Les ombres du passé

50•

— C'est bon je vais vous le donner, mais lâchez ce putain de flingue.

   Elsie n'avait pu s'en empêcher, cette phrase était sortit de sa bouche inconsciemment. Elle n'avait pas eu le temps de mesurer ses paroles avant de se lancer. Son cerveau n'avait pas réfléchi à deux fois. La peur de voir son amie mourir devant ses yeux l'avait obligé à parler. À dire qu'elle allait lui remettre le journal et donc à lui révéler sa cachette.

Sauf qu'un problème se posait. Elsie ne savait pas où il était ni à quoi il ressemblait. La jeune femme ne l'avait jamais vu, son père ne le lui avait jamais montré. Ou peut-être que si ? Il le lui avait peut-être montré, mais ne lui avait jamais dit de quoi il en tenait réellement. Dans tous les cas, ce journal elle ne le connaissait pas.

Très malin. Sa tentative de sauvetage l'avait jeté dans de beaux draps. Elle ne faisait que retarder l'inévitable. Son geste paraissait bête. A vrai dire, elle n'avait rien trouver de mieux. À peine ses iris bleus eurent remarqué le petit point rouge lumineux sur le tapis et qu'elle savait provenir d'un designateur laser pour arme à feu, qu'elle n'avait su se contrôler. Un peu comme si ces paroles étaient sorties d'elles-mêmes.

   La police était là. Dehors, quelque part derrière les grandes fenêtres qui donnaient sur le jardin. Elsie ne discernait pas grand chose tant l'obscurité apparente lui barrait la vue. Mais elle en était certaine, ils avaient de la compagnie.

   la jeune femme savait reconnaître une arme et tous les accessoires qui en dérivaient. Son père avait toute une collection. Du calibre 3-57 magnum au Beretta 92 fs, d'un laser de préréglage à l'analyseur de tir Mantis x3 et du Ak-49.3 aux artilleries. Clovis Reyen avait son propre armement. Elle était habituée à ces bidules comme aimait dire son père. Elsie mettrait sa main à couper que ce point rouge provenait d'un désignateur laser.

   A part elle, personne n'avait remarqué le point lumineuxm ce dont elle était rassurée. Si Nolan et son sous-fifre s'en apercevaient, la situation allait prendre une tournure encore plus dramatique qu'elle ne l'était déjà.

Gagner du temps. La jeune femme devait trouver un moyen de les occuper. Au moins le temps que les secours interviennent. C'était pour elle le moment de mettre en application ce que son daron lui avait appris.

   Le bluff. Tout se jouer dans l'art de la manipulation. Une certaine attitude s'imposer à elle. Elsie devait leur faire croire qu'elle savait où se trouvait le journal, les induire en erreur. Elle devait maîtriser ses émotions, revêtir un masque, se donner de l'assurance mais pas trop. Car elle devait simuler la crainte à leur égard. En outre, afficher un comportement erratique. Un peu comme au slowplay dans une partie de poker.

   Nabil se retrouvait dans une position délicate. Rien qu'à le regarder, Elsie savait qu'il ne pourrait pas l'aider. Son était déplorable ne lui permettait pas d'agir. Heley non plus ne serait pas d'une grande utilité. Le chef du gang se servait principalement d'elle comme moyen de pression. Il ne s'en prendrait pas non plus à son cousin, du moins pas de cette façon. Dure à croire, mais Nolan tenait à Nabil. Et elle ? Elle était sa cible. Celle qui détenait son dû : l'As du Rami. Dorénavant, les cartes étaient posées, les dés étaient jetés.

— Eh bah voilà qui est mieux ! s'enjouit tout d'un coup N.

   Elsie sortit instantanément de ses réflexions. Ses orbes cherchèrent le point rouge qu'elle ne vit pas. Il avait disparu. Le chef de la Croix Rouge éclata de rire.

— Je ne me trompais pas quand je disais que tu ressemble à Clovis. Tel père, telle fille hein ! Tu es aussi malhonnête que lui. C'est de famille, on dirait.