BALLE 64 (c)

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64.

Miho était assis dans le fauteuil en velours émeraude, regardant le cognac dans son verre, se reposer entre les glaçons. Accoudé, il était en train d'écouter son interlocuteur chinois qui se vantait d'avoir acheté des terres en Afrique du Sud, se disant bienfaiteur par l'envoie de provisions, de matériels et matériaux à la population. En attendant, il avait ouvert une usine et pouvait exploiter les ressources précieuses de l'un des pays de ce continent. Mais quelle était la philosophie que Mee Na lui avait toujours dit : "Chacun fait son blé comme il l'entend".

- Et dîtes moi, j'ai entendu une rumeur qui dit qu'en Corée, il y a eu de l'agitation.

Le balafré releva lentement son regard vers son convive, il se redressa doucement dans son siège :

- C'est à dire ?

- J'ai entendu dire que vous avez l'Etat qui a saigné au vif toute la pègre. Et surtout, j'ai entendu une bonne blague de mythologie grecque. Je n'ai pas bien compris cette histoire mais soyons réalistes. Vous avez mis une femme comme pantin à la tête du clan ? Afin de la désigner comme cible ?

Un bruit de talons, une main manucurée se posa sur l'épaule de son second. Elle se tenait derrière lui, se positionnant plutôt comme la marionnettiste que la marionnette.

- Et si c'était vous qui avez été trompé ? Et si j'avais placé un épouvantail pour garder mon trône en attendant que des machos comme vous, acceptent qu'une femme puisse diriger. N'importe qui peut diriger. La preuve, vous êtes le directeur administratif et financier de votre boîte, donc même un chimpanzé pourrait se faire passer pour un bon chef.

L'invité bondit sur ses pieds en entendant ces propos insultants, il la pointa du doigt et son visage se déforma sous la colère. Impulsif, il était ridicule.

- Vous !

- Kim Mee Na, patronne de l'Organisation.

Elle dévia l'index tendu du chinois, le forçant à l'abaisser alors que Miho restait sagement assis, sous l'ombre de sa supérieure.

- Vous êtes donc la fille cachée de Kim Tae-Yeong !

- Pourquoi je devrais toujours être rapportée à mon père ? Ne puis-je pas être juste moi ? Enfin, je suis ravie de vous rencontrer Monsieur Liu. Cependant je n'apprécie pas votre, comment dire, votre grossièreté.

Comme si une autre phrase était cachée derrière ces paroles adressées à cet homme méprisant, Miho se leva et dégaina une petite dague gravée de ses initiales, un cadeau tout récent de la jeune femme.

Il recula d'un pas, butant contre le mobilier, il n'avait plus que dans son champs de vision la lame. Pourquoi sortir une arme blanche ? Une balle dans la tête serait préférable, surtout lorsque les pratiques de Hadès étaient connues pour la lenteur et la douleur d'une barbarie sans fin.

- Vous ne pouvez pas ! Les accords de la Triade ! Il y a des accords ! Vous avez toujours tenu parole !

Miho roula des yeux et commença à agiter l'objet pointu dans les airs :

- Devrais-je commencer par votre bouche ? J'ai déjà arraché une langue trop pendue.

Dans sa peur, et son désespoir que de sortir de ce petit salon en vie et si possible en un seul morceau, il se tourna vers la tête pensante du clan alors qu'il l'avait critiqué quelques minutes auparavant. Enfin, il aurait dû la supplier mais voilà ce qui fut dit :

- Vous êtes le sexe faible ! C'est pour ça que vous faites faire le boulot par votre chien ?!

- Parce que quand vous tuez des milliers de personne par l'exploitation intensive, les mauvaises conditions de travail, mais que vous n'avez pas tenu le canon qui a fini par les achever, vous vous prétendez innocent ? Vous êtes pire que moi et je pourrais vous applaudir.

Elle s'avança et doucement, elle prit des mains de Miho, l'arme blanche. Surtout pour la frime, elle fit faire une rotation à la dague avant d'enserrer la garde et de diriger la pointe vers le visage de monsieur Liu.

- Votre père ! Je connaissais votre père !

- Et bien, vous allez pouvoir le retrouver rapidement. Vous pourrez papoter.

Il s'agenouilla rapidement et se mit à frotter ses mains l'une contre l'autre de manière frénétique. Il était venu le temps de supplier avec l'énergie du désespoir pour tenter d'échapper à une mort pourtant inévitable.

- Je peux vous être utile ! Je peux vous ouvrir les portes de toute la Chine ! J'ai une famille, deux jeunes filles !

Voilà qu'il débitait à un rythme effréné tous les arguments possibles qui traversaient son cerveau pour tenter de rester en vie.

Miho roula des yeux, s'il pensait vraiment toucher une corde sensible, il devait être un piètre musicien.

- Madame Kim veut en finir rapidement. Alors ne bougez pas Liu.

- Vous voulez mon argent ? Je peux tout vous donner !

- Estimez vous chanceux. Ça sera rapide. J'aurais préféré vous garder pour jouer un peu avec vous.

Mee Na souffla et attrapa d'une poigne les cheveux de l'homme à ses pieds :

- Vous me dégoûtez.

Elle le força à pencher la tête en arrière, tirant fortement sur sa prise.

Avant même de comprendre la position dans laquelle il se tenait désormais, elle planta la dague en travers de la trachée de l'homme, sectionnant la carotide.

Monsieur Liu s'étouffait dans son sang et désormais libre de ses mouvements il porta ses paluches tremblantes à sa nouvelle plaie.

La dernière vision qu'il put voir, fut l'empereur des Enfers essuyer la main de sa maîtresse d'un mouchoir brodé, avec délicatesse.

Presque poétique, si elle ne tenait pas encore l'arme sanglante. Presque poétique, si il n'était pas la victime.

- Tu ne devrais pas te charger de ce genre de personnes.

Elle le laissait nettoyer toute trace de sang, Miho avait toujours été un petit chien obéissant prêt à tout pour elle.

Au début, indifférente puis amusée de voir jusqu'où il irait. Maintenant elle était lassée de ce comportement où il se laissait sans cesse écraser. Elle pourrait le rendre aveugle et muet qu'il s'en accommoderait.

D'un autre côté, il était un cavalier aisé à déplacer sur son échiquier. Cependant tout est remplaçable. Après tout un pion peut devenir ce qu'il veut s'il arrive au bout du camp ennemi. Et elle en avait un sous la main intéressant.

- Miho. Qu'est-ce que tu ferais si je te disais que je te remplacerais.

- Je serais agacé. Pourquoi lui et pas moi ? Alors que ma vie n'a été dédiée qu'à toi. Je suis le plus à même à anticiper ce dont tu as besoin, ce que tu vas faire ...

- Tu prétends me comprendre ?

- Non. Je dirais seulement que je suis comme un majordome, un chevalier, ou encore un porte serviette si nécessaire. Peu importe ce que tu veux Noona, je te le donnerais. Parce que ça a toujours été comme ça.

Elle eut un petit rire, lançant la dague sur le fauteuil pour se débarrasser de cet objet :

- Quelle relation toxique.

Il planta son regard dans le sien :

- Qu'est-ce que tu attends réellement de moi ?

- Si je te le disais, tu serais incapable de me suivre. Or tu m'as promis de paver l'Enfer à mes côtés.

DIE TO BORN [Édition Séoul] - TERMINÉEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant