Chapitre 43 - Cole

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Ça faisait un moment que je ne m'étais pas senti comme ça : entièrement impuissant. Cette femme m'avait tout pris. Elle avait abusé de moi pendant de longs mois, m'avait menacé, m'avait fait du chantage, s'en était pris à quelqu'un que j'aimais et... elle s'était simplement pendue à l'un des barreaux de sa cellule pour échapper à la peine qui allait lui tomber dessus.

Quant à moi, j'avais exposé toutes ces hontes, ces traumatismes, pour quoi faire ? Pour rien. Pour n'être que la risée de tout le monde, que l'on me pointe du doigt. J'avais supporté pendant de longues semaines les regards des autres, les critiques acerbes, ainsi que les plaisanteries malsaines. Je pensais que tout ce calvaire porterait ses fruits. Qu'elle finirait derrière les barreaux, que j'aurais cette reconnaissance de la part de la société pour pouvoir aller de l'avant, me reconstruire, tourner la page.

Elle n'avait même pas eu la décence de m'accorder ça. Elle avait préféré s'ôter la vie, plutôt qu'assumer les conséquences de ses actes.

Mon dieu, que je la haïssais ! Si elle n'était pas déjà morte, je crois que je la tuerais moi-même ! Cette femme réveillait en moi le pire des sentiments, des envies. Elle aurait très bien pu se suicider avant de rencontrer mon père, ça m'aurait évité tout un tas de traumatismes.

Graham m'observait, assis à côté de lui, les membres tremblants de rage. Je voulais hurler à m'en péter les cordes vocales. Je désirais avoir cette garce devant moi et... et... J'étais tellement nerveux que j'ignorais même ce que je voudrais lui faire. On parlait d'une dépouille, d'une coquille vide. Si le paradis et l'enfer existaient vraiment, alors j'espérais que cette salope brûlerait dans les flammes de l'enfer pour l'éternité.

La rancœur qui s'emparait de moi me rendait mauvais, à la limite de la violence. Lorsque j'avais annoncé la nouvelle à Olivia, elle avait tenté de me toucher, mais je l'avais repoussée avec hargne. Je ne voulais que personne m'approche. Je désirais simplement me terrer et crever à mon tour. Tout ça, pour en arriver là ? Je n'arrivais pas à y croire. J'avais du mal à réaliser que je n'obtiendrais pas justice, et Ronnie non plus. Ça me tuait de l'intérieur.

Mon cœur cognait tellement fort et j'étais pris dans une telle crise d'angoisse, que j'avais l'impression d'étouffer. Ça faisait un moment que ça ne m'était pas arrivé, mais là, je ne gérais absolument plus rien. Tout échappait à mon contrôle, et cette impuissance me terrassait. Désormais, je serais toujours le mec qui s'était tapé sa belle-mère aux yeux du monde. Cette garce m'avait tout pris, et je ne voyais pas comment j'allais pouvoir me relever d'un coup pareil. C'était beaucoup trop dur.

Mon avocat et moi attendions en salle d'interrogatoire que le procureur vienne nous donner plus de détails. Ça faisait deux heures que nous poirotions. En tout cas, j'allais devoir rembourser le lycée, j'avais saccagé les toilettes. Les blessures sur mes poings en étaient la preuve factice. Je m'étais acharné sur les murs, les portes, j'avais absolument tout cogné pour faire passer ce sentiment abject qui me tiraillait depuis. Je me sentais exactement de la même manière que lorsqu'elle me violait. Et ça me donnait la gerbe. Je ne pouvais pas le supporter.

La porte de la salle s'ouvrit et l'adjoint du procureur entra dans la pièce, le visage fermé. Je ne descellai aucune émotion sur ses traits, sa poker face était redoutable. Mais comme je le savais déjà, toute cette enquête ne rimait plus à rien. C'était ma parole contre celle d'une morte. Il n'y avait plus d'affaire, rien que l'on puisse juger.

Je serrai les mâchoires à l'extrême, me mordant l'intérieur de la joue jusqu'au sang. Ce dernier se déversa dans ma bouche, je l'avalai comme si de rien était. Le goût à sel et à rouille me donna à nouveau envie de cogner, de réduire cet endroit en cendres.

Si Seulement... (Tome 2 de Si Jamais...) ©Où les histoires vivent. Découvrez maintenant