Bunkoeur [ PLK ]

38. TRAIN DE VIE

Point de vue Polak

17h54

Si je devais résumer ces six derniers mois en un mot ? Travail. J'avais charbonné comme un noich à n'en plus voir la lumière du jour. Mon train de vie était presque devenu atypique. Rythmé par des journées entières et des nuits blanches au studio, des interviews ici et là, des soirées privées, des showcases...c'était parfois épuisant mais je vivais enfin pleinement de ma passion.

Et tous ces efforts n'avaient pas tardé à porter leur fruits. Ténébreux venait d'être certifié disque d'or. Au début j'avais cru à un prank à l'annonce de la nouvelle tant elle était grosse mais quand Flav m'avait remis le disque d'or physique entre les mains, j'avais réalisé l'ampleur du truc.

Pour l'occasion, les gars du label m'avaient organisé une petite fête dans les locaux de Panenka. Il y avait de la bonne bouffe et une trentaine de personnes : des potes, mon Panama Bende, de la famille et des collègues principalement. J'étais sollicité par tous : on me félicitait et me prenait en photo de part et d'autre.

Mamie était aussi présente, ça me faisait plaisir de la voir là car mon nouveau train de vie ne nous permettait plus de passer du temps ensemble bien qu'on vivait toujours sous le même toit. Je naviguai parmi les invités lorsque mamie, qui était en pleine discussion avec mon gars SDM, m'interpella brusquement :

- Félicitations mon grooos bébé! - Elle m'étreignit avec ses deux bras devant mon pote en parsemant mon visage de baisers, ça aurait pu être gênant mais ça ne l'était pas, Mamie était validée par toute la cité.

SDM ne put s'empêcher d'esquisser un rictus amusé en s'éloignant pour nous laisser dans l'intimité.

- Moh merci ma petite mamie! Tout se passe bien? - j'interrogeai en lui rendant la pareille.

- Oui! - Elle répondit puis en s'approchant plus discrètement de mon oreille dit : - Ça aurait été encore mieux si elle avait été là...

- Mamie...

- Je dis ça, je dis rien... - Ma grand-mère me lança un regard malicieux puis fuit en portant un petit four à ses lèvres.

On avait eu des discussions à n'en plus finir avec ma grand-mère et elle revenait à la charge à chaque fois. Dans toutes nos activités, elle faisait référence à Lara. Quand on faisait les magasins par exemple, elle allait dans la section femme « Prend ça pour Lara », « Ça lui irait ça ? » et j'avais fini par accumuler une tonne de vêtements pour meufs dans ma chambre. Mamie, elle, avait finit par comprendre que je ne les lui donnais pas parce que nous n'étions plus en contact.

Elle m'avait littéralement fait la gueule pendant deux semaines quand je lui avais annoncé. Je ne lui avais même pas avoué la vraie raison. Elle m'aurait probablement renié.

Au lieu de ça, l'excuse était que je préférais me concentrer sur ma carrière et en fin de compte, le succès inespéré de Ténébreux avait corroboré mon mensonge. Mais bref, c'était quand même étrange. C'est comme si, Lara lui manquait plus qu'à moi. Il n'eut pas un seul jour où elle ne me disait pas « Zadzwoń do niej » (appelle la).

Mon père était aussi de la partie. Il était venu avec Enzo et Léna qui eux, s'étaient éclipsés pour jouer avec le tourne disque vinyle qui se trouvait sur une des étagères.

- J'suis fier de toi mon fils. - dit-il en me donnant une poignée de main pudique.

- Merci, papa. Ça me fait plaisir venant de ta part.