Les Frères De La Nuit -2- La Morsure Du Destin

Chapitre 43

Monde des Immortels ; Dans un lointain, très lointain passé...

Au coeur de la forêt se promenait une jeune fille. Ses longs cheveux noirs de jais volaient dans le vent. Elle chantonnait un air joyaux tandis qu'elle cueillait des baies. Lorsqu'elle ne les déposait pas dans le panier placé sous son bras, elle les portait à sa bouche, savourant leur goût sucré. En cette période de l'année, la récolte se faisait rare, il était donc nécessaire de profiter de chaque petit plaisir que la nature avait à offrir. Le fin tissu qui recouvrait sa peau la réchauffait peu. Au moindre coup de vent, elle frissonnait. Soudain, des rires d'enfants se firent entendre. Elle partit en direction de leur source et arriva près d'une cascade rocheuse se jetant directement dans une rivière. Dans celle-ci se baignaient trois enfants, une fille et deux garçons. Le plus jeune d'entre eux, âgé d'une dizaine d'années environ, s'amusait à éclabousser les deux autres qui ripostaient en riant. Elle avait déjà vu ces enfants auparavant, lorsqu'ils s'amusaient dans la forêt, et les avaient espionné à leur insu, jalousant leurs rires. Sa mère lui interdisait tout contact avec les êtres humains, les jugeant dangereux. Pourtant, à les voir ainsi, ils n'avaient rien d'une menace. Cédant à une impulsion, elle les rejoignit. Dès lors qu'ils la virent, ils arrêtèrent instantanément leur activité.

- Bonjour, murmura-t-elle.

L'un des garçons plaça son bras devant les autres, comme en signe de protection. Sa barbe naissante ne laissait aucun doute quant au fait qu'il s'agissait du plus âgés des trois.

- Je ne voulais pas vous faire peur.

- Qui es-tu ?

- Je me nomme Kataliyana. Je cueillais des baies lorsque je vous ai entendu.

Ils se lancèrent un regard inquisiteur et, après ce qui sembla être une éternité, la fille prit la parole.

- Quel drôle de nom, Kataliyana. Moi c'est Calliope. Voici mon petit frère, Adonis, et lui c'est Nikos. Tu ne viens pas de notre village.

- Non, en effet.

- Ca se voit. Chez nous, le Péplos se porte sur les deux épaules.

En effet, si les deux tuniques étaient maintenues à la taille par une ceinture en lin, elles étaient différentes en bien des points. Sa tenue était drapée autour de son épaule gauche, telle une toge romaine tandis que celle de son interlocutrice était soutenue aux deux épaules par des agrafes dorées, laissant le tissu assez lâche sur le devant pour obtenir un col bénitier.

- Bien, avant que tu n'arrives, nous avions décidé de faire une partie de mouche de bronze*. Tu peux te joindre à nous si tu le souhaites.

- En quoi cela consiste ?

- L'un de nous devra tourner sur lui-même les yeux bandés jusqu'à perdre ses repères puis il devra essayer d'attraper les autres joueurs qui gravitent autour de lui en les touchant.

- Je suis partante !

Ils passèrent ainsi le reste de l'après-midi à profiter du soleil au bord de la cascade. Pour sa mère, les humains n'étaient qu'une source d'ennuis dont il fallait se méfier. Pourtant, en cet instant, elle appréciait leur compagnie. Elle avait rarement l'occasion d'être en contact avec des personnes de son âge. Ses journées formaient une routine dont elle ne pouvait se substituer. Lorsqu'elle ne lui apprenait pas à se battre, sa mère adorait lui rappeler à quel point sa mission était importante pour toutes les Valkyries. Elle releva la tête vers le ciel qui s'était assombrit. Le soleil commençait à décliner, disparaissant lentement derrière l'horizon. Avec regret, elle songea qu'il était peut-être temps pour elle de retourner chez elle.