Chapitre 16

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Eloïse

Sans lui laisser le temps de réagir, je me détourne de lui et me retourne vers le sac. Je me concentre sur ce que m'a dit Race. Je dois tout faire exploser sur ce sac.

Sans un mot, je me mets à taper de plus en plus fort en repensant à tout ce bordel qu'est devenue ma vie en si peu de temps. Je repense à cet acharnement que Charlotte et moi avons subi pendant des mois, à l'enlèvement de ma meilleure amie me laissant seule avec mes doutes et mes peurs, mon nouveau garde du corps qui est aussi flippant qu'attirant (et qui d'ailleurs semble bipolaire), puis l'image de moi en train de dormir.

Je reporte toute mon impuissance sur ce sac. Mon impuissance à ne plus rien contrôler dans ma vie.

Coups après coups, mes frappes deviennent de plus en plus violentes et ma rage augmente de plus en plus. Je déverse toute la haine que j'éprouve en ce moment pour N.

Je frappe tellement fort que mon poing en devient douloureux. Je ne cesse de frapper que lorsque je me sens vide d'énergie. Que je n'ai plus de force aussi bien mentalement que physiquement.

Me souvenant soudainement de sa présence, je me retourne vers Race qui n'a rien perdu du spectacle. Je me sens soudainement honteuse de m'être autant laissée aller sur ce sac devant lui. Je ne voulais pas exploser et c'est exactement ce que j'ai fait sous les conseils de Race. Je meurs d'envie d'en savoir plus sur les révélations qu'il m'a faites.

Je suis certaine que ce dernier a vécu des choses affreuses et que c'est pour cette raison qu'il est si froid avec tout le monde. Je me sens aussi flattée qu'il se soit ouvert à moi de cette manière. Certes, je ne sais pas ce qu'il a vécu ou ce qu'il s'est passé dans sa vie pour qu'il éprouve une t-elle rage, mais d'un côté, il m'a avoué une partie de ses tourments donc ça prouve d'une certaine manière qu'il a confiance en moi. Enfin, je crois. . .

- Et bien, je ne savais pas que cette histoire te perturbait autant, dit-il en faisant référence à mes coups.

- Le problème, c'est que je me sens impuissante. Je ne sais pas ce que je dois faire ni comment je dois gérer tout ça. Je suis morte de peur et je ne peux rien y faire.

Il se gratte la tête tout en marquant une pause et fini par me répondre tandis que je retire mes gants (enfin, j'essaie, parce que c'est légèrement compliqué).

- Tu sais que je ne laisserai rien t'arriver.

Sa phrase sonne à la fois comme une certitude, mais aussi comme une promesse. Je le sais qu'il ne laissera rien m'arriver. En même temps, c'est la mission que Richard lui a donnée donc il n'a pas vraiment le choix.

- Je sais, mais tu as bien vu que même quand tu es là, il arrive à m'atteindre.

Il arrivera toujours à m'atteindre ! Il ne lâchera rien tant qu'il ne nous aura pas Charlotte et moi.

Je ressens soudain le besoin de vider mon sac auprès de Race. Je pense que j'ai besoin de lui dire tout ce que j'ai sur le coeur et que je mets de côté depuis le début de cette histoire. Je vais peut-être radoter, mais c'est la vérité. Ma vie est devenue un véritable enfer, totalement incontrôlable et j'ai besoin de reprendre le contrôle.

- Je n'en peux plus Race... Je me sens épiée au moindre de mes mouvements. Et surtout, je me sens oppressée tellement j'en flippe. Depuis le début, j'essaie de relativiser en me disant que ça ne durera pas éternellement, mais je me rends compte qu'au plus le temps passe, au plus ce cinglé se transforme en psychopathe. Je n'ai pas l'habitude d'avoir des emmerdes sur le dos et je me sens tellement seule.

- Mais tu n'es pas seule. Tu sais que je suis là, que Ian aussi (même si sa garde n'a pas commencé) et qu'on ne laissera rien t'arriver.

- Oui, mais vous êtes là seulement parce que Richard vous en a donné l'ordre. Je ne me pleins pas, je me sens tellement seule et impuissante.

Perdant certainement patience, Race se rapproche de moi à grand pas puis prend mon visage en coupe histoire de capter toute mon attention. Ce geste et cette proximité provoquent en moi des milliers de frissons.

- Écoute-moi bien ! Certes, nous sommes là parce qu'on nous l'a demandé, mais sache qu'on ne te lâchera pas. Tu n'es pas seule et on fera notre possible pour résoudre cette histoire. À partir de maintenant, si tu as envie de crier, cris ; si tu as envie de parler, je t'écouterai et si tu as envie d'exploser, je t'emmènerai ici. Tu n'es pas seule.

Avant que je ne puisse dire quoi que ce soit, ses douces mains quittent mon visage et son corps se détache du mien pour sortir de la salle en me laissant en plan seule. Ses mots rentrent alors peu à peu dans mon esprit et je commence à me sentir rassurée. C'est vrai que c'est égoïste de ma part de dire que je me sens seule alors que lui est contraint de me coller toute la journée. Ce n'est pas ses problèmes pourtant, il se rajoute dans les miens, prêt à en découdre contre le reste du monde.

Je pense que depuis le début, j'ai mal jugé Race. Cet homme à l'allure froide est en réalité une bonne personne qui va peut-être me sauver la vie. Peut-être que s'il n'était pas là, N m'aurait déjà mis le grappin dessus. Donc en soit, il me sauve constamment la vie.

Quelque chose s'est passée dans cette salle ce matin. Pour la première fois, Race s'est ouvert à moi et je me suis ouverte à lui. Il a fait face à mes doutes afin de m'aider à me sentir mieux et pour une fois, il n'a pas été froid. Il a été lui-même et a arrêté de se cacher derrière le masque qu'il s'est construit contre le reste du monde. En réalité, Race n'a rien d'un homme dangereux même si c'est ce qu'il veut faire croire.

Je retire mes gants puis sors de la salle pour le rejoindre dans la petite ruelle. Il m'attend déjà, casque à la main, assit sur sa bécane avec des allures de Bad Boy.

Avant même de monter à mon tour sur l'engin, je pose ma main sur son épaule et je regarde avec toute la sincérité dont je fais preuve.

- Merci beaucoup Race.

Il me répond d'un signe de tête puis je monte sur la moto avant qu'il démarre.

Shadow Lover IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant