Chapitre 19

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Quand Iuliana arriva au salon de thé, quelqu'un attendait déjà devant la grille. Il faisait nuit noire et peu de personnes circulaient dans les rues à une heure aussi matinale, à moins de se diriger vers la bouche de métro la plus proche. La jeune femme portait déjà son appareil auditif, une habitude prise quand elle levait seule la grille de son précédent salon, pour le retirer une fois en cuisine. Elle n'avait pas encore changé cette habitude, mais elle appréciait le silence des rues à peine troublé par le bruit des voitures et de quelques passants.

Dylan arrivait souvent en premier au salon, bien qu'il n'en détienne pas les clés. Il détestait arriver au retard et une longue journée les attendait en cette Saint-Valentin. Iuliana s'attendait donc à l'apercevoir, et à la carrure et la couleur de peau, tout portait à croire qu'il s'agissait de lui. Son cœur s'emballa dans sa poitrine quand elle reconnut enfin la silhouette de Vince. Un grand sourire naquit aussitôt sur ses lèvres et elle se pressa vers lui avec la sensation de rêver.

Or, son ami se trouvait bien là, juste devant la grille, avec son sac sur le dos et un bouquet de fleurs dans la main. Le visage d'Iuliana s'embrasa en apercevant le présent, et son bonheur balaya l'anxiété de cette journée à venir.

« Qu'est-ce que tu fais là ? fit-elle en trottinant vers lui.

- Joyeuse Saint-Valentin ! »

Il lui parut si timide à cet instant, et si sincère, que la jeune femme retomba complètement sous son charme. Elle le trouva si beau à cet instant qu'elle se jeta dans ses bras. Ceux-ci se refermèrent aussitôt sur elle, et elle se sentit en sécurité durant quelques instants contre lui. Elle en oublia le froid lui caressant les jambes, ses doutes passés, la crainte de ne jamais lui convenir... Il ne restait plus qu'eux, en cette jolie journée, enlacés devant le rideau du salon.

« Bonne Saint-Valentin, répéta Vince en lui représentant son bouquet. Je... J'avais préparé tout un discours, mais je l'ai perdu...

- C'est pas grave, dit-elle en récupérant les fleurs. C'est une belle attention, merci beaucoup.

- Je t'en prie, souffla-t-il. Je sais que c'est un peu kitch, mais je voulais vraiment t'en offrir ce matin, parce que je savais pas si on se verrait ce soir, et... Et je tiens énormément à toi, t'es une fille géniale et j'ai beaucoup de chance de te connaître et... Et je voulais t'offrir des fleurs. Et je suis mauvais, ajouta-t-il avec un sourire dépité, la faisant rire. J'essaie juste de te demander de sortir avec moi, mais je comprendrai si tu as besoin...

- Oui, je veux sortir avec toi. J'adorerais ça... »

La joie d'Iuliana trouva aussitôt un écho dans l'âme de Vince, car un sourire magnifique illumina son visage. Si elle avait pensé un jour qu'un homme serait aussi heureux de sa réponse, elle qui avait toujours été rejetée, et malaimée, à cause de son handicap... Il avait fait tant de chemin pour elle, et il était si parfait à cet instant... Elle se sentit chavirer quand il lui demanda s'il pouvait l'embrasser, et elle perdit toute notion du temps quand il posa enfin ses lèvres sur les siennes.

Vince était son petit ami, à présent. Et l'image de son visage bienheureux tandis qu'il s'en allait avec un petit geste de la main la poursuivrait jusqu'au soir, quand elle le retrouverait chez lui pour un dîner en amoureux.

***

« Il lui a offert des roses. Il s'est pointé à six heures et demie du matin pour lui offrir des roses. Dans quel monde vit-on ? Pourquoi un gars de vingt ans se lève aux aurores pour apporter des fleurs à sa dulcinée alors que mon propre mec ne m'a même pas préparé mon petit-dej ce matin ?

- Rémi est passé avant de se rendre au travail pour nous apporter des viennoiseries, à Sacha et moi.

- Je vous déteste. »

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