Paré de son léger voile printanier, le vaste jardin est une invitation à la flânerie. D'ailleurs, Céleste irait bien y faire un tour plutôt qu'entrer dans le palazzo. Aussi majestueux soit-il, elle se passerait bien de le visiter une nouvelle fois. Pas qu'elle n'ait que des mauvais souvenirs – il y avait eu ce baiser intense échangé avec Galeazzo, tout de même -, mais beaucoup quand même, et notamment dans des situations où elle n'avait pas forcément été à son avantage.
– Céleste ?
La voix de son amoureux la ramène à la réalité. Il va bien falloir qu'elle entre. Elle n'a plus le choix. Elle doit affronter le seul mâle de cette famille qui ne l'apprécie pas à sa juste valeur. Ses amis ont raison, elle ne doit pas baisser les bras. Elle serre brièvement les poings et se tourne vers Galeazzo qui lui tend la main pour l'inciter à le suivre.
Il sait quelle épreuve elle va devoir endurer. Il en est parfaitement conscient. Toutefois, il sait également qu'elle est tout à fait capable d'affronter le dragon seule si elle le décide. Il connait sa force. En fait l'expérience chaque jour, et l'en admire que plus. Céleste n'est absolument pas une jeune fille évanescente comme son physique atypique pourrait le laisser paraitre. Elle est une petite guerrière opiniâtre et déterminée qui refuse d'abandonner le combat tant qu'une lueur d'espoir subsiste.
Il l'a constaté à plusieurs reprises. Même dans leurs rapports plus intimes, quand ils sont enlacés, imbriqués l'un dans l'autre, s'avouant de mille façons l'attirance qu'ils ont l'un pour l'autre, elle ne cesse de se battre pour ne pas abdiquer trop vite sous les caresses. Pour rendre au centuple ce qu'il lui donne.
Céleste est ainsi. Une âme guerrière dans un corps de fée.
Alessandro marque d'abord un temps d'arrêt. Quand son fils ainé lui a annoncé qu'il viendrait accompagné ce week-end, le patriarche s'était attendu à le voir arriver avec une beauté à son bras. Pas avec cette crevette albinos au sourire figé et au regard batailleur, habillé des couleurs de l'arc en ciel. Alessandro soupire de mécontentement.
– Galeazzo ?
– Père. Je vous présente Céleste Melville, que vous avez déjà croisé à plusieurs reprises.
– Croisé ? Je dirais que nous avons fait plus que nous croiser, n'est-ce pas Mlle Melville ? dit-il avec un ton sévère.
– En effet, répond la jeune femme sans se démonter.
En voyant le regard d'Alessandro Malatesta, elle a décidé que la meilleure stratégie pour aborder le colosse italien était l'attaque. Il l'a jugée et méprisée. Il l'a même snobée. Pas question de laisser passer cela. Mais, à présent, forte de ce nouvel amour qui emplit sa vie de joie et de confiance – on peut rêver -, elle choisit de ne pas se laisser impressionner.
Le patriarche semble étonné de sa répartie, pourtant brève.
– Tu m'expliques ? lance-t-il alors à son fils en se détournant de la française.
– Avec joie. Céleste et moi, nous sommes...
– ... Très proches, complète la jeune fille sous le regard étonné de Galeazzo.
En attrapant le bras du jeune homme, elle revient dans le champ de vision d'Alessandro qui fronce derechef les sourcils, contrarié. Manifestement, il préfèrerait parler à son fils, seul. Il n'apprécie pas que la jeune femme se mêle de leur conversation, quand bien même cette conversation la concerne totalement. Mais Céleste n'a pas l'intention de le laisser faire. Elle lutte déjà avec le petit côté macho de Galeazzo. Pas question pour elle de se laisser évincer par le patriarche de la famille. Même s'il est d'une autre génération, il va falloir qu'il s'habitue à son penchant revendicatif... Penchant qu'elle partage avec Olimpia. Il n'a pas fini...
– Très proches ? Comme Francesca était proche ?
– Non, père. Comme Fausta était proche.
Alessandro rougit violemment à l'évocation du nom de sa défunte et adorée épouse. Il n'apprécie pas non plus qu'on l'associe à ce qu'il considère comme une mascarade.
– Galeazzo. Dans la bibliothèque. Maintenant.
Voyant que Céleste suit le mouvement. Alessandro Malatesta marque un temps d'arrêt et précise :
– Seul.
D'un hochement de tête, Galeazzo lui demande de le laisser faire. Il sait cette conversation inévitable. Il s'y est préparé.
VOUS LISEZ
Romance à l'italienne
ChickLitÉtudiante française, Céleste vient d'arriver en Italie, prête pour une année d'étude dont elle a rêvée. Elle est prête à tout donner pour revenir auréolée de succès. Mais c'était sans compter la famille Malatesta. D'abord la fille cadette, Olimpia q...