Chapitre 19

2.4K 243 0
                                    

Debout non loin de la piste d'atterrissage, Perla attendait ces lunettes de soleil sur le nez. C'était avec quelques regrets, qu'elle décampait de cette île paradisiaque. Mais avait-elle vraiment le choix ?
Elle ne connaissait pas plus que cela ce Di Marzo et la prudence exigeait de ne pas s'approcher de cet homme basané aux tatouages ténébreux. De plus, seule au milieu de nulle part, était-il vraiment raisonnable de rester, un accident est si vite arrivé surtout en sa compagnie... Néanmoins elle ne pouvait cacher qu'une attirance les liaient tous les deux. C'était comme si dans l'haut de là, il y avait un lien qui les unissait, ou peut-être était-ce qu'une impression qui se faisait ressentir chez elle.

Pourtant son visage obscur restait gravé dans sa mémoire, les détails de ses yeux perçants, son nez droit, ses lèvres fermes, cette mâchoire puissante noirci par une barbe soignée. Tout chez lui devrait la repousser, surtout cette aura de mâle dominant mélangée à ce côté sombre, pourtant ce n'était guère le cas. Ça l'attirait davantage que cela la repoussait, en résumé l'environnement de ce sicilien était très dangereux.

Un vrombissement provenant du ciel lui fit lever les yeux vers celui-ci. Un hélicoptère approchait de l'île.

- Tien je croyais que c'était un jet qui devait me ramener, s'alarma Perla les sourcils déjà froncés. Après tout, du moment qu'on me ramène chez moi, ça n'est pas l'essentiel.

Alors ses yeux jetèrent un dernier regard à l'immense habitation entre les arbres comme un dernier adieu.

L'appareil commença une descente en tourbillon en propageant des bourrasques de vent. Et Perla dut se recula pour ne pas subir le flot qui provenait des palles de la machine et pesta contre tout ce remue-ménages.

- Pour être discret choisissez un hélicoptère, efficace, silencieux et décoiffant, murmura-t'elle pour elle-même.

Le visage baissé contre sa poitrine dans le but de ne pas être embrassé par le vent, elle ne vit pas un géant descendre avec aisance de l'appareil. Et ensuite se dirigeait aux pas de course vers les bois de la forêt vierge à son opposé.

Lorsqu'elle releva son regard, ce qu'elle perçut fut l'hélicoptère déjà à deux mètres du sol près à s'envoler. Aussitôt la jeune grecque s'élança sur la piste les bras vers le ciel tout en gesticulant et proférant des noms d'oiseaux sur le pilote.

- Mais nom d'un chien, je suis ici, redescend bon sang !

Néanmoins rien n'y faisait l'appareil s'envolait davantage plus haut vers les nuages. La jeune femme ne perdit pas espoir et maintenait ses gestes désordonnés pour attirer l'attention du pilote.

- Pétard, rouspéta la jeune femme lorsqu'il eut disparu de son champ de vision, comment je vais faire moi ? J'espère qu...

La fin de sa phrase resta en suspend car un géant venait d'apparaître sur l'autre pan de la piste, Giovanni Di Marzo. Tout son corp se paralysa, telle une statue de cire, seule sa respiration s'accéléra.

Le sicilien revêtu de son insatiable costume coûteux entièrement noir ; elle jurait sentir de l'électricité dans l'air malgré la dizaine de mètres qui les séparaient. Pour cause un regard puissant fixer son anatomie sans relâche.
Cela s'annonçait être des retrouvailles rythmés, présuma la jeune femme qui n'espérait qu'une chose que cela ne soit qu'un mirage, une illusion de son esprit. Malheureusement son mirage entreprenait déjà une marche rapide dans sa direction, accompagnée de son visage imperceptible.

Elle eut un mouvement pour fuir malheureusement comme il fallait si attendre une poigne forte emprisonna son avant-bras. Juste avant qu'une immense ombre vienne cacher le soleil exposé à son corps quelques instants auparavant.

- Mademoiselle Nikos, vous désirez déjà quitter ce paradis ? Interrogea la voix grave accentuée par son origine.

Elle releva son menton ayant plus qu'à l'ordinaire le courage de défier cet homme trop sûr de lui-même. Pourtant son attention se retrouva perdue dans les profondeurs qu'étaient ses yeux. Ils arrivaient à maintenir fermer les bouches rien qu'avec ce regard perçant.

- Votre langue est partie, il m'avait semblé vous avoir entendu jurer contre mon employé, déclara-t'il sans aucune note d'ironie dans son ton. Au contraire, son intonation donnait l'impression qu'il n'allait pas tarder à déguster son invitée dans tous les sens du terme.

- Apprenez mon cher que tous mes organes sont bien en place et que mes vacances se terminent maintenant. Ayez l'amabilité de rappeler votre pilote, merci.

Puis sans plus s'occuper de l'homme, son visage se détourna pour observer avec inquiétude le ciel démuni de nuage. D'un geste souple, Giovanni fit revenir à lui, ce petit corps bien trop insolent à son goût. Pourtant tellement délicieux à observer le défier de tout son être. Si bien qu'elle lui faisait penser à un chaton qui montrait les griffes devant un tigre près à le dévorer.

- Je suis heureux de l'apprendre, mademoiselle Nikos.

Cette dernière posa ses paumes de mains contres ses pectoraux gonflés par le sport, dans le but de le repousser. Malheureusement la force n'était pas égale car il ne recula pas d'un millimètre. Et sentit même sous sa peau la grande stature se détendre signe que cela l'amusait. Alors elle laissa ses bras retomber contre son corp puis rehaussa son menton vers le visage baissé de son hôte. Leur proximité était telle qu'il suffisait d'une dizaine de centimètres en plus a Perla pour goutter ses lèvres durs.

L'homme sentit la gêne s'emparer du corps de la jeune grecque mais ne fit aucun effort pour s'éloigner. C'était si plaisant de percevoir le trouble s'allumer dans son regard noir. Elle tentait si bien de cacher ses émotions par tous moyens pour semer le doute de chez son adversaire en essayant de faire la petite fille sage sans caractère, limite une poupée de chiffon. Alors la titiller était un véritable plaisir. Bien vite, Perla se ressaisit pour afficher un masque illisible comme elle avait l'habitude de porter à sa boutique.

- Monsieur Di Marzo auriez-vous la gentillesse de faire revenir votre employé une urgence m'attend en Grèce, mentit-elle droit dans les yeux de son interlocuteur.

Ses iris grossirent à vue d'œil, son rythme cardiaque semblait redoubler de puissance. Quelle affreuse menteuse, elle fait, pensa-t'il amusé par tous les signes qui la trahissaient.

Pour le première fois elle vit les prémisses d'un sourire bien vite remplacé par un froncement de ses sourcils épais.

- Le mensonge ne devrait jamais sortir d'une aussi jolie personne telle que vous, murmura-t'il cette fois avec un rictus bien défini sur ses lèvres.

Sa poigne lâcha enfin le pauvre bras de sa prisonnière, aussitôt libéré elle s'écarta le visage assombrit par sa mine mécontente. Sa main vint frotter sa peau comme pour retirer les rudes empreintes laissés.

- Maintenant suivez-moi nous allons manger un repas.

À contre-coeur, elle se vit obligée de le suivre en comprenant que son évasion serait plus compliqué que prévu.

Fratelli siciliani_Tome IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant