T'aimer ou te détester

Chapitre 16 -2/2

Jérémy monte sur le podium sans adresser un sourire au photographe ni au jury qui lui remet une médaille d'argent.

Je le retrouve à sa sortie des vestiaires. Il à le visage fermé et son sourire d'avant la course a totalement disparu. Et la tempête ou peut-être même l'ouragan s'approche de secondes en secondes et j'essaye de m'y préparer mentalement.
Je me jette dans ses bras mais comme je m'y attendais, il ne me serre pas contre lui.

-Bravo.

-Je n'ai pas gagné, dit-il avec toujours aussi peu d'enthousiasme.

Je me détache de lui et je vois de la colère dans ses yeux, leur bleu est plus foncé que d'habitude. Sa petite veine au niveau du bras est bien gonflée et je sais qu'il est au bord de l'explosion.

-C'est déjà bien deuxième, dis-je pour essayer de le calmer.

-Non, c'est minable, renchérit-il en serrant les dents.

-Arrête, tu devrais être content, tu as fini sur le podium.

-Bah tu vois, je ne suis pas ravi.

Je vois très bien que d'être deuxième le rend triste et en colère. Mais pourquoi est-il désagréable avec moi? Je ne suis pour rien en sa deuxième place.

-Pourquoi tu fais la gueule?

-Parce que je suis deuxième!

-Je sais, j'ai vue. Arrête de me crier dessus! C'est pas de ma faute!

-Si, c'est ta faute! Si tu ne m'avais pas déconcentré, j'aurai gagné!

Maintenant c'est de ma faute. Et en plus, si ma présence le déconcentre, c'est qu'il ne sait pas faire abstraction de ce qui l'entoure quand il nage. Je n'étais tout de même pas seins nues.

-J'aurais mieux fait de ne pas venir. Tu répètes que tu as besoin de soutien et parce que tu as perdu, je t'ai déconcentré! C'est minable comme excuse!

-Je te dis que c'est important et toi tu me réponds que c'est bien d'être deuxième!

-Oui. C'est bien d'être deuxième!

La première place est la meilleure mais être deuxième c'est bien. Je ne comprends pas pourquoi il est autant énervé.

-Ça fait des jours que je te dis qu'il faut que je sois premier!

Il ne me l'a dit qu'une fois et maintenant, il dit qu'il me l'a répété tous les jours.

-Ça change quoi d'être premier où deuxième?!

-Le premier est sélectionné et pas les autres!

-Je ne savais pas.

-C'est ça le problème! T'as rien dans la tête!

Il est en train de dire que je suis idiote où il s'est mal exprimé? J'espère pour lui que ce n'était pas dans son intention de m'insulter même si je pense qu'il l'a fait exprès.
Même si je suis persuadée que ce qu'il dit en ce moment c'est juste sous le coup de la colère, ça me touche et je ne peux pas m'empêcher de pleurer.

-T'es en train de me traiter de conne là?!

-Oui, parce que tu l'es!

En fait, il était sérieux. Il me prend pour une idiote parce que je ne savais pas que si il est deuxième, il n'est pas sélectionné. Je pense que je ne suis pas la seule à ignorer ce genre de choses.
Sa deuxième place c'est de sa faute et c'est bien fait pour lui.
Tout ce qu'il veut en me disant ça c'est me faire du mal et il y arrive.
Si il veut jouer à ça, je vais jouer et il verra que moi aussi je peux le blesser. J'en suis arrivée à un tel niveau de colère que je pourrai lui dire n'importe quoi uniquement pour lui faire du mal et ça m'effraye d'être incapable de retenir mes mots.

-Non, le con dans l'histoire, c'est toi! En plus de perdre ta qualification, tu viens de me perdre moi!

Je ne lui laisse pas le temps de répondre. Je pars le plus vite possible sans me retourner.

Émilie est debout dans le hall quand je passe devant elle.

-Kylie, attends moi.

Je continue de marcher avec le visage rougis et les yeux pleins de larmes. Mes joues sont trempées et du revers de la main, je les sèche mais les larmes reviennent.
Mes sanglots joues avec mes nerfs et j'ai envie de partir loin de lui où de toute personne qui me le rappelle. Pourquoi m'avoir crié dessus et traité de conne? Il est malsain et égoïste, il croit peut-être que le monde s'arrête de tourner quand tout ne se passe pas comme il l'aurait voulu. Mais il se trompe.
J'ai vécu sans lui et je pourrais à nouveau le faire même si je n'en ai pas envie. Je lui en veux mais je l'aime et je n'ai pas envie d'être loin de lui même si je viens de lui dire le contraire.
Pourquoi tout est si compliqué avec lui? Pourquoi j'ai le cœur brisé?

Émilie me rattrape après m'avoir couru après pendant quelques minutes.

-Qu'est-ce qu'il y a? me demande t-elle en posant sa main sur mon épaule.

-Rien.

Je tourne la tête pour qu'elle ne me voit pas pleurer.

-Tu ne serais pas dans cet état si il ne se passait rien. Regarde moi, dit-elle doucement en tournant ma tête vers elle à l'aide de son pouce. Qu'est-ce qu'il se passe?

-J'ai pas envie d'en parler et encore moins ici.

-Je te raccompagne alors.

-Oui.

Dans la voiture, je reste silencieuse et pour cause, je n'ai pas du tout envie de parler, seulement de pleurer encore et encore, ce que je fais sans m'en retenir.

Nous nous installons sur le canapé. Elle est assise et je suis allongée avec la tête sur ses genoux et elle caresse mes cheveux comme ma mère le faisait quand j'étais petite. Je tiens dans mes bras l'ours en peluche que nous avions gagné à la fête foraine.

-Est-ce que tu veux me dire ce qu'il s'est passé?

-Oui (je prends une grande inspiration avant de me lancer). Je le félicitait pour sa deuxième place et il à été très désagréable. Il m'a traité de conne et je lui est balancé à la gueule que le con de nous deux, c'est lui parce qu'en plus de perdre sa qualification, il venait de me perdre. Mais c'est pas ce que je pense, je ne veux pas rompre avec lui.

-Vous êtes bêtes et tous les deux autant l'un que l'autre. Vous ne pensez pas ce que vous dites et après vous le regrettez. Vous ne savez ni vous contrôler ni vous arrêter et après vous êtes tristes.

-Je sais que je suis conne, il me l'a dit et il a raison.

-Non, tu es loin d'être bête. Tu penses ça parce que tu culpabilise, mais c'est faux.

Je culpabilise peut-être, mais il n'empêche que lui avoir dit qu'il venait de me perdre était complètement stupide. Elle a raison, nous sommes tous les deux des idiots, mais je ne pense pas qu'il soit dans le même état que moi.