scène cauchemardesque, chaque nuit avait été une véritable torture ... Mais Elwen savait qu'elle le méritait.
Cela faisait plusieurs décennies qu'elle n'avait plus revu cette scène et en rêver à nouveau avait provoqué en elle un remous de souvenirs enfouis. L'elleth rousse cala sa tête sur ses genoux serrés l'un contre l'autre et ferma les yeux.
Le visage d'Aldwyn apparu, il était illisible, seuls ses yeux exprimaient une étrange mélancolie chargée d'amertume.
- « Je ferai tout pour que tu n'oublies jamais, Hecilwen. Je ne peux revenir à ce jour maudit où tu nous es apparue comme une enfant abandonnée et faible, mais je peux te faire vivre l'enfer ... »
Un sourire étrange étirait ses lèvres, les autres de ses victimes l'avaient habituée à une froideur et une colère haineuse, pas aux sourires qui en disaient long.
- « Tous ici ne désirons qu'une chose : te voir souffrir comme tu nous as fais souffrir. J'attends le jour où je verrai ton coeur se briser et tout ton être le suivre. »
- « Tu m'avais fais une promesse, Elwen. Encore une que tu n'as pas tenue ... » souffla Elenwë derrière elle.
Il n'y avait pas une nuit où la jeune femme à la peau translucide et aux cheveux blancs ne disait cette phrase. Oui, Elwen lui avait promis quelque chose et elle n'avait pas tenu parole.
- « Un jour, tu verras Hoarwell. Tu as beau te rassurer en te disant que ce jour ne viendra jamais, moi je sais que tu finiras par le voir ... Hoarwell te brisera comme il nous a tous brisés. » susurra la jeune femme en se penchant à son oreille.
Elwen ouvrit brusquement les yeux, la voix d'Elenwë résonnant dans son esprit, encore et encore.
- « Je le sais bien, Elenwë ... Et je redoute ce jour autant que tu l'attends. » murmura t-elle d'une voix lasse et fatiguée de se battre contre l'évidence.
Elwen n'était pas dupe, elle savait pertinemment que la vision d'horreur viendrait la hanter un jour ou l'autre.
Le jupon de sa robe fut balayer par le vent, dévoilant sa jambe droite à la lumière de la lune. Sur la peau blanche s'étalaient de grandes arabesques tracées dans la chair. Elwen suivit l'une d'elle en la caressant du bout d'un doigt. Les fines cicatrices blanchâtres ornaient toute sa jambe, de la cheville au genou. Avec le temps, elles s'étaient agrandies et arrondies. Cela aurait presque pu être artistique si, à la simple pensée de cette torture, les souvenirs ne remontaient pas à la surface.
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La fille qui n'avait plus d'espoir | Tome 1 : Celle qui fuit
Fiksi PenggemarArda est une terre impitoyable pour ceux que l'on ne nomme pas héros. Et la seule justice de cette terre est celle des Valar. Alors, elle se demande : quand viendra son tour de payer ? Elle se tient face à eux, face à ce passé qui lui fait si peur...