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— Elle ne va pas bien, luit dit Tony. Tu éviteras de la brusquer s'il te plaît.

— Surtout n'évoque pas le nom de son père, poursuivit Sena de façon dramatique. Ou sinon elle va se morfondre davantage.

Pour la énième fois, le garcon acquiesça d'un mouvement de la tête sans omettre de rouler des yeux pour leur montrer son agacement. Il avait bel et bien saisi les consignes qu'elles lui avaient donné plus tôt. Alors pourquoi se répétaient-elles ? Aux dernières nouvelles, il n'était pas sourd. Il avait encore toutes ses capacités auditives. Où était-ce parce qu'elles ne lui faisaient pas totalement confiance ? De toute façon, même si c'était le cas, elles n'avaient pas d'autres choix que de le laisser se charger d'Elsie puisqu'elles devraient quitter les lieux. Leurs parents étaient sûrement mort d'inquiètude suite aux évènements récents. Aucun de ses amis ne pouvait s'éterniser davantage, leurs familles avaient besoin d'eux.

— D'abord qu'il nous a fallu du temps pour la calmer, lâcha Collins, vidé de toute énergie après la journée passée à consoler son amie.

— Elle s'arrête jamais de pleurer ! renchérit Sean, tout aussi épuisé.

Malgré le ton humoristique employé par ses potes, Nabil pouvait sentir l'inquiètude à travers leur language corporel. Ils jetaient sans cesse des coups d'oeil par dessus son épaule comme s'ils avaient une envie pressante de retourner dans la maison. Ce qui devait être le cas, eux n'ont plus ne voulaient pas partir même s'ils ne l'admettaient pas ouvertement.

— Pose pas trop de questions, persista Lee. Tu la connais, elle aime pas qu'on l'importune.

— Tu vas voir elle va devenir agressive sinon, enchaina Tony. Ah et surtout ne...

— Les gars !

Ils se turent tous. L'espace d'un instant, Nabil envia Elsie. Savoir qu'autant de personnes tenaient à elle et la voulait saine et sauve lui rappela non seulement le manque d'attention dont il avait toujours souffert depuis son plus jeune âge, mais aussi la solitude qui l'accablait. Le jeune homme dût se traiter de tous les noms pour remettre ses idées en place. Certes il n'avait pas joui d'une enfance pleine comme la plupart des gens, mais il n'était pas seul.

— Je sais, c'est bon! leur assura-t-il. Vous inquiétez pas, tout va bien se passer. Je gère la situation. Je vais faire en sorte qu'Elsie aille mieux.

— Venant de toi, j'y crois pas trop, lâcha Collins

— Moi non plus, fit Lee.

L'ex-détenu pensa à les cogner tous les deux pour avoir dit une sottise pareille, mais se souciant de son état de santé critique, il se ravisa. Non, il n'avait aucune envie de rouvrir ses blessures de la veille.

— Heureusement qu'Heley est là, dit Tony, pas du tout rassurer.

— Ouais parce que moi je compte pour du beurre.

— Carrément ! dirent Collins et Sean en chœur.

— Cassez-vous, j'ai plus envie de voir vos gueules.

Ils éclatèrent de rire et quittèrent finalement le porche de la maison. Seule Sena subsista, encore incertaine sur le fait de partir ou non. Elle s'inquiétait pour son amie. Celle-ci leur avait très peu parlé, malgré le nombre incalculable de tentatives. La jeune femme se cloîtrait dans un silence que ni elle, ni les autres n'avaient su briser et cela la peinait. Apaiser quelqu'un n'avait jamais paru aussi difficile qu'en ce jour.



En dépit d'elle-même, l'envie de pleurer se fit plus forte. Incapable de venir en aide à celle qu'elle considérait comme sa meilleure amie, Sena se resolut à s'en aller en espérant que contrairement à elle, Heley et Nabil saurait faire la différence.


Les ombres du passéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant