Monsieur le président,
Mesdames, messieurs les ministres.
Il faut que je vous dise que vos ghettos me terrorisent, j'viens vous parler d'un attentat, mais pas d'islamisme.
Revenons au commencement d'une histoire qui ne se serait surement pas déroulée comme telle, si mes aïeux n'étaient pas venus reconstruire la patrie de Charles Martel.
J'vais vous poser le décor, histoire que tout le monde soir d'accord. Ca ce passe dans une cité, un putain de ghetto français, mais pas le ghetto du gotha il est pas question d'Auteuil Neuilly Passy ici, mais plutôt d'la Courneuve, Orly, Vitry.
Cette histoire là, elle implique une fille, disons plutôt une femme, en fait non, c'était la plus belle de ces dames, rien à voir avec Segolène ou Valérie, encore moins Ariel, j'ai pas les gouts de Bernard Henri Lévy. Non moi je vous parle d'une beauté de chez moi, un pur sang arabe ma petite Anissa. Ce genre de fille que l'on regarde mais que l'on ne remarque pas, parce qu'elle essaye de se faire le plus discrète possible, passez inaperçue dans la foule et ne pas être prise pour cible.
La cible dans cette histoire c'était mon coeur, et cupidon ne m'a pas raté.
J'suis pas un homme exemplaire, ni une gravure de magazine, mais malgré tout vous savez chez nous on arrive toujours à plaire. Pas besoin de la Rolex de Nicolas ou du scooter de François, c'était juste elle, moi et un kebab sur les toits.
Notre histoire, certains la qualifieraient de thug love, mais cette expression est bourrée de clichés et par Allah que jamais un seul de ses cheveux j'ai touché. En vérité j'ai galéré, elle a longtemps refusé de me parler, alors j'ai lutté, tous les moyens sont bons, et elle, je savais que c'était la bonne.
C'étaient des textos échangés, des heures au phone à rire avec elle, des rendez-vous sur les toits, ou derrière le bâtiment. Des aprèms à l'autre bout de Paris, pour pas se faire griller par toutes les commères d'ici. En vérité, y'a un truc que je regrette c'est que pour moi elle a menti à sa mère, à son père, même à ses frères. Tout ça pour passer du temps avec moi.
J'lui ai jamais menti, elle connaissait ma vie, c'est clair qu'elle validait pas, elle s'était une fille dans le Dîne qui rêvait de porter le voile, Inch'Allah. Alors que moi je me la jouais bandit et rêvais d'un gros berreta.
L'truc c'est que les mois, même les années sont passées. Et après deux ans passés à la fréquenter, j'ai bien vu que pour ma gueule elle souffrait, et que j'étais en train de laisser un diamant sur le côté.
J'ai pris sur moi, parce que dans votre pays c'est la galère de faire du biff avec ma gueule et sans diplômes, mais j'savais que j'aurais pas la conscience tranquille si c'était de l'argent sale qui payait son trône. Donc j'ai charbonné, manutentionnaire, c'est pas ça qui fera de moi un milliardaire, mais c'est l'addition de vos années de colonisation.
Et tu vois ce jour là, j'avais enfin réussi à économiser assez pour lui offrir le hlel de ses rêves, pour lui payer une bague digne de ce nom, et payer un petit appart dans le quartier, rien de grandiose, mais comme elle disait si bien « Hobi t'es ma plus grande richesse dans la vie ».
On était au parc, posés. Voilà bientôt 9 mois que le biz j'avais lâché, j'te jure que j'ai rien vu venir sinon je l'aurais protégée... Mais j'étais hypnotisé par son sourire et son regard, et tout ça s'est passé trop vite. J'ai juste vu un 7.50 arriver, un mec casqué, cagoulé, j'ai vu le mec pointer son arme vers moi, j'ai compris que c'était fini, j'ai récité la Chahada. Ce fils de pute ne savait pas tirer, c'est moi qu'il visait, c'est elle que la balle a percuté.
Ce jour-là j'ai perdu ma femme, que dis-je j'ai perdu ma vie.
Et j'pense que les vrais coupables c'est vous. Pas vous personnellement, ça non, le responsable c'est sûrement moi vous en conviendrez, j'ai trempé dans l'illicite j'ai plus qu'à assumer. Mais croyez-vous que j'aurais fait tout ça si, j'avais pas vu mes parents se crever à l'usine pour une paye de misère, si à l'école on m'avait enseigné que Kader a la même valeur que Pierre. C'est pas que je veux rejeter la faute sur vous, ou sur le système, j'suis un homme j'assume mes problèmes.
Mais juste, vous vous dîtes pas que si la jeunesse s'enflamme, si dans les ghettos nos kho tombent comme des dominos, c'est peut être parce qu'il y a un soucis. C'est peut être qu'historiquement vous avez agit avec un certain mépris. Nos parents ont été naïfs, mais comment leur en vouloir, vous avez vu dans quel état vous avez laissé nos bleds en décolonisant? Comment en vouloir à tout ces gens de souhaiter une meilleure situation pour leurs enfants?
Ces enfants en question, c'est nous, et nous on s'entretue parce que tout ce qu'on nous offre c'est la rue.
Alors je réitère mes propos, un attentat a été commis, avant même ma naissance on a brisé ma vie. J'sais que c'était mektoub, que c'était écrit, mais j'peux pas accepter de perdre ma femme sans faire un peu de bruit.
Juste un jeune au bout du rouleau qui en veut à la terre entière, j'ai 22ans et j'suis déjà aigri.
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#ByIndi
Ficção GeralToutes mes petites inspirations. Des petites histoires en trois parties. Des "One Shot" aussi. Parce que pour moi écrire c'est se libérer, écrire c'est la liberté de la pensée, c'est poser les idées, qui fourmillent dans mon cerveau, sur un papier...