L'Enfer est un Paradis, TOME 2 : La Rage des Vertiges

Chapitre 12

Sans surprise, la proposition des Onze Anciens est votée, et validée à la grande majorité. Les contestataires sont les premiers à quitter les lieux, hurlant haut et fort qu'ils ne renonceront pas au berceau de leur race.

-        Ce fut plutôt rapide, constate Ismaël en observant les premiers départs.

-        Rien de bien inattendu, soupire Daegan en s'enfonçant dans son fauteuil. Les cent quatorze gouvernements Humains avaient toutes les raisons d'accepter cet accord. Et les espèces en passe de disparaître sont tout aussi enclines aux changements. Les Nymphes et les Centaures, à eux deux, représentent plus de quatre cents loges. Les Fées, les Alfes, les Archimages, les Dragons et les Sirènes se sont raccordés aux souhaits de leur souverain. Cinq cent trente-quatre votes en faveur du projet, qui, ajoutés aux choix des Anges et des Démons, ayant respectivement deux loges, des Banshees, une loge, et des Oracles, dix loges, les portent à cinq cent quarante-neuf, soit huit votes au-dessus de la majorité.

-        Cela va provoquer quelques agitations auprès de certains cercles, note Alassane d'un ton pensif.

-        Comment vont faire les Vampires, sans le sang des Humains ? demandé-je, prenant subitement compte des grandes modifications que pareil choix comprend.

-        Comme pour tout, nous allons nous adapter, répond Stanislas en s'éjectant de son siège. Le sang animal est moins riche, mais nous allons devoir nous contenter de cela, à défaut de nos proies habituelles...

Sachant pertinemment que nombre de leurs donneurs seraient prêts à vendre mère et enfant pour suivre leurs Vampires adorés, je ne me fais pas tant de soucis pour eux.

-        Ceux qui ont le plus à perdre vont faire blocus, intervient Isaac. Les Nécromanciens, les Gobelins, les Banshees, les Ogres et les Minotaures vont abandonner de précieux marchés en quittant le monde des Hommes.

-        Les Onze proposent de prendre les plus démunis à leur charge, l'informe Ceylan en haussant les épaules. Tu le saurais si tu avais écouté.

-        Pas la peine, je sais que je suivrais mon maître, réplique avec humeur le Djinn de l'eau. Mais ceux que je viens de nommer ne font clairement pas partie des classes sociales nécessitant la moindre aide.

Les deux Djinns se disputent alors que je me détourne des loges. Bien évidemment, maintenant que je fais bel et bien partie des Créatures, il me faudra partir aussi. Par tout le chemin que j'ai remonté, cette annonce semble être l'une des moins impactante sur le court terme. Mais sur le long terme...

-        Dans tous les cas, nous sommes en charge des protestataires maintenant, souffle Ismaël en s'étirant. Ça ne va pas être une affaire facile à mener, même si nous n'avons pas le choix.

-        Non, en effet. Nous allons devoir réfléchir aux groupes que nous allons envoyer, car je ne pourrais être partout en même temps, déclare Daegan en quittant lui aussi son siège.

Alassane ouvre la porte de la loge, et nous en sortons tous les uns après les autres, tandis qu'Ismaël et Daegan poursuivent leur discussion entre eux. Alors que nous remontons le couloir menant à l'escalier, Caleb nous rejoint, le pas hâtif.

-        Je ne le savais pas, Daegan, l'informe-t-il brusquement. J'ignorais que mon père était...

-        Je te crois, Caleb, le rassure Daegan en balayant l'air de la main. Il ne sert à rien d'en discuter. Cependant, intercepte Azalin, car lui était visiblement au courant de tout. Qu'il ne m'en ait pas parlé est une trahison en soi.

-        Bien, sir.

Le Dragon exécute un salut militaire avant de nous quitter tout aussi rapidement. Nous reprenons notre marche jusqu'aux quarante Arcades Dimensionnelles disponibles à l'extérieur. Il faut au moins cela pour permettre au Cicérone d'aller et venir en limitant les embouteillages. Malgré cette quantité étonnante de passage, nous sommes encore bien nombreux à sortir et à attendre qu'une place se libère. Ismaël nous laisse pour aller se renseigner, et nous patientons, profitant du soleil de la Nouvelle-Zélande. J'observe le paysage, et reste un moment à contempler les montagnes enneigées au loin, et les lacs se profilant à l'horizon. La beauté des lieux est sans doute responsable de mon inattention, qui me fait manquer l'approche du roi Alfe. Pour autant, lorsqu'il se porte à notre hauteur, je ne peux qu'être écrasée par sa puissance.