31 ~ Au jeu d'échecs, les fous sont les plus près du roi (Proverbe français)

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Déplaçant le roi de son adversaire imaginaire en e4, Regina laissa un instant vaquer son regard vers la baie vitrée qu'elle avait pour une fois fermée. Le vent soufflait si fort qu'elle craignait que son pommier ne cède aux bourrasques. Observant cet arbre majestueux tanguer dans tous les sens, elle se délectait du bruit que faisait la pluie lorsqu'elle se fracassait contre les vitres de sa véranda. Elle aimait ce bruit assourdissant. 
Tapotant distraitement la table de son index, elle fronça des sourcils afin de trouver une solution. Mais aucune ne lui vint. Elle avait beau jouer et rejouer cette partie, elle perdait encore et encore, n'arrivant décidément pas à savoir comment cela était possible. 

La première fois qu'elle l'avait jouée, ce n'était pas contre elle-même. Ni contre son père qui lui avait appris à jouer aux échecs. Non, c'était contre Rumple Gold. Il y a des années de cela, et déjà à cette époque, elle avait perdu. Depuis quelques mois, elle s'évertuait à jouer encore et encore cette partie, comme si la gagner, lui assurait une victoire dans la vraie vie. Mais rien n'y faisait. Elle avait beau user de toute sa ruse, il restait toujours les mêmes pièces et si elle en possédait deux de plus, il ne semblait jamais qu'elle ait l'avantage. 

-Ma parole ! Mais vous ne dormez jamais ?! S'exclama Emma en entrant dans la pièce. 

Regina sursauta et se tourna vers Emma, prête à la sermonna. Toutefois, elle se retint en observant la Bostonienne dont les yeux étaient rougis et les mains légèrement tremblantes. De toute évidence, la jeune femme avait à nouveau été assaillie d'un cauchemar et tentait difficilement de s'en remettre. 

-Héloïse a peut-être raison. Le sommeil est surfait ! Répliqua Regina en songeant aux paroles de la jeune fille quelques jours plus tôt alors qu'elle rechignait à aller se coucher. 

-Ouais, bah, j'espère que ça lui passera bientôt. Ricana Emma en s'installant en face de la brune. C'est pas un peu chiant de jouer seule à chaque fois. 

-Non. C'est plutôt enrichissant. 

-Ah ? 

-L'avantage de jouer face à soi-même est que l'on peut mieux appréhender nos faiblesses et mieux se connaître aussi. Le but est d'anticiper vos propres réactions afin de ne pas être prise au dépourvu le jour où vous jouait contre quelqu'un. 

-Et qui gagne ? Vous ou vos réactions ? S'amusa Emma. 

-Ce n'est pas moi. Admit la joueuse en laissant vaquer son regard sur le plateau. Finalement, de ses doigts manucurés, elle attrapa sa Dame et la coucha. Encore. Vous voulez jouer, peut-être ? Proposa Regina en haussant d'un sourcil tandis qu'Emma observait sous toutes ses coutures le Cavalier. 

-Je ne sais pas jouer. 

-Je peux vous expliquer. 

-Non, ça ira. Je vais me contenter de mon ignorance et du peu d'honneur qu'il me reste. Expliqua Emma dans un sourire. Quel déluge. 

-Cela devrait durer jusqu'à demain soir. 

-Vous pensez qu'ils font comment au camp avec une tempête pareille ? 

-Il s'abrite. 

-S'il y a bien une chose que l'on peut dire de vous, c'est que vous n'êtes pas avare de mots. 

-Je ne sais pas Miss Swan et je n'en ai cure. Monsieur Gold est pragmatique alors je sais qu'il aura pris toutes les mesures nécessaires pour que le ciel ne s'écroule pas sur sa main-d'œuvre. 

-Dites, ça ne vous direz pas d'arrêter de m'appeler par Miss Swan. J'aime assez mon prénom, en fait.

-Et moi, je préfère votre nom. 

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