14/ Pas de trêve possible

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Céleste accompagne Battista jusqu'à une petite porte sans grande envergure dans un grand mur sans indication particulière sinon une plaque numérotée.

– C'est là ?

– Tu es déçue ? Je le vois bien, dit le garçon en souriant. C'est que le domaine Malatesta ne se révèle pas au premier venu.

– Je vois. Alors tant pis pour moi.

– Mais non ! Tu peux et tu vas entrer ! Marinella a dû préparer un repas d'ogre comme d'habitude ! Je t'invite !

– Je... Je ne voudrais pas déranger, Battista. Tes parents...

– Mon père ne vit pas ici. C'est la maison de Galeazzo.

– Galeazzo, répéta Céleste en ayant un mouvement de recul instinctif.

– Ne t'inquiète pas ! Il ne rentre jamais pour manger à midi. On sera tous les deux ! Je vais te faire visiter ! Je suis sûr que tu vas adorer ! Toi qui aimes les vieux trucs de chevalier ! Tu sais qu'on a même des cachots !

– Des cachots ! Incroyable ! Et ils datent de quand ?

Battista ouvre la porte et fait entrer Céleste à la découverte d'un petit bout du royaume des Malatesta.


La visite a été extraordinaire. Et il y a réellement des cachots dans les soubassements du bâtiment principal. Céleste entre à la suite de Battista dans la cuisine en riant à une anecdote sur un vague ancêtre qui aurait collectionné les femmes comme Barbe-bleue. Mais son rire s'arrête net lorsqu'elle voit qu'ils ne sont pas seuls comme prévu.

– Azzo ! Alors ça ! Tu ne rentres jamais d'habitude ! s'exclame Battista réellement étonné.

– Une fois n'est pas coutume. Mais je vois que tu as de la compagnie.

– J'ai rencontré Céleste qui s'était perdue dans une contrada ennemie ! Alors j'ai préféré la ramener dans le droit chemin...

– Mais pas du tout ! Je n'étais pas perdue !

– Tu veux dire que tu étais dans cette contrada de ton plein gré ? Ils t'ont payé pour venir nous espionner, c'est ça ! s'exclame Battista avec un faux air de conspirateur.

Céleste éclate de nouveau de rire et finit par sourire largement à l'adolescent. Face à elle, Galeazzo qui est en train de boire à la bouteille qu'il vient d'ouvrir, manque de s'étrangler avec sa gorgée d'eau.

– Azzo ! Ça va ?

– Ça va ! Ça va, fratello, répond ce dernier en fixant un regard noir sur Céleste qui se demande aussitôt ce qu'elle a bien pu faire pour contrarier encore l'aîné des Malatesta.

Elle commence à croire que tout chez elle le met hors de lui. Ça arrive l'antipathie instinctive. C'est plus fort que tout. On n'y peut rien. On ne peut pas plaire à tout le monde. Ça lui est déjà arrivé. Avec son physique un peu spécial... mais qu'il se rassure ! C'est réciproque. Son sourire disparaît aussitôt.

– Je vais vous laisser. Je vais aller me perdre dans une autre contrada ennemie ! Avec un peu de chance ou de malchance, je vais bien rencontrer un autre Malatesta... Pas de cousin ou de cousine ? D'oncle ou de tante que je pourrais croiser malencontreusement ?

– Plein ! Cette ville est remplie de Malatesta ! dit Battista en riant.

– C'est bien ma veine ! Je vais rentrer direct, alors ! Je ne voudrais pas causer d'autres ennuis à l'un des membres de cette illustre famille ! dit-elle plus froidement que nécessaire en fixant brièvement Galeazzo qui se tient toujours derrière le comptoir de la cuisine, sa bouteille à la main.

Battista n'ajoute rien. Il comprend immédiatement que la jeune femme ne s'adresse pas à lui. Ses frères sont vraiment des idiots. Il se demande comment ils ont réussi l'exploit de se fâcher avec une fille aussi sympa ! Enfin pour Giuseppe, il sait. Pour Galeazzo, ça lui échappe.

Il vit avec son aîné depuis un moment, et il le considère comme un type plutôt cool. Un peu stricte - mais toujours moins que leur père - , mais cool. Il rigole à ses blagues et discute volontiers avec lui de jeux vidéo ou de cinéma. Alors, son attitude avec Céleste est un mystère pour lui.

Il la regarde s'éloigner vers la petite porte qui donne sur la muraille.

– Pourquoi tu es fâché avec elle ? demande Giambattista à son frère en suivant la jeune femme des yeux.

– Je ne suis pas fâché. C'est elle qui l'est.

– Et pourquoi elle l'est ?

– Parce que je suis sûrement un idiot arrogant et froid à ses yeux.

– Et pourquoi elle pense ça de toi ?

Galeazzo ne répond rien. Il a quitté la pièce pour monter dans son bureau à l'étage. Battista s'attable seul devant les cannellonis de Marinella. Il regrette le départ de Céleste. Il est sûr qu'elle aurait adoré.

Romance à l'italienneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant