Sauve-moi [ Terminée ]

PARTIE 14 - Le diner.

Elle attrapa sa robe et fila s'enfermer dans la salle de bain. Elle se regarda dans le miroir traçant du doigts les formes de son corps. Elle avait toujours eu confiance en son apparence. Pourtant, le doute commençait à s'insinuer en elle infiltrant chaque pores de sa peau. Ce petit bourrelet au dessus de son soutien gorge avait il toujours été là ? Et la peau de ses bras bougeait-elle toujours autant?

Peut être Richard avait-il raison ? Un petit kilo en moins ne pourrait pas lui faire de mal.

Le moral à zéro, elle enfila sa robe. Les manches lui tombaient jusqu'aux poignets cachant le plus de peaux possible. Pour une fois, elle en remercia intérieurement Richard. Elle ne voulait pas qu'on puisse voir les marques qui parsemaient ses bras.

Une fois habillée, elle se mit en pilote automatique et se laissa guider tout le long du chemin. Son regard vide observait le paysage défiler sans aucun plaisir. Les lumières de la ville n'avaient plus l'effet magique qu'elles avaient eu jusqu'alors.

Elle pouvait sentir le regard de Richard peser sur elle faisant planer sur elle une menace silencieuse. Elle mourrait d'envie d'ouvrir la portière au prochain feu rouge, seulement la menace qui pesait sur ses amies planait au dessus de sa tête telle une épée de Damoclès.

Ni la fraîcheur de la nuit, ni le bruit de la circulation n'avaient plus aucune emprise sur elle. Le temps semblait couler sur elle. Tels les grains de sable d'un sablier invisible glissant sur son corps.

Le restaurant était magnifique, pourtant elle ne semblait plus voir la beauté des choses. Elle s'y était souvent rendue avec Richard pourtant cela n'avait plus la même saveur. Le décor la laissait complétement de marbre.

Et le petit sourire qui ne quittait pas le visage de Richard lui donnait envie de vomir. Son corps suivait le mouvement, tandis que son esprit, lui, était en train de fuir de cet endroit. Pour la seconde fois de la soirée elle se voyait faire volte-face et courir, courir sans s'arrêter ni se retourner.

Pourtant, quand elle revint à elle. Elle était toujours là, Richard tenant sa main au creux de son coude.

Elle se sentait couler, sa raison dérivant lentement dans les profondeurs. Était-ce cela que ressentait une souris prise au piège ? Sa fin inéluctable ? Quand fallait-il arrêter de ce battre ?

Le monde était mal fait et dans ce monde les gens comme Richard gagnait toujours. Il était plus fort, plus puissant et avait trouvé la faiblesse qui la réduirait au silence.

Une part d'elle, infime, pernicieuse, commençait à haïr l'amour qu'elle portait à ses amies. A cause d'elles, elle était muselée telle un chien recalcitrant.

Non ! Elle se refusait à penser cela ne serait-ce qu'une seule seconde. Elle les aimait. Elle les aimait plus que sa vie et plus encore, plus que sa propre liberté.

Elle allait donc jouer à la parfaite petite poupée, comme un jour le lui avait reproché Wade. Un sourire hypocrite par ci, un petite signe de tête par là.

Les collègues de Richard paraissaient tout aussi pédants et imbus d'eux-mêmes que son compagnon. Une bande de culs-serrés qui la dévisageait avec un regard lubrique. Ils ne prenaient même pas la peine de s'en cacher. Un courant de dégoût traversa son corps tandis que leurs yeux parcouraient son corps, clamant des discours qu'elle ne voulait pas entendre.

Ils prirent place autour de la table. Richard l'avait placé entre lui et son horrible mère. Assise sagement entre ses deux bourreaux.

Les gens parlaient autour d'elle dans un brouhaha indistinct. Elle était en train d'arriver à son point de rupture. Son corps refusait de se synchroniser avec son esprit.