Les Frères De La Nuit -2- La Morsure Du Destin

Chapitre 44

Daemon continua de laver son âme-soeur, ses mains passant sur son dos et ses épaules. Pourtant, ses gestes n'avaient rien de spontanés, ils semblaient être exécutés de manière inconsciente, tel un automate. En effet, si son corps était toujours ici, son esprit en revanche était parti depuis bien longtemps. Il tentait d'assimiler le flot d'informations que Kaya venait de lui dévoiler, ce qui n'était pas chose aisée. Il avait toujours su qu'elle était l'une des plus anciennes devineresses, de part l'assurance qu'elle dégageait, et aussi grâce à la puissance qui émanait d'elle. Mais jamais il n'aurait pensé qu'elle puisse être la devineresse originelle, l'ainée dont parlait la prophétie. Pourtant, ce qui le choquait le plus, ce fut ses origines. Elle était la fille unique de Klaus, son plus grand ennemi, celui qui avait fait de sa vie un enfer un siècle durant. Avec du recul, il songea que seul leurs yeux d'un bleu profond tournant vers le violet aurait pu faire le rapprochement entre eux. Elle du s'apercevoir de son trouble, ses mains s'étant probablement crispée sur ses épaules. 

- Tu dois me détester, maintenant que tu sais que ton âme-soeur n'est autre que la fille de ton plus grand ennemi. Bon nombre d'immortels le feraient pour bien moins que ça.

- Je ne pourrais jamais. Je ne nie pas que tout cela était inattendu. Je comprends que tu aies mis si longtemps à tout me dévoiler. Que tu aies le même sang que Klaus ne signifie pas que tu lui ressembles.

- Je t'ai pourtant livré à lui. Je suis peut-être aussi mauvaise que lui.

- Même s'il reste des détails que je ne comprends toujours pas, je connais maintenant les raisons pour lesquelles tu as agis ainsi ce soir là, du moins en partie. Pour une immortelle indépendante telle que toi, se retrouver soudainement liée à un homme qui te dicte ta conduite sans cesse peut être insupportable, surtout si l'on tient compte de la prophétie et de la mission que tu dois accomplir. Je t'ai jugée égoïste, inconsciente. J'ai exigé de toi une totale confiance sans même prendre la peine de t'accorder la mienne. Je n'ai pas vu tous les sacrifices que tu as du accomplir. Tu portes sur tes épaules un poids bien plus grand que moi qui suis roi. Kaya, pourras-tu un jour me pardonner ?

D'un mouvement, elle se retourna dans la baignoire pour se retrouver face à lui. Elle lut dans son regard une telle sincérité qu'elle en fut émue. Seule Elizabeth avait réussit jusqu'alors à faire naitre une telle émotion en elle. 

- Je n'ai pas non plus été juste envers toi. Je ne t'ai pas accordé la moindre chance, il y a un siècle. J'aurais du respecter notre marché.

Tous deux avaient commis des erreurs et tous deux avaient réussi à en tirer une leçon. Daemon songea avec espoir qu'un avenir était enfin possible entre eux. Lorsqu'il se mit à caresser sa lèvre fendue avec son pouce, de nouvelles questions l'assaillir. 

- J'ai tant de questions à te poser, mais je ne voudrais pas trop insister.

 - J'étais déjà décidée à tout te dire. Que veux-tu savoir ?

- Pourquoi as-tu laissé ce mortel te frapper ?

De nouveau, elle cala son dos contre la baignoire. 

- Je voulais me punir. Mais je voulais également faire souffrir Klaus. 

- Comment ?

Elle soupira.

- Ma mère et moi avons toujours vécues isolées de tous. Tant que nous ne faisions pas parler de nous, Klaus n'avait aucune raison de nous rechercher. Puis, la prophétie est apparue, je n'avais alors que quinze ans. Depuis, nous n'avons eu de cesse de fuir. Jusqu'à cette nuit là. 

Elle arrêta son discours un moment, sous l'emprise des émotions qui déferlèrent en elle. Parler de cette nuit ravivait de mauvais souvenirs.

- Il nous a retrouvées. Ma mère a tenté de le ralentir mais hélas, cela n'a pas suffit. Par miracle, j'ai réussi à m'échapper et je suis arrivée au pieds de l'autel des dieux où l'une des trois Nornes, Skuld, m'a accueillie. Était-ce par pitié, par simple bienveillance ou était-ce un acte purement intéressé, je n'en sais rien. Il n'en reste pas moins qu'elle a accepté de m'aider. Elle m'a accordée deux dons.