Prologue

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Mes doigts font des allers-retours sur la surface en bois. C'est assez lisse, ce qui me permet de me concentrer sur de nouvelles pensées. J'ai vite fini par arrêter de gigoter sur mon siège après que l'on m'ait fait la remarque que c'était on ne peut plus dérangeant.

Toutes ces personnes rassemblées, devant moi, font monter une pointe de stress dans chacune de mes cellules. Je ne m'attendais pas à un tel acharnement social et médiatique. Santa Valeria a toujours été valorisé pour être une ville plutôt calme. On est en train de démontrer qu'entre calme et agitation, il suffit juste d'ouvrir une porte. La mauvaise, en particulier.

— Mademoiselle Fox, avez-vous entendu la question ? Que s'est-il passé ensuite ? Vous parliez devant l'entrée de la cabane mais après quoi ?

Ma tête se redresse à l'entente de mon nom. Le juge fronce les sourcils, dans ma direction, devant mon manque de réponse. Ce n'est pas de ma faute si j'ai un trou de mémoire.

— Je ne me souviens plus.

— Ah oui ? Encore une fois, vous voulez nous faire croire à une perte de mémoire.

— C'est la pure vérité cette fois. On parlait et ensuite cela devient flou.

— Pourtant vous disiez il y a peu ne pas avoir vu Cassidy ce soir-là. Puis vous avez changé de version en disant ne pas vous souvenir du tout de cette soirée. Pourriez-vous enfin commencer à nous donner des faits véridiques, que vous n'allez pas contester demain matin ?

Il se rapproche de mon pupitre, posant avec force ses mains près des miennes. Je reste pétrifiée par le poids des accusations. Je n'essaie même plus d'arranger mon cas. Des preuves ont été portées à l'affaire, j'en ai vaguement entendu parler. Ils n'essaient plus de démêler le vrai du faux, ils essaient de nous faire cracher la vérité à tour de rôle.

— Objection votre honneur. Ma cliente a réellement, tout comme les trois autres à côté, été victime de la perte d'une partie de sa mémoire. Cela a été prouvé et rempli dans le dossier de l'affaire.

— Objection retenue. Maître Armeli, veuillez reculer.

Malgré moi, l'avocat de la famille Davis perçoit mon sourire provocateur. Depuis le temps qu'il tente de me coincer à travers des coups de pression. Qu'il se fasse réprimander ne peut que me satisfaire.

— Après vos premières dépositions, l'un d'entre vous est pourtant revenu sur les faits. Selon cette personne, vous seriez la commanditaire. Après tout, la victime et vous-même étiez en froid, non ?

Mes yeux s'arrondissent. Quelqu'un a cafté ? Seuls nous savions qu'entre Cassidy et moi c'était un terrain miné. Je ne comprends pas, on avait convenu de ne rien dire. Ils ont développé un moyen de pistage informatique plus performant que l'ancien ? Si ça se trouve, l'école est infestée de caméras et ils ont juste eu besoin de voir les bandes vidéos. Encore pire, la police a eu accès à des informations grâce à notre code barre génétique.

Mes yeux plongent instantanément vers mes amis à quelques mètres. Ils semblent tous dans le même état second que moi. Si je tombe, ils tomberont avec moi, donc ça ne peut pas être possible. Soit cet avocat ment de manière naturelle et donc il est plus que bon, soit l'un d'eux me prend pour une imbécile depuis le début de cette histoire. Dans les deux cas, ça ne me plaît pas. Coup de bluff ou non, je ne peux prendre le risque de ne pas y croire un peu.

J'attache mes cheveux en une queue de cheval basse. Fini de me cacher derrière mes mèches rebelles. J'étais censée passer un entretien important pour entrer dans la marine, pas être jugée. Aucune chance qu'on vienne me donner un poste si mon nouveau domicile est en cellule. Encore une fois, je vais devoir user de mes capacités pour nous dépêtrer des sables mouvants.

Pourquoi m'avez-vous enterré ? (en correction)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant