Embrasse-moi sous la Lune

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- Merci à vous, votre Altesse. Partager votre table et votre compagnie jusqu'à mes appartements fut pour moi le plus grand des plaisirs et des honneurs. Je ne saurais vous remercier assez pour toute cette attention que vous me portez, à moi qui n'ai pourtant aucune position importante.

Arrivé devant la porte de sa chambre, Delacroix fit une énième révérence au chef d'État algérien. En plus de découvrir de nouveaux plats, il mangeait en ce palais mieux qu'ailleurs, et sa chambre, bien que petite par rapport à celle de l'ambassadeur qui l'accompagnait, était aussi belle que son lit confortable. Sans compter les beaux paysages d'Alger, et son architecture élégante, qui l'inspiraient autant qu'ils le fascinaient. Il ne pouvait être plus satisfait et curieux de son voyage.

- Tout l'honneur est pour moi, Monsieur, lui répondit le chef d'État d'un français parfait mais doté d'un accent prononcé. J'apprécie converser avec vous. Vous portez en vous le souffle de la jeunesse, et rencontrer des artistes, européens d'autant plus, m'est très plaisant.

- Oh, je ne suis pas un artiste à proprement parler... rougit-il, flatté. Je dessine, mais ma peinture a encore besoin de beaucoup d'entraînement.

- L'ambassadeur vante pourtant vos mérites. C'est pour cela que j'ai hâte que vous me présentiez un tableau d'Alger, d'autant plus que j'ai cru comprendre que notre pays vous inspirait.

- Bien sûr, votre Altesse. Je suis à votre service, lui sourit-il en faisant à nouveau une révérence, car il se dit qu'on n'en faisait jamais trop.

- Je vais à présent vous abandonner, pardonnez-moi mais on m'attend ailleurs. Je vous souhaite en tout cas une bonne nuit.

- À vous aussi, votre Altesse, et merci encore pour votre accueil formidable.

Le souverain le laissa sans lui adresser de sourire ni même de regard, et et dès qu'il fut assez loin dans le couloir, le jeune homme laissa échapper un soupir de soulagement. La compagnie du Dey lui était très instructive, mais un fossé séparait leur rang, et il avait toujours peur de dire quelque bêtise qui pourrait lui porter préjudice.

L'esprit tranquille, il rentra dans sa chambre, et retira aussitôt sa veste, qui lui donnait chaud malgré l'atmosphère nocturne dont était imprégné l'air. Il commença à déboutonner sa chemise, et se fit arrêter par de lourds coups à la porte. Le Dey avait-il oublié de l'informer d'une chose? Paniqué, car il ne pouvait se présenter à lui ainsi, il reboutonna en vitesse son col.

- Oui, votre Altesse? Prononça-t-il en écartant furtivement une mèche bouclée de son front.

La porte s'ouvrit en grand, tout autant que ses yeux lorsqu'il vit que la personne qui se présentait à lui n'était pas celle qu'il attendait.

- J'aime quand tu m'appelles par ce titre. Tu devrais faire ça plus souvent.

- M... Malika?! Balbutia-t-il de surprise. Que fais-tu ici?!

- C'est impressionnant, cet endroit! Déclara-t-elle sans l'écouter.

Elle s'avança dans la pièce, les mains sur les hanches. Elle était petite, mais ses meubles peu nombreux étaient plus que convenables. L'armoire et la table étaient faits du plus beau bois qu'elle n'avait jamais vu, et les draps blancs du lit, tout près de la fenêtre, semblaient être aussi doux que de la soie de Chine. Elle dû se retenir pour ne pas s'y affaler. Elle fera ça après, peut-être.

Elle remarqua les nombreux croquis dispersés çà et là sur le sol, la table et le rebord de la fenêtre, et ne pu retenir un sourire.

- Malika, répéta-t-il. Que fais-tu ici? Comment es-tu entrée?

La mélodie des sentimentsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant