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— Mais qu'est-ce qui vous prend à la fin ? Putain, lâchez-moi.

   On l'entendait dans tout le couloir alors qu'il se faisait conduire par l'officier Chapman dans la salle d'interrogatoire. Heley ferma les yeux alors que sa voix résonnait en elle comme un écho. Elle ne supportait ni de le voir emmener comme un vulgaire criminel dans la salle adjacente à celle où elle se tenait. Ni ne supportait de l'entendre hurler comme un forcené. Pour elle, c'était tout bonnement impossible. Deiko ne pouvait pas être l'informateur du gang. Ça n'avait aucun sens. Il était têtu sur les bords, impulsif, sauvage mais pas un criminel. Pas lui. Elle enroula ses bras autour d'elle quand elle se sentit trembler. Et par en juger l'impression peinée de ses amis, eux aussi ne savaient quoi penser de cette situation. Aucun d'eux ne parlait, tous regardaient les écrans de surveillance qui donnaient une vue sur le couloir que Deiko et Vaik Chapman traversaient.

— Merde, vous allez me dire ce qui se passe, bon sang !

   L'agent de police garda les lèvres scellées et l'obligea à entrer dans la salle aux murs ternes qui donna à Deiko l'impression d'être dans un asile de fou. Il frissonna lorsque que son regard entra en collision avec celui d'Othman Slavkin. Il ne paraissait pas content. Celui-ci se tenait au fond de la salle, un peu dans l'ombre et l'observait silencieusement tel un animal en cage qui attendait de passer à table. Et c'était lui le repas.

   Chapman le fit s'asseoir sur la chaise, lui retira les menottes et prit place de l'autre côté de la table qui les séparait. L'agent de police posa les coudes sur la table et croisa les mains. Son regard se perdit sur le dossier du jeune homme ouvert devant lui. Dossier vide qu'il s'obstinait à observer afin de ne pas le regarder lui qui lui rappelait tant son père, physiquement mais qui agissait différemment.

   Kaleb entra à son tour dans la pièce et s'approcha du garçon. Lorsqu'il prit son bras de la main, celui-ci tenta de se dégager mais se ravisa en rencontrant les pupilles noirs du chef de la DEC. Deiko grinça des dents. Il ne réagit pas lorsque l'agent lui fit porter un tensiomètre à brassard, un capteur d'activité électrodermale ainsi que les autres équipements de la machine polygraphe relié à l'ordinateur de Karl qui se trouvait de l'autre côté de la vitre noire blindée.

   C'est seulement lorsque l'agent Kaleb Anderson sortit de la pièce que l'interrogatoire commença enfin.

— Je peux savoir ce que vous me voulez ?

— Des informations, répondit l'officier tout calmement.

— Quelles genres d'informations ? Je n'ai rien à vous dire.

— Bien sûr que tu en as.

— Je ne vois vraiment pas ce que vous me voulez. D'ailleurs je ne comprends même pas tout ce cirque, dit-il en indiquant tout autour de lui.

   Il posa son bras libre sur la table et rapprocha son visage du policier.

— J'ai eu une sale soirée.

— Comme nous tous, répliqua le policier d'une voix neutre.

   Deiko ne lâche pas pour autant l'affaire, voulant à tout prix se faire entendre.

— J'étais au gala comme tout le monde, puis y'a eu ces explosions qui m'ont foutu la trouille de ma vie et j'ai bien cru que j'allais y passer. J'ai reçu un coup sur la tête qui m'a assommé, puis je me suis réveillé dans une ruelle avec un mal de tête atroce. Je rentre tranquillement chez moi me reposer et c'est là que vous débarquez pour m'amener de force au poste de police comme si j'étais un criminel. Devant ma mère qui doit être morte d'inquiétude maintenant et sans raison en plus. Tout ça pour me demander des informations. Mais quel genre d'informations, putain ?

Les ombres du passéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant