Chapitre 28

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Lorsque le vent vient me tirer de mon sommeil, en frappant fort contre le faible vitrage de la chambre, j'entrouvre un œil, mécontente, avant de m'enfoncer davantage contre la masse chaude se tenant tout contre moi. Une couverture d'une douceur sans pareil vient suivre mon mouvement, glissant sur mon épaule dans une caresse paresseuse. Je laisse échapper un soupir de contentement, bien décidée à replonger dans les bras de Morphée.

Il me faut un moment, malgré mes très bons entraînements, pour comprendre que rien de tout cela n'est normal. Rouvrant les paupières, dorénavant sur le qui-vive, je rencontre tout d'abord mon nouvel environnement, et je m'accorde une bonne minute pour me souvenir d'où je me trouve. Toujours à la Citadelle des Alfes Sombres. Et la masse chaude contre laquelle je suis... n'est pas n'importe qui. Relevant la tête, je plonge mes yeux dans les prunelles, aujourd'hui rehaussées d'or, de Daegan, qui m'observe, paisiblement. Quant à la couverture...

-        Elles sont toujours là.

Mon murmure est rauque, et ma mémoire cesse de me faire défaut lorsque les souvenirs de la nuit dernière se rappellent à moi. Si ma voix est aussi fatiguée, le responsable se trouve juste devant moi. Ou, plutôt, contre moi. Et lorsque ses doigts longent l'arc de mon aile droite, celle-ci frémit, alors que des élans délicieusement douloureux se font sentir au niveau de mon bas-ventre.

-        Pensais-tu qu'elles disparaîtraient dans la nuit ? me demande Daegan en souriant légèrement.

Je me redresse, me rends compte que je suis toujours nue, mais décide de continuer à m'en moquer, et reste à califourchon sur ses jambes. Après tout, Daegan a pu largement profiter de la vue tout en m'offrant... non pas trois, mais cinq orgasmes dans la nuit. Un record pour moi, mais certainement pas pour lui. Lui qui n'a fait, par la suite que toucher mes plumes, sans s'approcher davantage de mon corps.

De la part d'un autre être, j'aurais pu poser des questions. Mais pas lorsque cela concerne Daegan. S'il n'a pas tenté quoique ce soit de plus, c'est bien pour une bonne raison. La Chimère... ou son désintérêt pour la chose. De ça, je ne peux pas vraiment l'en blâmer. Après tout, lorsqu'on a son âge, les excitations ne sont plus qu'un vague souvenir, et l'ennui a remplacé le tout. Pour autant, je sais que son corps avait envie. Et je me souviens de son regard brûlant, nullement désintéressé quand il me regardait endurer la petite mort sans me plaindre.

-        Je ne sais pas, reconnais-je en observant mes ailes par-dessus mon épaule. Après tout, Ismaël ne les a pas toujours, lui.

À la mention du Djinn, je constate combien sa place demeure presque éteinte dans nos esprits. Comme pour me protéger des pensées m'envahissant alors, mes ailes se resserrent autour de moi, et créent un écrin de plumes autour de nous, nous coupant du reste du monde. Seulement en apparence, bien sûr, mais cela est déjà... incroyablement intimiste.

-        Tes pensées sont bruyantes, Satine.

Mon nom dans sa bouche résonne étrangement maintenant que je connais la saveur de ses lèvres. Il me semble rougir légèrement, alors que ses mains enrobent mes cuisses dans un geste presque trop tendre pour lui.

-        Je ne peux pas vraiment faire autrement, me dédouané-je en tentant de sortir du lit.

Bien évidemment, Daegan ne me laisse pas fuir et raffermit sa prise, me prouvant que ses gestes précédents n'étaient pas totalement anodins. Il savait que je voudrais m'écarter de lui, et, pour une raison m'échappant encore, il me souhaite à ses côtés.

-        Tes élans de culpabilités n'ont pas de raison d'être, m'assure-t-il en lisant en moi comme dans un livre ouvert.

Forcément, je lui ris au nez, et mes plumes s'ébrouent sous le coup de ma frustration.

L'Enfer est un Paradis, TOME 2 : La Rage des VertigesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant