Je me retrouve nez à nez avec Molly et la toise de haut, cachant difficilement le mépris qu'elle m'inspire. Elle a attaché ses cheveux violets en couettes, ce qui lui donne un air de peste et arbore un haut tellement moulant qu'il boudine sa poitrine. Lara se cache derrière elle, terrifiée par ma présence. Visiblement, elle fait moins la maligne quand je suis en face. Du coin de l'œil, je distingue des palettes de maquillage étalées sur le rebord du lavabo. Elle tient encore dans sa main son rouge à lèvre rose flashy qu'elle était en train d'appliquer.
— Emma, quelle surprise ! Tu écoutes aux portes, maintenant ? crache Molly, en me dévisageant.
Sa voix nasillarde m'agace déjà. Je recule d'un pas, en tentant de maîtriser ma colère pour éviter d'en venir à nouveau aux mains.
— J'étais là avant, c'est plutôt toi qui m'as forcé à écouter aux portes. Et entre nous, j'aurais préféré m'en passer.
Ses pupilles rétrécissent et ses traits sont tendus, elle fulmine de rage. Elle s'approche de moi dangereusement, sifflant entre ses dents, tel un serpent prêt à cracher son venin. Son visage est quasiment collé au mien et je remarque qu'elle souffre d'acné dissimulé par une couche de fond de teint. Ses paupières, bordées de faux cils à rallonge, accentuent les éclairs que me lancent ses yeux.
La situation devient dangereuse et je veux éviter qu'une bagarre n'éclate dans les toilettes. La tension est palpable et il y a de l'électricité dans l'air. Molly est prête à attaquer et Lara à protéger ses arrières. Deux filles contre moi, c'est un combat trop inégal. Je choisis de baisser les armes pour m'enfuir, c'est la solution la plus raisonnable. Je pousse Molly qui me bloque le passage pour me diriger vers la sortie. Elle fait volte face, surprise par mon comportement et serre les poings tellement forts que ses veines ressortent.
— Touche-moi encore une fois et je t'en colle une qui t'enverra direct au paradis, connasse ! profère-t-elle hors d'elle.
— Molly, calme-toi ! Elle ne vaut pas la peine que tu t'abîmes les mains, tente de la raisonner Lara.
— J'ai pas le temps pour une embrouille avec toi. La prochaine fois, viens me critiquer en face, ça sera plus rapide.
Ma provocation l'énerve davantage mais je ne sourcille pas. Son amie l'attrape par le bras pour l'empêcher d'user de la violence.
— Arrête de me toucher, s'énerve-t-elle, en poussant Lara sans ménagement. J'ai des comptes à régler. Répète ce que t'as dit.
Elle lève sa main, prête à m'attaquer. Je ne m'esquive pas, la fixant droit dans les yeux, le regard vif.
— Je ne vais pas te répéter des paroles que tu viens d'entendre à l'instant, si t'as une mémoire défaillante, ce n'est pas ma faute. Laisse-moi te dire quelque chose : je te considérerai comme mon ennemie, le jour où tu me diras en face ce que tu racontes dans mon dos. En attendant, tu es juste l'une de mes fans.
La réaction de Molly ne se fait pas attendre, elle part au quart de tour, le visage écarlate.
— Tu te fous de ma gueule ? Tu te prends pour qui à me parler comme ça ? T'es pas une star que je sache, je me prosternerai pas devant une fille aussi abrutie que toi !
Elle avance vers moi et tente d'attraper mon poignet, mais je glisse vers la droite, en l'évitant. Elle reste surprise quelques secondes de mon esquive et j'en profite pour ouvrir la porte et sortir. Je me retourne une dernière fois et lui lance le plus calmement possible :
— Tu ne m'arrives pas à la cheville, Molly, mais si un jour tu l'atteins, sois gentille et lace-moi mes chaussures. Peut-être que ça te permettra de trouver un but à ton existence.
Sans qu'elle n'ait le temps de répondre, je sors en claquant fermement la porte. Je suis consciente que ma répartie était puérile, néanmoins, je suis fière de m'être mise à son niveau pour lui clouer le bec, sans user de violence.
Je rejoins Élodie qui m'attend, collée à son téléphone.
— Pourquoi t'as pris tant de temps ?
— J'ai croisé Molly et une de ses amies. J'ai vraiment cru lui en coller une, elle me met hors de moi. Je ne sais même pas comment j'ai réussi à garder mon calme.
— C'est pas vraiment le meilleur endroit pour la croiser, je te l'accorde. Tout va bien ? s'inquiète-t-elle.
— Ça pourrait aller mieux. Viens, on s'éloigne, j'ai pas envie d'être dans les parages quand elles sortiront.
— T'as raison, évitons une nouvelle embrouille. J'ai pas très envie que tu sois renvoyée de cette fac, tu sais que je ne tiendrai pas sans toi.
Une pointe d'inquiétude passe dans son regard et soucieuse de la rassurer, je la serre dans mes bras pour l'apaiser. Elle se détend et m'étreint à son tour. Je sais que mon côté impulsif la préoccupe. Je ne veux pas lui causer de tort, elle compte tellement pour moi.
Soudain, je remarque que David est manquant.
— Il est passé où ?
— Qui ça ? répond-elle, faussement étonnée.
— À ton avis ? Ton prince charmant, évidemment !
— Eh, arrête avec ça ! Il a croisé des amis, il nous rejoint directement à la cafét.
Je lève un sourcil, d'un air inquisiteur, en lui demandant :
— Je croyais que David n'avait pas d'amis, à part nous.
— C'est ce que je pensais aussi, mais apparemment, il les a rencontrés lors de travaux pratiques.
Mon amie joue avec une mèche de cheveux, signe qu'elle est anxieuse.
— Il est parti avec des filles, c'est ça ? tenté-je de comprendre.
— Non, enfin oui. Il y avait deux garçons et une fille, mais il ne m'avait jamais parlé d'elle avant. Je sais que c'est débile d'être jalouse, surtout qu'on n'est pas en couple. Je n'arrive pas à m'empêcher de ressentir une légère appréhension.
Je lui prends la main pour la rassurer.
— Écoute, David a l'air d'un type réglo, je suis sûre qu'il ne te cache rien. Viens, on va déjeuner, t'en profiteras pour lui poser toutes les questions qui te taraudent l'esprit.
— J'ai peur des réponses. Imagine s'il s'est rapproché de cette fille et qu'il joue un double jeu avec moi ? Je ne le supporterais pas...
— Si ça arrive, compte sur moi pour l'attendre dans une ruelle sombre. Un accident est si vite arrivé, réponds-je avec humour, pour détendre l'atmosphère.
— T'es vraiment bête quand même, éclate-t-elle de rire. Merci, tu sais toujours me réconforter.
Je suis contente qu'elle retrouve sa joie.
— Ma coiffure est parfaite, hein ?
Elle a noué un tissu rouge à la nuque qui passe sur ses cheveux. Elle a agrémenté son look d'un trait d'eye-liner épais et étiré, au-dessus du coin extérieur de l'œil. Elle a vraiment un style pin-up trop craquant. Elle dégage une confiance qu'elle n'avait pas auparavant et ça me rend extrêmement heureuse.
— Maintenant, c'est parfait, réponds-je, en coinçant une mèche de ses cheveux dans son headband.
En souriant, elle prend ma main pour se diriger vers le réfectoire. Le couloir est spacieux, avec de larges fenêtres. Les nombreux néons au plafond et les murs bleu ciel rendent le lieu chaleureux. De confortables banquettes murales beiges permettent de se relaxer sans gêner le passage. Ceci permet de discuter et de se reposer, sans déranger ceux qui travaillent à proximité. Les murs sont recouverts de dessins, photos et affiches de préventions.
Du coin de l'œil, une forme violette attire mon attention. En me tournant, je vois Molly et sa plante verte sortir des toilettes. Je ne peux m'empêcher de pousser un juron quand je constate qu'elles se dirigent vers nous. Ne va-t-elle jamais me lâcher ?
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Promis, cette fois je t'envoie en prison !
Romance✨ Gagnant des Wattys 2023 ! 🏆 Lorsqu'un terrible drame se produit, une seule obsession subsiste : la vengeance. *** Emma, étudiante en faculté de droit, est une véritable détective dans l'âme. Depuis son enfance, elle est passionnée par les enquête...