Promis, cette fois je t'envoie en prison !

Chapitre 41

Dans la voiture, je conduis comme un automate. Mes membres agissent d'eux-mêmes : embrayer, passer les vitesses, mettre le clignotant, tourner le volant. Mais, dans mon esprit, c'est un chamboulement total. Mon cœur cogne comme si j'avais couru un marathon et une tempête de neige semble s'abattre devant mes yeux, tant j'ai du mal à discerner l'environnement. Malgré la douleur horrible qui envahit ma tête, je m'efforce de tenir pour aller chez la seule personne qui sera en mesure de m'apporter du réconfort : Élodie.

Arrivée en bas de chez elle, je me hisse péniblement hors du véhicule. N'étant pas prévenue de ma venue, je prie pour qu'elle soit chez elle. Je tape le code d'ouverture et monte péniblement les escaliers car une fatigue incommensurable m'étreint.

Les minutes semblent des siècles, comme si le temps s'était arrêté. Épuisée, je me laisse glisser à terre, au moment même où la porte s'ouvre pour laisser entrevoir Élodie.

— Emma ! s'écrie-t-elle, en se précipitant à mon secours. Qu'est-ce qui se passe ?

J'ouvre grand mes bras, heureuse de sentir sa chaleur apaisante, mais je suis incapable de prononcer un seul mot.

— Viens, entrons.

Élodie passe un bras autour de ma taille pour m'aider à me relever et me fait asseoir sur son canapé. Je m'y laisse tomber, totalement abattue.

— Tu veux boire quelque chose ?

J'acquiesce de la tête, sans répondre, les yeux rivés au sol.

— David, tu peux m'amener un verre d'eau, s'il te plaît ?

Je n'avais pas remarqué la présence du garçon. Il s'approche, avec un sourire réconfortant, et me tend le verre. Au moment de l'attraper, il m'échappe des mains et se brise par terre, s'éparpillant en éclats.

— Laisse, tu vas te couper ! m'intime mon amie, au moment où je m'apprête à ramasser les morceaux.

Trop tard, un fragment pénètre sous ma peau, dessinant une ligne rougeâtre dans ma paume. Je fixe le sang qui s'écoule de l'entaille avant de s'écraser en gouttelettes sur le sol. Tremblante, je ne peux détacher mon regard de cette scène qui m'évoque les derniers instants de mon frère. A-t-il terriblement souffert ? A-t-il regardé son sang s'écouler abondamment avant de perdre connaissance ? Tant de questions restées sans réponses qui me mettent dans un état second.

— Tu t'es coupée ! Montre-moi, je vais te soigner ! me dit Élodie, en attrapant ma main.

— Non, ne me touche pas !

Dévorée par mes émotions, je repousse brutalement mon amie, qui trébuche. David se précipite auprès d'elle. Ils me regardent, figés par la stupeur.

— Que personne ne me touche ! hurlé-je, sans pouvoir me contrôler. Je ne sais plus qui vous êtes réellement, je ne peux plus vous faire confiance !

Je me relève, les jambes flageolantes et, prise de vertiges, je m'appuie contre le mur. Élodie s'approche pour m'aider, mais je la repousse de ma main. Je ferme les yeux en respirant bruyamment, totalement sous l'emprise d'un tournis dévastateur. Puis-je croire les gens que j'aime ? Qu'est-ce qui me prouve qu'Élodie ou David n'ont pas participé au meurtre de mon frère ? J'ai si peur de subir une nouvelle trahison. Je n'ai plus envie de mentir à mes proches. J'aimerais tellement remonter le temps et revivre cette période d'insouciance avec Aron, celle où je souriais à la vie sans me poser de questions. Pourquoi suis-je devenue cette personne menteuse et manipulatrice ? Mon but était de me venger, mais à quel prix ? Je n'ai plus le courage de me battre. Je veux simplement m'endormir et ne plus me réveiller, si ce n'est dans les bras de mon frère.