Chapitre 6º

800 78 0
                                    

Sophia attrapa le fouet et mélangea avec toute son énergie la pâte à gâteaux. Par la fenêtre, elle vit Ben traverser la cour. Savoir que son patron traînait dans les environs plus longtemps que prévu était une véritable torture. Il lui avait affirmé ne faire que passer à Poonbarra, alors pourquoi était-il encore ici ? Un directeur de multinationale n’avait-il rien de mieux à faire que de s’éterniser au milieu de l’Outback australien ? Un tel homme avait sans doute mieux à faire qu’aider ses ouvriers à réparer de vieilles barrières. Et pourquoi diable était-il obligé d’arpenter les lieux en ressemblant à une gravure de mode ?

      Il approcha de la maison principale, et le rythme cardiaque de Sophia s’emballa. Ben avait depuis longtemps remisé le costume sur mesure qu’il portait le jour de son arrivée. Il était aujourd’hui vêtu d’un jean usé si moulant qu’il semblait avoir été cousu directement sur sa peau. Quant à son T-shirt noir, il soulignait des abdominaux parfaitement ciselés.

      Plus le temps passait, plus sa gêne augmentait. À chaque fois qu’elle apercevait le bel Anglais dans son champ de vision, son corps prenait le pouvoir sur sa raison et des réactions inédites l’envahissaient. Des réactions concentrées dans la région de ses seins et de son entrejambe, des réactions qu’elle n’avait jamais connues jusqu’à présent. Elle se répétait qu’elle réagissait ainsi seulement parce qu’elle était au milieu de nulle part, à des milliers de kilomètres du luxueux palais dans lequel elle avait grandi. C’était pour cette raison qu’elle éprouvait ce sentiment de perte de contrôle, uniquement pour cette raison, n’est-ce pas ?

      Elle faisait son possible pour éviter son patron, s’éloignant à chaque fois qu’elle le voyait. En vain. Une force mystérieuse semblait lui avoir jeté un sort. Impossible de ne pas penser à Ben Parker, impossible de maîtriser ses réactions, impossible de l’éviter.

      Il poussa la porte et entra dans la cuisine. Ses cheveux noir corbeau encadraient son visage sévère de boucles souples qui l’adoucissaient.

      Sophia reposa son saladier et leva les yeux vers son visiteur. Instantanément, un frisson glissa le long de son dos. Elle réprima un soupir. Pourquoi ne pouvait-elle pas regarder ce visage parfait sans se demander ce qu’elle ressentirait si ses lèvres sensuelles l’embrassaient ? Elle était vraiment pathétique.

      — Puis-je faire quelque chose pour vous ? demanda-t-elle.

      — Vous voulez dire : à part espérer que je parte vite et loin ?

      — Je vous l’ai déjà dit, je deviens mal à l’aise dès que les gens me regardent travailler.

      — En effet, vous l’avez dit. Soyez rassurée, vous n’aurez pas à supporter ma présence bien longtemps. Je quitte la ferme demain à la première heure.

      — Oh ! Vraiment ?

      Elle se força à museler la stupide déception qu’elle ressentait soudain.

      — Oui, vraiment. Vous serez enfin débarrassée de moi et…

      Il s’interrompit et lui décocha un sourire craquant, avant de reprendre d’un ton plus enjoué :

      — Je pensais que vous pourriez préparer un dîner spécial pour les gars ce soir, une sorte de repas de Noël en avance. Ce serait une façon pour moi de les remercier pour tout le travail effectué pendant l’année. Nous pourrions déboucher quelques bonnes bouteilles de vin, et ensuite aller jusqu’à Corksville pour un dernier verre. Pensez-vous pouvoir vous en occuper ?

      Sophia demeura immobile. Quand Ben la regardait ainsi, toute volonté la désertait, toute force l’abandonnait. Elle se liquéfiait sur place.

      — Bien sûr, finit-elle par marmonner en baissant la tête.

      *  *  

UN Millionnaire Pas Comme Les AutresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant