Où va le monde

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Je ne le connaissais pas encore quand je me suis cassée le genoux en primaire et pourtant c'est comme si on avait toujours marché du même côté. Comme s'il essayait de nous sauver de cette vie avec son sourire ensoleillé.

Les couleurs de la saison l'auraient emportées ? Paul ferait mieux de nous rendre l'automne au plus vite. Son départ est lâche.

Mon appareil a capturé tellement d'instants, passés avec eux. Des moments dans lesquels je me sentais tellement vraie et vivante que j'arrivais à atteindre les effets de la liberté que je recherchais.

Le temps file à travers mes doigts. J'aimerai en avoir plus. Mais je pleure parce que le temps passe. Les souvenirs sont tellement plus que quelques secondes.

J'ai besoin d'une pause. Traîner au lit pour la journée. Qu'il m'avale sans me recracher. Je sais qu'on va mal. Qu'Evan commence à devenir vraiment bizarre. Comme s'il envisageait le pire. Que Sam devient plus attentif par pure inquiétude.

Passer une après-midi dans le mois de mai à courir et jouer libres dans les champs de fleurs, ça me manque. On le faisait pour se sentir complet. Mais là, tout se bouleverse. Paul n'est plus là et ça craint. Il nous dénichait des bons coins pour des photos. Nous n'avions pas un souffle pour souffrir. Je pensais qu'on aurait plus de temps et ça, c'est triste. Peut-être que j'étais folle, bernée par les mensonges. Emplie de désillusions.

Deux semaines suffiront pour avoir raison nous. Il laisse un vide évident. Plus que remarquable. Le soleil se fatigue, les fleurs s'envolent au loin.

Sam se renseigne par message :

« Eva, tu vas bien ?

-Pas trop aujourd'hui...

-Ah malade ?

-Oui. Des plans ?

-Pour demain si t'es dispo.

-Explique. »

Quelque part, je trouve que c'est touchant de demander des nouvelles de ses amis. J'aimerais être sans cœur, me préserver des couteaux enfoncés dans le dos mais je sais que ça ne me ressemblerait pas. Que je passerai à côté d'amitiés, même si on sait tous comment ça se terminera.

Paul nous a lâché et j'aimerai m'intéresser plus en détail aux visages des gens qui composent la foule et pas à ceux qui nous abandonnent.

Est-ce qu'ils y contribuent d'une certaine manière ? Le monde est tragique quand quelqu'un est à part. Certaines personnes sont tellement plus que des apparences.

« Rencontrons-nous à nouveau, pour la première fois. » M'envoie Sam.

Juste nous [En Réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant