Quarante

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Casey a filé pendant la nuit. C'était mieux que d'expliquer pourquoi un garçon, l'un des jumeaux qui plus est, se retrouve à prendre son petit déjeuner chez nous. Je m'étais endormie mais j'ai bien vu le message qu'il m'a laissé sur un post-it ce matin. Comment ne pas s'en rendre compte ? Mes yeux ont louché vers mon front dès qu'ils ont compris qu'un objet non identifié avait été collé au-dessus de mes sourcils.

Assise dans la voiture, je m'échappe dans mes pensées au rythme que le paysage défile. Je nous revois encore glisser des oreillers entre le mur et le lit pour éviter de faire du bruit.

— Ornella, on est arrivé. Je reviens te chercher en début d'après-midi comme prévu. Et tiens-toi tranquille. Ce n'est surtout pas le moment d'envoyer en l'air ta seconde chance alors que tu en touche le bout.

— Oui, oui.

Je contourne la voiture par derrière. Je vérifie que j'ai bien tout le nécessaire dans mon sac. C'est à dire mon téléphone et ma convocation. J'ai déjà en tête de parcourir le chemin menant à la grille mais le bruit de la vitre qui se baisse, me préviens que ma mère n'a pas quitté sa place de parking.

— Tu as oublié de me dire quelque chose ?

— Non, je ne te surveille pas Ornella. J'allais juste regarder qu'aucune voiture ne venait derrière.

Mais bien sûre. Elle attend surtout que j'arrive à hauteur de ma tutrice du jour. Comme si j'allais envisager de filer à l'anglaise. Ma peine arrive son terme. Je suis assez grande pour savoir quand ne pas dépasser certaines limites. En l'occurrence, ce midi je vais attendre de voir ce que l'on me propose et le faire que j'ai envie ou non.

J'assume mes récentes bêtises et je suppose que ces heures de travaux d'intérêts généraux doivent avoir un effet bénéfique. Autre que m'éviter le tour en prison. Le juge a quand même préféré me faire terminer par ce lieu précisément. Cherchons l'ironie. Après une petite vingtaine d'heures, je vais pouvoir commencer les dernières.

Le portail du bâtiment pénitencier pour jeunes adolescents est fermé. Cependant, une femme se tient devant. Ma main à couper qu'elle va m'affirmer être ma tutrice.

Je sors de mon sac ma convocation, à l'aide d'un petit boîtier elle scan mon code. Une photo de moi s'affiche sur son écran, attestant de mon identité.

— Tu sais pourquoi tu es ici ?

— J'ai fait une balade dans la rue.

Son regard se fait intimidant. Si on ne peut plus faire de petites vannes entre nous... À ce que je sache, on peut se détendre dans la vie.

— Une balade qui t'as coûté vingt-huit heures de travail dans ta ville si je me souviens bien. Alors je ne pense pas que ce soit une simple balade entre jeunes.

C'est parce que je n'ai pas eu le temps d'avancer les détails de ce fameux événement. De plus, on parle tout en marchant. On dirait qu'on est pressé. Il faut me laisser un peu de temps pour reprendre mon souffle.

— Un ami a volé des clés qui trainait, elle arque le sourcil, je suis persuadée qu'elle est au courant de tout, non qui était sur le contact de l'une des voitures d'entretiens. Fiou, j'ai eu un petit trou de mémoire on dirait ahah.

Je suis vraiment en train de faire une blague ?

— Et cette brillante idée te ramène ici. Bien joué. Bon je te laisse te changer dans ces vestiaires. La blouse et la charlotte sont posées sur un banc, les chaussures adaptées sont en dessous et on trouvera une place pour ton sac.

J'opine de la tête. Comme elle l'a précisé, l'uniforme dont j'aurai besoin est présent. Je vérifie que la salle des vestiaires est vide. Grand bien pour moi, je suis venu avec un élastique pour mes cheveux.

La vérité complète sur ma venue était drôle sur le coup mais maintenant que je connais la finalité, je me demande si je n'aurai pas mieux fait de rentrer chez moi ce jour-là. Je range mon jean dans mon sac.

J'avais passé l'après-midi avec des élèves de l'école. On s'était retrouvé à la plage et tout allait pour le mieux. Le temps était au beau fixe en plus. Sur le chemin du retour, on bordait encore le chemin de la plage, il y avait cet engin de nettoyage.

Personnellement, je n'y avais pas fait plus gaffe que ça. Je m'amusais à faire taper le bout de mes claquettes contre le trottoir à chacun de mes pas. Sauf qu'une des filles a remarqué que les clés avaient été laissé. Le propriétaire devait être entré dans le bar en face. Quoi qu'il en fût, il n'a pas fallu plus d'une minute pour qu'on monte tous dedans, qu'on mette le contact et qu'on parte déambuler dans les rues. Une petite bande de jeunes qui n'ont pas le permis, en pleine vacances, alors que les rues sont loin d'être vidées des touristes et des familles qui partent vers la plage ou en reviennent. Le moins qu'on puisse dire c'est que la voiture de police qui nous a fait descendre avant même que l'on fasse un tour complet du quartier, n'a pas cherché à savoir qui a fait quoi. On a tous fini au poste, attendant que nos tuteurs légaux arrivent pour nous monter les oreilles dans les nuages.

— Ne pense pas prendre dix ans pour te changer. Le service ne va pas tarder à débuter.

— Encore trois minutes, je suis sur la fin.

— Je t'en laisse deux.

Les chaussures qui sont mises à disposition me rappellent celles que j'ai dû porter avant.

Le juge qui s'est occupé de nous a dit qu'on avait eu de la chance de ne faire aucun blessé. Ce n'est pas pour autant que je l'ai trouvé plus clément.

On n'a été placé chacun dans des structures différentes. Que voulez-vous, on n'est pas là pour s'amuser de toute façon. J'ai été celle qui a dû contribuer au nettoyage des rues pour la société dont nous avions emprunté temporairement le véhicule. Cela m'a duré une partie des vacances puis après la rentrée j'ai fait quelques heures durant les weekends, par-ci par-là.

Je finis par aider bénévolement, obligatoirement on ne nous paye pas, le personnel de la prison pour mineur. Sûrement un message caché pour me montrer à quoi j'échappe. Ils sont malins, mais tout de même, j'ai compris ce qu'ils voulaient faire.

Pourquoi m'avez-vous enterré ? (en correction)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant