Renaissance

3 ~ Dans toute discussion, le plus délicat est toujours ...

3 ~ Dans toute discussion, le plus délicat est toujours de faire la différence entre une querelle de mots et une querelle de fond. (Bertrand Russell)

Battant des cils pour chasser les larmes qui s'invitaient au coin de ses yeux à cause du froid, Emma rangea son smartphone dans sa poche après avoir éteint son GPS et leva la tête en l'air pour observer la petite maison dont le lierre grimpait la façade couleur saumon. Elle s'avança jusqu'à la porte d'entrée et lut l'écriteau : " Archibald Hopper - Psychologue et psychanalyste. Diplômé de l'Université de Californie et de la Widener University Online. " Juste à côté de la plaque dorée se trouvait une affichette plastifiée : "Entrée sans frapper. Pour une prise de rendez-vous, merci de me laisser un mail à l'adresse suivante. "
Prenant au pied de la lettre l'invitation, Emma poussa la porte et entra dans un petit couloir en sucette. Elle se dirigea immédiatement vers le fond en forme de rond et s'installa sur la petite banquette en velours vert constatant la décoration de très mauvais goût. Se rendant compte qu'il restait encore quinze minutes à attendre, la jeune femme attrapa un des magazines posés négligemment sur la table basse avant de se mettre à ricaner bêtement.

-La princesse Diana morte dans un accident à Paris. Lut-elle à haute voix. Haussant des sourcils, elle laissa son regard vaquer afin de voir de quand datait le magazine : 1997. J'espère qu'il est plus à la page dans sa profession que dans les trucs qu'il propose à lire. Marmonna la jeune femme en fouillant un peu dans les magazines pour en trouver un d'actualité, mais peine perdue.

Soufflant, la jeune femme se leva et se mit à marcher de long en large, laissant son anxiété la prendre au fur et à mesure. Comment fallait-il se comporter ? Y avait-il des mots à dire et d'autres à taire ? Que pourrait-elle lui dire ? Et s'il posait trop de questions ? Des questions qu'à même sa fille, elle n'avait jamais voulu répondre ? Et si ...
Elle sursauta en entendant la porte s'ouvrir sur Henry, suivit d'un très grand homme à la soixantaine, roux et aux lunettes rondes et marrons.

-Tu es venue ! S'exclama Henry, la tristesse sur son visage s'en allant aussitôt pour laisser place à un grand sourire heureux. Il avait commencé à s'élancer vers elle pour la prendre dans ses bras avant de se stopper brusquement, comme s'il avait peur, comme si ce n'était pas convenable.

Et si, il l'avait retrouvé alors qu'elle ne le voulait pas ? Et si elle n'était pas tactile, comme sa mère ? Et si, elle le considérait avant tout comme un inconnu avec d'être son fils, sa chair de sa chair ? On ne prend décemment pas des inconnus dans ses bras comme ça. Comme de fait, Henry se fit immédiatement plus timide, sa véritable nature le rattrapant et présenta, un peu honteux, son psychologue à la blonde.

-Enchantée de faire votre connaissance, Miss Swan. Salua poliment l'homme au style écossais, tendant sa main.

-Moi aussi, docteur Hopper. Répondit Emma, mal-à-l'aise, consciente que l'homme en face d'elle savait probablement qui elle était et s'imaginant déjà être face à un homme qui pourrait découvrir les moindres de ses secrets les plus enfouis.

-Bien, je vais vous laisser. Il était si impatient de vous rejoindre, que j'ai préféré écourter notre séance. Je te dis à la semaine prochaine, même heure, Henry. Précisa l'homme avant de retourner dans son bureau.

Face à face, l'un comme l'autre ne savaient plus trop quoi faire. Comprenant que le garçon attendait quelque chose d'elle, Emma décida de sortir du cabinet, immédiatement suivi par le petit brun. Marchant tous les deux, côte à côte, à un mètre d'écart, chacun suivait l'autre. Ils avaient tant de choses à se dire, ils avaient tant rêvé de leur première discussion ensemble, mais maintenant qu'ils étaient enfin au jour J, aucun ne savait vraiment quoi dire. Comme deux amoureux timides, ils se lançaient des regards en coin, s'observant, ramenant immédiatement leur regard devant eux lorsqu'ils étaient sur le point d'être pris en faute.