Quatorze

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En rentrant, je revois le même groupe de voisins près de la table. Je ne sais pas exactement ce qu'ils peuvent bien se dire mais l'ambiance y est joyeuse. À présent, ils ont troqué leur boisson pour des assiettes de burger. Ils ont bien raison. Vu la quantité qui a été acheté pour aujourd'hui, il serait préférable que la majeure partie finisse dans nos ventres avant ce soir.

Mon copain salut certains des voisins présents qu'il reconnaît. Quelques-uns logent près de chez lui. Au moins, aucun problème niveau sociabilité. Je ne le laisse pas se jeter dans la fosse aux lions. Et puis, même s'il n'avait personne à qui parler, moi je suis là et je ne l'abandonne pas.

On traverse le salon puis la cuisine, c'est un espace ouvert, jusqu'au jardin. Ma mère a déserté l'endroit. Elle doit très certainement être aux côtés de mon père.

— Ella ramène toi, ils vont commencer la prochaine manche sans toi. Ehhh mais ne serait-ce pas un Davis que je vois là. Pourquoi tu ne m'as pas prévenue que tu venais, on serait arrivé ensemble.

Notre tranquillité est brisée par une tornade humaine. Ulys débarque face à nous à peine nous posons le pied dehors. Automatiquement on se lâche les mains. J'étais si bien, je ressentais sa chaleur et lui la mienne juste à travers ce simple contact. À tel point, que nous ne nous étions pas encore séparés. Toute bonne chose a une fin après tout. Casey et moi, c'est et ça reste une bonne chose.

— En réalité ce n'était pas prévu et je ne dis pas non à de la nourriture gratuite.

Ils se frappent les poings en signe de salutation.

— Je passe mon tour, tu n'a qu'à prendre ma place. Je vais aller manger un bout. La faim diminue mon talent.

Loin de soupçonner que mon copain dont je parlais tantôt n'est autre que son ami, le garçon à côté de moi, Ulys repart en sens inverse.

— Depuis quand vous vous reparlez au juste ? Aux dernières nouvelles, il y avait bien plus d'animosité entre vous qu'il n'y en avait jamais eu.

— Maintenant. Je crois. Tu le connais, la vie à ses yeux ne va que dans un sens. Le sien en l'occurrence, j'hausse les épaules.

Ce serait loin, mais alors très loin, d'être raisonnable de lui dire qu'il fait des tentatives vers sa soeur ou bien moi, pas plus tard qu'hier et ce midi.

— C'est suspect de sa part qu'il se mette à te tourner autour, il a toujours une idée derrière la tête. Fais juste gaffe à toi. Mais on ne se préoccupe pas de quelle nouvelle façon de t'embêter il a pu trouver, c'est ma copine que je suis venue voir.

Les mots de mon ancien copain viennent vibrer dans ma tête. Dire à Casey que nous avons pris la décision de rentrer dans la marine ensemble est l'opposé d'une bonne idée. Même moi j'aurai du mal à l'encaisser. Ils sont peut-être ami, cela n'enlève en rien le fait qu'avant lui, c'est avec Ulys que j'étais. Ce serait donc bizarre et mal vue.

Mais au jour d'aujourd'hui, je ne ressens plus les mêmes sentiments pour ce garçon agité. Une croix a fait apparition sur ce que l'on a pu être. La Navy en revanche, me broie le cerveau tous les jours tant j'ai hâte de pouvoir commencer. Alors malgré les circonstances, je ne peux pas abandonner ce nouveau rêve. Jamais. Pour personne.

— Tout à fait. Mon petit doigt me dit qu'elle a aussi très faim et qu'une table pas loin regorge de nourriture.

— J'oublie que ma copine a un appétit d'ogre et par conséquent peut manger pour dix.

Je feins d'être consternée par ses propos en plaçant ma main droite sur ma poitrine. Quelles accusations terribles et infondées !

Ne pouvant nous adonner à une quelconque marque d'affection trop visible, je me contente de l'effleurer en faisant mine de chercher une assiette parmi la pile sur la table. J'y pose un burger à la viande ainsi qu'un végétarien à la pomme de terre.

— Je ne comprendrai jamais que tu puisses manger cette contrefaçon.

— Ce ne sont que des patates. C'est tout aussi bon que le morceau de vache dans nos assiettes.

— Justement. Tu pourrais te contenter de celui-là non ?

— Non. Les deux sont très bons. En plus, on ne tue pas d'animaux.

On n'est pas forcément dans l'obligation de manger chacun des plats avec de la viande ou du poisson. Il y a des repas produits à base de légumes seulement, qui peuvent être très bon pour la santé. Il suffit juste d'apporter toutes les protéines, en compensant celles qu'apporte la viande en temps normal.

Et puis, on peut très bien le faire de temps en temps. Pas tous les jours mais une fois ou deux dans la semaine. Ce qui ne nous tue pas, nous rends plus fort. Ce steak ou croquette de pomme de terre, allez savoir son véritable nom, me plaît bien en l'occurrence.

— Dans ton cas, tu manges une vache et une patate. Ce n'est pas de toute logique.

— J'ai simplement encore un peu de mal à choisir.

— Dis surtout que c'est un moyen de t'empiffrer un peu plus. Donne un bout, on va voir si ça vaut tant le coup que tu le prétends.

Il s'approche face à mon visage et ouvre la bouche. Tout me paraît soudainement plus lent. La musique en fond, les bribes de conversations aux alentours, l'oiseau qui passe au-dessus de nos têtes, lui. Le savoir si proche et pourtant si loin.

Venir sceller mes lèvres aux siennes n'est pas l'envie qui me manque, bien au contraire. Je donnerai chère pour qu'une bulle opaque se forme autour de nous. J'en profiterai pour agir comme bon me semble.

— Tu sais quand tu me regarde comme ça, en public qui plus est, je regrette que ma Cassy n'approuve pas encore notre relation.

— Ma meilleure amie peut être difficile dans son jugement. Tu es bien placé pour le savoir.

— Justement, sachant que c'est toi et pas une autre, elle devrait se réjouir au lieu de faire la gamine aigrie.

Dans un sens, il n'a pas tort. Si elle tient autant à nous qu'elle le prétends, ça ne devrait pas la déranger de nous savoir ensemble. Sauf, que je suis fille unique à l'heure actuelle alors je ne connais pas les codes de la fraternité. Ce qui peut me paraître simple, peut en réalité être plus complexe si c'est un rapport avec ton frère ou ta soeur.

Un de ces quatre néanmoins, quand on lui avouera la vérité, une nouvelle décision aura fini de faire débat en moi. Je me ficherai malheureusement de son avis. Elle pourra dire ce qu'elle veut, nous irons au bout de notre relation, cela même si elle persiste à ne pas vouloir accepter et, j'espère que ça n'ira pas jusque-là, se met à nous mettre des bâtons dans les roues. Je vais devoir me résoudre à prendre des décisions radicales pour lesquelles un retour en arrière ne sera pas envisageable.

Pourquoi m'avez-vous enterré ? (en correction)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant