Les Frères De La Nuit -2- La Morsure Du Destin

Chapitre 46

- Toi qui voit l'avenir, est-il prédit que tu sauras conduire dans le futur ?

- Qu'est-ce qui te fait croire que ce n'est pas déjà le cas ? 

- Dois-je vraiment répondre ?

Daemon s'accrocha à la poignée du plafond et son dos se calla contre son siège. Tandis qu'ils roulaient à contresens sur la nationale à plus de cent dix kilomètres heure, Kaya au volant, il se demandait dans quelle galère il s'était embarqué. La devineresse en revanche semblait tout à fait sereine. Elle n'avait pas l'air d'avoir conscience qu'en ce moment, elle devait esquiver une centaine de voitures qui roulaient juste en face de la leur. Nul doute qu'elle utilisait ses dons pour les éviter les unes après les autres. Il pouvait voir le visage des conducteurs avant qu'ils ne les dépassent, emplit de terreur mais aussi de fureur. Une preuve de plus que son âme-soeur était complètement siphonnée. Elle avait perdu la notion du temps et de la réalité. Ce qui était compréhensible étant donné que son esprit voyageait à travers le temps et était en avance de plusieurs millénaires.

- Je ne crois pas que ce soit ainsi que l'on doit conduire.

- Qu'est-ce que tu en sais ? 

- Et bien, si je me base sur le fait que toutes les voitures roulent dans un sens et que nous sommes les seuls à rouler dans l'autre sens, ça me semble plutôt évident. 

- Je ne vois aucune flèche indiquant une quelconque direction. 

- Je suis étonné que Sin t'aies de nouveau permis d'emprunter sa voiture,  étant donné l'état dans lequel tu l'avais laissée la dernière fois.

- Disons que Jaelyn s'est montrée assez convaincante.

- Donc tu l'as volée.

- Ce n'est pas un vol. C'est un emprunt, sans garantie de retour. Et cesse donc d'avoir peur, profite plutôt du moment présent. On se croirait dans Tunnel Rush !

- Encore une référence que je connais pas. 

- Par tous les dieux ! Il faut vraiment que je te mette à jour.

Elle alluma la radio et fit défiler les stations jusqu'à ce qu'elle trouve une musique qu'elle jugea audible et commença à chanter à tue-tête. 

- Tu sais ce à quoi que je pense ? demanda-t-il alors qu'elle enchaînait les fausses notes. La devineresse qui est en toi adore mon côté vieux-jeu. Accepte-le.

- C'est faux, elle le tolère, nuance. 

- Si tu le dis, conclut-il en haussant nonchalamment les épaules, un sourire aux lèvres.

- Sais-tu que tous ceux qui osent me contredire ainsi ont droit à un tour de manège en enfer ?

- C'est là le sort que tu me réserves ? Ce serait sous-entendre que je suis un adversaire facile à mettre au tapis.

- Sous-entendre ? Ça me semblait évident. 

Deamon ne put s'empêcher de rire. Force était de reconnaître que lui même était surpris de leur soudaine entente, malgré un début plutôt chaotique. Il repensa à leur première au bord du lac. A cet instant, lorsqu'elle lui tournait le dos, entrant lentement dans le lac, sa chevelure cascadant jusqu'à ses larges hanches, jamais il n'aurait pensé qu'il apprécierait autant son caractère indépendant, son arrogance et son originalité. Il s'était même habitué à son humour. Il aimait leurs échanges parfois vifs et stimulants. Il avait la certitude à présent que Kaya était indispensable à son bonheur futur. 

- Comptes-tu enfin le dire où nous allons ?

- Tu le sauras en temps voulu. Ce qui n'est pas prêt d'arriver car il semblerait que je me sois trompée de chemin. Accroche toi bien.