Chapitre 43º

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Sophia poussa la porte et demeura immobile quelques instants. Ben était déjà là. Toujours aussi séduisant, toujours aussi charismatique. Elle rassembla ses forces et calma son angoisse le temps de quelques battements de cils puis referma la porte derrière elle Je t’ai demandé de me retrouver ici pour t’annoncer que… Que je ne peux pas t’épouser.

      Elle le dévisagea, à la recherche d’une trace d’émotion ou d’un petit quelque chose qui lui indiquerait que ses paroles le touchaient. Mais non. Rien. Son fier visage demeurait fermé, impénétrable. Finalement, sa décision n’en devenait que plus facile : l’homme qu’elle avait connu à New York semblait avoir disparu.

      — Je voulais te le dire ce soir, avant l’annonce officielle.

      — Pourquoi ? Je ne pensais pas que tu renoncerais à cause d’une étreinte décevante.

      — J’avoue que cet épisode a pesé dans ma décision.

      — Tu veux que je verrouille la pièce et que je te fasse jouir ? Te sentiras-tu mieux, après ?

      Sophia s’empourpra. Elle était mal à l’aise.

      — Non, bien sûr que non. Il y a autre chose.

      — Explique-moi
Que répondre ? Elle pouvait choisir la solution de facilité et lui dire qu’elle avait simplement changé d’avis, qu’elle ne voulait plus se marier. Elle pouvait même lui faire croire qu’elle aimait tant la vie de princesse qu’elle n’avait plus envie de quitter le château. Sauf que Ben avait de l’intuition. Il devinerait à coup sûr qu’il s’agissait d’un mensonge. Pourquoi avait-elle cru qu’une telle solution serait facile ? Rien ne serait facile.

      — Parce que nous attendons des choses différentes de la vie, finit-elle par répondre.

      — Je pensais que nous avions déjà abordé la question et que nous avions conclu que nous désirions la même chose : une vie de famille, ensemble. Je pensais que nous étions d’accord sur ce point.

      Sophia secoua la tête. Elle n’avait d’autre solution que de lui dire la vérité, même si c’était difficile. Il fallait qu’elle se jette à l’eau.

      — Je ne peux pas t’épouser parce que je suis tombée amoureuse de toi, et parce que je peux voir sur ton visage à quel point cette nouvelle t’horrifie.

      — L’amour n’a jamais fait partie de notre accord.

      — J’en suis bien consciente, répliqua-t-elle, la voix à peine plus forte qu’un murmure. Tu penses vraiment que j’ai envie d’éprouver ces sentiments ? Ce n’est pas le cas. Je dois cependant être honnête avec toi. La vérité est que je suis tombée amoureuse de toi, Ben. J’ai fait mon possible pour l’éviter, mais je n’ai pas réussi à me maîtriser. Et il n’y a plus rien que je puisse faire.

      Elle était au désespoir. Si seulement il pouvait réagir, dire quelque chose ! Mais il demeurait silencieux, imperturbable.

      — Je sais qu’un mariage arrangé ne peut pas fonctionner si l’amour entre en ligne de compte, reprit-elle alors. Je pensais que je pouvais me contenter d’un mariage de façade, mais je me suis trompée. Tu peux croire que je suis stupide, ou naïve, mais je préfère cependant attendre l’amour, quitte à ne jamais le rencontrer Elle se tut. Ses mots avaient-ils touché Ben ? Y avait-il un petit espoir que ses sentiments puissent être partagés ? Et s’il lui annonçait que l’idée de l’amour ne le rebutait plus, cela suffirait-il à Sophia pour accepter de l’épouser ? La moindre craquelure dans l’armure de Ben voudrait dire que son amour pourrait peut-être s’insinuer jusqu’à son cœur.

      Elle garda les yeux fixés sur son visage. Qui était devenu carrément hostile.

      — Je t’ai dit à plusieurs reprises que l’amour ne m’intéressait pas. Et tu sais pourquoi ? Parce que cela ne veut rien dire. Rien. L’amour n’est qu’un mot, un mot utilisé pour masquer l’appât du gain, le désir ou l’ambition. Tu pensais vraiment que ton aveu allait me faire changer d’avis ? Qu’il te suffisait de me regarder avec tes grands yeux bleus pour que je craque ?

      Voilà, il s’était prononcé. Tout espoir était maintenant perdu. Un vertige la saisit. Elle était à deux doigts de s’effondrer Non ! Elle allait sortir de cette relation le cœur brisé, mais elle ne perdrait sûrement pas sa dignité. Elle reprit, d’un ton aussi assuré que possible :

      — Non, Ben, je n’y croyais pas, même si je ne te cache pas qu’une petite partie de moi l’espérait. Je pensais juste que tu serais assez ouvert pour admettre que parfois les sentiments peuvent s’épanouir. Mais tu refuses de les laisser s’épanouir. Tu es bien trop borné. Maintenant, nous devons mettre un terme à nos fiançailles.

      — Tu veux que j’aille voir ton frère pour lui dire que mes vœux n’avaient aucune valeur ?

      — Ne t’inquiète pas, je veillerai à ce qu’il sache que tu n’es pas revenu sur ta précieuse parole et que toute la faute me revient. Je… Je n’aurais jamais dû accepter ce projet de mariage.

      — Pour la deuxième fois, tu annules ton mariage. Ta réputation risque de souffrir, j’espère que tu en es consciente.

      Sophia releva le menton et regarda Ben droit dans les yeux.

  Un petit moment de honte vaut mieux qu’une vie entière de regret, non ? Tes mots peuvent parfois être cruels, mais je dois te remercier pour ton honnêteté. Parce qu’à cet instant précis, je trouve très facile de ne pas t’aimer.

        * * **

UN Millionnaire Pas Comme Les AutresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant