Chapitre 40

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La jeune femme sentit son coeur ralentir. Le peu de forces qui lui restait s'échappait au fur et à mesure de son corps endolori. Allait-elle s'en sortir ? Voilà bien des jours qu'elle avait perdu tout espoir de survivre à ce cauchemar. 

Le mot cauchemar était un doux euphémisme. Il s'agissait d'un rêve pénible et angoissant sur le moment, mais dont une tierce personne oubliait tout dès lors qu'elle se réveillait. Ce qu'elle vivait n'avait rien d'une simple hallucination. 

Elle était immortelle, elle ne pouvait donc mourir, mais elle ne vivait pas pour autant. Elle était las de lutter. Depuis trop longtemps, son corps brûlait d'une soif qu'elle ne pouvait étancher. Depuis trop longtemps elle se faisait saignée à mort, à tel point qu'elle n'éprouvait plus aucune souffrance physique à chaque coup infligé, son corps s'étant habitué peu à peu à  la douleur. 

Soudain, une lame entailla de nouveau sa chaire meurtrie, la ramenant brutalement à la réalité. 

- Te réfugier dans des pensées positives n'effacera pas la douleur, devineresse.

Elle tenta de parler mais aucun son ne sortit de sa bouche, ses cordes vocales semblaient paralysées, atrophiées. 

Elle était enfermée dans cette prison depuis si longtemps qu'elle en avait oublié la notion du temps. Klaus avait su la piéger en se servant de sa pire faiblesse, l'or. L'or attirait ces immortelles comme les fleurs attiraient les abeilles. Rares étaient les devineresses qui parvenaient à y résister, et si tel étaient le cas, elles n'y arrivaient qu'après de nombreuses décennies. Elle ne faisait malheureusement pas partie de ces chanceuses, ce qui expliquait pourquoi elle se retrouvait entre les griffes de ce maudit loup. 

- Tu ne me seras bientôt plus d'utilité. Ta souffrance s'éteindra d'elle-même lorsque tu prononceras ton dernier souffle. 

Ces paroles auraient du l'effrayer, mais elle était bien trop épuisée. Pourtant, elle devait réunir les dernières forces qui lui restait pour se sortir de cet enfer. C'était sa dernière chance. 

Réveille-toi.

Réveille-toi.

REVEILLE-TOI !

- Samia ! s'écria Kaya en ouvrant subitement les yeux.

Elle se redressa brutalement sur le lit et regarda autour d'elle, mais il n'y avait personne. Combien de temps avait-elle dormi ? Il faisait toujours nuit. 

Kaya, aide-moi...

Elle n'avait pas eu de vision de son amie depuis bien longtemps et voilà que cette nuit, elle en recevait une. Nul doutes qu'ils s'agissait d'un rappel à l'ordre. Elle avait passé bien trop de temps à essayer de fuir Daemon et remplir sa quête qu'elle n'avait pas eu l'occasion d'accomplir son autre mission, sauver Samia, la devineresse retenue prisonnière par Klaus. 

- Samia, où es-tu ? 

Aide...moi...

Elle jura intérieurement pour marquer son mécontentement. Elle s'était beaucoup trop laissée distraire ces dernières semaines. Il fallait qu'elle se reprenne au plus vite.

- Tient bon. J'arrive ! 

Elle s'habilla en hâte, enfila ses bottes puis pris ses armes qu'elle cacha sous sa jupe, accrochées à ses jarretières. Elle se dirigea ensuite vers la sortie sans prendre la peine d'en avertir Daemon. En cet instant, elle ne songeait qu'à Samia, qu'à la souffrance qu'elle ressentait.

La lune, à demie voilée par des nuages diffus, trônait toujours aussi haut dans le ciel, entourée d'un épais halo lumineux. Elle couru à en perdre haleine, dévalant les collines. La piste s'enfonça entre les arbres au pieds desquels des tapis de feuilles étouffaient chacun de ses pas. Après avoir parcourue des dizaines de kilomètres, elle ralentit et chercha du regard un chemin latéral. Elle ignorait la distance qui lui restait à parcourir ni même où elle devait se rendre exactement. Ses visions ne lui donnaient aucun point de repère. Lorsqu'une image lui apparaissait et la guidait vers une direction, une autre émergeait, lui proposant le chemin inverse, comme si leur créateur lui-même ne savait pas où il se trouvait. 

Les Frères De La Nuit -2- La Morsure Du DestinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant