Douze

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C'était inévitable. Cependant, je n'avais pas envisagé que l'on se croiserai si rapidement. Il doit être arrivé depuis seulement quelques minutes et le voilà déjà à quelques mètres de moi. Si l'envie d'être proche d'autres êtres humains te démange, il y en a toute une brochette sur la pelouse. Pour rappel, ce sont tes voisins au même titre que les miens.

— Je peux savoir qui t'as permis d'approcher de mon périmètre vital ?

Grand sourire goguenard, il se désigne du doigt. Sur ce point-là, Casey et lui sont les mêmes. Chaque seconde de leur vie doit se produire dans l'humour.

Je lui conseil de repartir d'où il vient, que je suis occupée. De retour face à la glace, je vérifie que ma coiffure tient bien le coup. J'aurai dû faire mon vernis aussi. Ce n'est pas comme si on m'en avait laissé le temps, je ne compte pas jeter la pierre sur moi. La fautive doit se dandiner le popotin d'invité en invité.

Mon voisin s'approche de la chaise où je suis installée. Un petit problème d'écoute à ce que je vois. Aux dernières nouvelles, tu n'as pas de soucis de santé. Tu pourrais faire un peu semblant de porter attention et agir en fonction de ce que je dis.

Sa main qui vient se poser sur mon épaule est inconfortable. Ce n'est pas sa place c'est certain. J'y donne un coup de brosse pour qu'il l'enlève.

— Oh arrête, rien ne nous a jamais empêché de remettre ça plusieurs fois.

— Il faut croire que ça n'avait aucune chance d'aboutir. De toute manière, je ne suis plus libre à présent, alors t'es gentil tu gardes tes mains près de ton corps.

Je le menace à l'autre bout de la fameuse brosse. Je ne plaisante pas.

Ulys est un garçon au visage neutre si je puis le dire ainsi. Il ne laisse paraître que très peu d'émotions. J'ai toujours eu besoin d'analyser les plus petits détails afin de le déchiffrer lui. C'est une des causes de notre rupture. Je ne peux pas passer ma vie avec un livre de hiéroglyphes. Maintes fois, j'ai pu lui faire la remarque. Ses pseudo résolutions n'auront fait que retarder l'échéance.

— Tu n'es pas censé avoir des vues sur Cassidy ?

Il se jette sur mon lit. Je t'en prie. Fais comme chez toi. Ce n'est pas comme si les locaux t'étaient inconnus. Autant ne pas faire de remarque. Il se donnerait à coeur joie pour me répondre une bêtise.

— C'est ce qu'elle t'a dit ? Elle est mignonne c'est clair, mais ça s'arrête là. J'ai proposé cette sortie pour t'embêter. Possessive sur les bords et les rebords n'est-ce pas ?! Tu n'as cas prendre sa place.

— Je ne frôlerai pas l'infidélité et cela même si c'est toi.

— Ton copain, il est au courant qu'on s'inscrit dans la Navy ensemble ? Ça serait bête qu'il l'apprenne trop tard. On ne sait jamais ce qui peux se passer sous un bon coup d'adrénaline.

— Ne fait pas ce genre de sous-entendu fouareux, ça ne te réussit pas.

— Je te connais. Si tu changes de sujet, c'est qu'en conclusion personne n'est au courant. Les entretiens sont dans moins deux mois, à ta place je ne trainerai pas.

— Ne me dis pas ce que je dois faire.

— Tes parents méritent de savoir ce que tu décides. De toute manière, il faudra bien que quelqu'un soit ta réserve financière pendant ne serait-ce que les premiers temps.

— J'ai compris. J'ai justement deux mois pour leur faire savoir. Maintenant, on arrête d'en parler. Et descends de mon lit, tu vas y laisser des traces.

Mon téléphone sonne. La photo d'un bébé tout nu avec une couche sur la tête apparaît. Casey. L'envie de le renommer d'un coeur m'a souvent percuté l'esprit, mais si quelqu'un s'en aperçoit ça pourrait certainement éveiller des soupçons. Les dernières minutes vécues dans cette chambre, partent en fumée. Elles font place à une sensation de légèreté que seul Casey arrive à m'offrir.

J'attrape Ulys par les bras et le vire sans ménagement de la pièce. Là au moins, tu enlèves ta masse de mon matelas. Je profite de son étonnement pour lui refermer la porte au nez.

Enfin un peu de calme. Maintenant à nous deux. J'accepte l'appel avant que la dernière sonnerie ne se fasse entendre. J'attendais vraiment cette conversation. Je ne voulais juste pas faire le premier pas étant donné que de mon point de vue, je ne suis pas celle qui a fauté. En plus de son erreur, il a tartiné encore et encore sans se dire une seule fois qu'il fallait tout simplement qu'il s'arrête.

— Salut toi.

— Tu décides enfin de me donner signe de vie. Ce n'est pas trop tôt. Tu

Je raccroche dans la foulée, excédée. Une seconde pour décoller, une seconde pour retomber. Si je réponds à ton appel c'est que j'en ai envie. Mauvaise idée de m'envoyer des critiques dès le début de notre échange. C'est tendre le bâton pour se faire battre. Moi qui pensais bêtement que ces dernières heures l'avaient fait réfléchir. La bonne blague. Il maronnait dans son coin en attendant le bon moment.

Je le rappellerai plus tard.

On ne s'est ni revu, ni reparlé depuis jeudi midi. N'ayant pas les mêmes cours, tout simplement car nous ne sommes pas dans la même classe, nous n'avons pas pu nous voir. Les filles et moi avons passé la quasi-totalité de la journée ensemble.

Honnêtement, j'avoue être un brin rancunière. Une chose, qu'elle soit positive ou négative, me reste en tête pendant des jours et des jours. Je peux passer au-dessus au bout d'un certain temps mais je n'oublie pas.

Malgré ça, le besoin de l'avoir près de moi s'est intensifié durant la journée de vendredi. On avait pris l'habitude de se côtoyer tous les jours pendant l'été. La reprise des cours est bien trop récente. J'ai un peu de mal à m'acclimater.

En sortant de la chambre, je découvre avec surprise que mon très cher voisin m'attend toujours à la même position. Je rêve. De sa part, c'est assez inattendu qu'il ait patienté là sans broncher. Le voir ainsi me fait esquisser un sourire.

Mon téléphone vibre à nouveau dans ma main. Mon copain réitère son appel. Je lui donne une chance de réfléchir un peu, nous parlerons et mettrons les choses à plat tout à l'heure. Je lance l'objet sur mon matelas avant de refermer la porte.

Pourquoi m'avez-vous enterré ? (en correction)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant