Chapitre 40º

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Sophia rouvrit les yeux. Son frère ne semblait pas en colère. En fait, il avait surtout l’air désabusé.

      — Vous êtes un homme fort, Parker. Et une femme a besoin d’un homme fort. Alors je vous accorde la main de ma sœur, ainsi qu’une importante dot.

      — Non, répliqua Ben d’une voix ferme. Je refuse la dot. Sophia n’apportera à notre union que ce qu’elle souhaite y apporter. Elle peut venir avec des bibelots de famille si elle le souhaite, mais rien de plus.

      Elle faillit s’étrangler. Des bibelots de famille ? D’où Ben sortait-il cette idée ? Pour la première fois depuis qu’elle avait accepté sa proposition, un frisson de crainte glissa le long de son dos. Tremblante, elle regarda Phil descendre de son trône et serrer la main de Ben, un peu comme s’ils scellaient un contrat commercial. Était-ce ce qu’ils faisaient ? Non, évidemment que non. Pourtant…

      Un nouveau frisson la traversa. En fait, elle venait d’assister à une bataille d’ego entre deux hommes puissants qui avaient l’habitude d’obtenir tout ce qu’ils désiraient. Si Ben avait reculé, s’il s’était incliné devant le pouvoir de son frère, ou s’il avait accepté la récompense, leur mariage n’aurait pas eu lieu. D’une façon ou d’une autre, Phil l’aurait empêché. Mais Ben n’avait pas faibli. Il avait montré qu’il était un homme puissant qui n’avait peur de rien. Il n’avait pas baissé les yeux de vant Philippe, et il l’avait gagnée, exactement comme il aurait pu empocher le gros lot au casino.

      Sophia serra les poings, si fort que ses ongles griffèrent ses paumes. Il fallait à tout prix qu’elle arrête de se faire des illusions, d’espérer l’impossible. À quoi bon gâcher l’avenir ? Mieux valait profiter du présent. En plus, elle allait obtenir ce qu’elle désirait. Et ce qu’elle désirait, c’était Ben, un homme qui la faisait vibrer, allumait ses sens, lui donnait l’impression d’être vivante et de pouvoir escalader des montagnes. Ne lui avait-il pas dit à New York qu’elle était capable d’atteindre tous les buts qu’elle se fixait ? Il ne lui avait jamais promis un conte de fées, ne lui avait jamais menti, n’avait jamais fait semblant de connaître des sentiments qui lui étaient inconnus. Et de cela elle devait lui être reconnaissante.

      Elle ravala l’amertume qui lui montait dans la gorge. Philippe l’avait autorisée à se marier, et pourtant elle ne ressentait aucune joie…

      — Merci, bredouilla-t-elle Sa voix manquait d’enthousiasme. Honteuse, elle baissa les yeux. Tout à coup, elle ne ressentait rien, à part de la lassitude.

      — J’ai fait installer Ben dans la suite de l’Ambassadeur, annonça son frère. Peu importe si vous avez vécu ensemble à New York : ici, vous êtes dans le palais royal, il est important de respecter certaines règles de bienséance. Il est préférable que vous ne partagiez pas votre chambre avant d’être mariés. Respectons un peu la tradition.

      Sophia leva les yeux vers Ben . Sans doute allait-il protester ? Un homme avec un appétit sexuel tel que le sien allait trouver le fait de faire chambre à part rétrograde et hypocrite.

      — C’est parfait, dit-il, à sa grande surprise.

      — Très bien, approuva Philippe. Je serais honoré si vous acceptiez d’être mon invité d’honneur au bal de la Saint-Sylvestre que nous organisons chaque année au palais. Ce sera l’occasion rêvée de vous présenter au peuple de Brestania . J’annoncerai vos fiançailles le lendemain. Si vous êtes d’accord, bien sûr.

      — Ce sera un honneur pour moi, Altesse, affirma Ben à ses côtés,
Sophia suivait le majordome le long des interminables couloirs du palais, minée par la déception. Les deux hommes avaient parlé d’elle comme si elle n’était qu’un banal objet à négocier.

UN Millionnaire Pas Comme Les AutresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant