Chapitre 16 : Mirinên Derewîn

263 29 9
                                    

 Italique : Passé/histoire antérieure/elfique

Normal : récit/Westron 

***

Pendant un instant, Elwen ressentit une intense douleur dans tout le corps. Et puis, les visages de ceux qui lui rendaient visite toutes les nuits apparurent. Quelque chose n'avait pas l'air d'aller chez eux car, contrairement à normalement, ils avaient sur le visage un air inquiet. Mistrid l'observait avec les yeux écarquillés, la bouche légèrement entrouverte. Mahtan se tenait près d'elle et semblait avoir le souffle coupé tandis qu'Elenwë papillonnait des paupières comme si elle n'en croyait pas ses yeux. Ses yeux si clairs étaient plein de peur et Elwen crut presque entendre un gémissement de douleur s'échapper de leurs lèvres.

C'est à cet instant que la douleur revint. Insoutenable, intolérable. L'image se fendit mais Elwen eut le temps d'entendre les cris. Des cris insupportables, inhumains et bestiales qui fendirent l'air à la seconde où ils disparurent. Ils l'appelaient.

La douleur semblait résonner dans tout son être. Mais les cris n'étaient déjà plus là pour faire échos à sa souffrance. Dans le silence oppressant, Elwen entendit quelqu'un hurler. Une voix de femme qui lui sembla familière. Sa mère ?

La douleur cessa, la laissant essoufflée, effondrée sur le sol qui lui restait invisible. Son souffle n'était plus qu'un râle mais devant elle, une nouvelle scène prenait vie sous ses yeux. Une lumière aveuglante surgit de l'obscurité et une silhouette bien connue lui apparue, comme si elle tombait du ciel.

Les sons avaient déserté l'espace si bien qu' Elenwë hurlait en silence. Mais ce n'en était que pire. Son visage était déformée par la puissance de sa détresse. La force de ses hurlements tordait ses traits. Elwen la vit tomber à genoux, sa tête basculant en arrière au ralenti et ses cris muets redoublants de violence. La jeune femme regardait désespérément autour d'elle mais seul le néant l'entourait. Ses mains tremblantes se saisirent de sa tête et, cette fois ci, le hurlement perça le silence, faisant éclater l'air.

Elwen était allongée sur le flanc, les yeux écarquillées devant cette scène. Le cri lui fit l'effet d'un électrochoc et elle inspira bruyamment l'air. Elenwë tourna la tête vers elle, l'enveloppant de son regard noyé de larmes.

Il n'y avait pas trace de colère, juste une immense détresse, un puits de désespoir. Elwen regardait une femme brisée. Elenwë n'était plus qu'un être défini par sa seule souffrance. Sa douleur se lisait dans tout son corps. Elle était perdue.

- « Où est mon enfant, Elwen ? » gémit elle avant que sa voix ne se brise. « Où est mon bébé ? »

Elwen voulu lui répondre mais son corps était figé, il lui était impossible de bouger un seul de ses doigts. Pourtant, de toute son âme, elle aurait voulu lui répondre, lui expliquer, mais surtout s'excuser. Seulement elle ne pouvait pas, malgré toute sa volonté, malgré le fait qu'elle se soit cru forte.

Elenwë se remit à pleurer, à hurler. Son corps bascula en arrière, accablé sous le poids de sa souffrance. Son visage se déforma à nouveau et ses cris restèrent muets, son corps tressautant sous leur violence. Elwen voulait se lever, la serrer dans ses bras et lui dire encore et encore qu'elle était désolée, que c'était de sa faute.

Sa faute.

- « Regarde la, Elwen. Regarde la souffrance que tu lui inculques, regarde ce que tu lui as fait. C'est uniquement ta faute. Qu'est ce que cela fait de voir un être se briser par sa faute ? » murmura une voix grave.

Comme pour obéir aux ordres de la voix, sa tête se tourna vers la jeune femme qui hurlait toujours, interrompant à peine ses cris pour reprendre son souffle. Son corps était secoué de sanglots mêlés à ses plaintes. Elwen voulait fermer les yeux à cette douleur.

La fille qui n'avait plus d'espoir | Tome 1 : Celle qui fuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant