Chapitre 32

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Ce baiser n'a rien de comparable à tous les autres : il a le goût de l'amour, de la passion, d'une douceur qui n'est propre qu'aux gens qui ont de réels sentiments l'un pour l'autre. Ce n'est pas un baiser rempli de désirs, de fantasmes, d'envies irrépressibles. J'aime ça. Le simple fait qu'il puisse me faire me sentir aimé par un simple baiser me rend fou. J'aime croire qu'il s'agit d'une chose qui n'est propre qu'à lui, qu'à nous. Il est clair que je me voile la face mais vivre dans ce déni ne m'importe pas à l'heure actuelle.

    —Et dire que je vais pouvoir faire ça autant que je veux. C'est tout bonnement incroyable.
    —Autant que tu veux, répétais-je contre ses lèvres.

    Il détache ses lèvres des miennes dans un souffle court et prend mon visage entre ses mains. Il me regarde pendant de longues secondes, un sourire aux lèvres, comme s'il essayait de mémoriser mes traits. Je n'ai même plus besoin de le regarder pour savoir à quoi il ressemble. Je le reconnaîtrai les yeux fermés. Il embrasse gentiment mon front avant de sortir de mon atelier. Son absence provoque une vague de frissons en moins et en un instant, mes lèvres deviennent sèches. J'ai besoin qu'il revienne, qu'il m'embrasse à nouveau. Mais il ne revient pas et je commence mon travail.
    Devant le chevalet, je n'ai même pas besoin de me creuser la tête pour une idée ou de faire une quelconque esquisse. Mon poignet, mes doigts bougent tout seul. Je peins mon état d'esprit, là manière dont je me sens. Ce tableau sera tout à fait personnel et pourtant, quelqu'un y décèlera un message, y verra quelque chose qui sera invisible aux yeux des autres. C'est toute la magie de l'art, tout ce qui me plaît réellement.
On frappe à la porte de mon bureau.

    —Entre, Elizabeth.
    —Monsieur, était-ce Stanislas ?
    —Oui, lui réponds-je en souriant.
    —Est-ce que tout va bien ?
    —Tout va très bien. Lui et moi sommes ensemble. Nous partons à la montagne dans la soirée ou demain, pourrais-tu reporter mes rendez-vous ou bien faire en sorte qu'il soit en visioconférence ? Je m'arrangerai sur place.
    —Oh, toutes mes félicitations ! Bien sûr monsieur, je vais faire de mon possible.
    —Tu peux partir en vacances, toi aussi. Tu n'auras rien à faire ici en mon absence.

    Elle hoche la tête poliment. Je lui souris chaleureusement. Lorsqu'elle ferme la porte derrière elle, j'attrape une nouvelle toile sur laquelle je peins l'entrée de mon atelier, avec la porte ouverte d'où sortent des rayons de lumière. Le contraste entre les deux espaces est flagrant. C'est exactement ce que je voulais : la porte d'où jaillit la lumière représente Elizabeth, que je considère comme une véritable source de lumière, de bonté, d'amour et de beauté ; mon atelier est lui aussi coloré mais par des couleurs neutres, qui n'attirent pas tout de suite le regard. À chaque fois qu'Elizabeth entre dans mon bureau, peu importe ce que je fais, j'ai envie de la regarder, peu importe que les nouvelles qu'elle m'apporte soient bonnes ou mauvaises.

    Quelques heures plus tard, Stanislas me rejoint chez moi mais aucune valise ne l'accompagne. Mon cœur fait un bond dans ma poitrine en imaginant qu'il ai changé d'avis, qu'il a réalisé que lui et moi n'étions pas une bonne chose. Toutefois, son sourire sincère me rassure et mes doutes s'effacent complètement lorsqu'il m'embrasse comme si nous ne nous étions pas vus depuis des semaines.

    —Est-ce que vous êtes prêt, cher monsieur ?
    —Emmène-moi loin d'ici, Stan.
    —Je t'emmènerais jusqu'au bout du monde si tu me le demandais.

    Je savais que sa réponse était sincère. Non seulement il a les moyens de faire le tour du monde, mais je ne serais nullement surpris qu'il en ait aussi l'envie. Stanislas est bien de ceux qui aiment apprendre et découvrir de nouvelles cultures, il est clair qu'il ne part pas en vacances pour un total repos. Il cherche simplement un changement de paysage, de culture.
    Il attrape ma valise et la descend jusqu'à la voiture, dans laquelle se trouve déjà la sienne. Je n'ai aucune idée de si les vêtements que j'ai pris sont adaptés, ou encore à ma taille, mais ça n'a pas d'importance. Je ne vais dans ce chalet que pour être avec lui, je n'ai jamais été attiré par les sports d'hiver. Lorsqu'il remarque ma seconde valise, il hausse un sourcil.

    —J'ai pris quelques toiles, de la peinture et des pinceaux. Pendant que tu iras skier ou faire je ne sais quoi, alors peut-être que j'en resterai au chalet pour peindre.
    —Tu n'as jamais fait de ski ?
    —Ça ne m'a jamais attiré.
    —Tu ne veux même pas essayer ?

    Il m'ouvre la porte de la voiture alors que je lui réponds que non. J'aime l'hiver autant que l'été mais la beauté de la neige me subjugue bien plus que l'idée même de glisser sur cette dernière. Les paysages enneigés sont à couper le souffle. J'aimerais un jour partir et passé un Noël en Laponie. Les aurores boréales, les chocolats chauds près du feu, les rennes. Tout cela me semble si idyllique et surréaliste que c'en est d'autant plus attirant. Peu importe les températures qu'il y fait, je sais que j'aimerai ça. Le froid a quelque chose de plaisant, mais la plupart d'entre nous préfère la chaleur.

    Je décide de dormir lorsque je ne suis pas celui qui conduit, et après plusieurs pauses et de longues siestes, nous arrivons enfin au chalet. Nous avons roulé quasiment toute la nuit. Le soleil s'apprête à se lever lorsque nous ouvrons la porte. Il y a une petite cuisine en marbre blanc et un grand salon avec un canapé, une télé et une immense bibliothèque. La chambre en elle-même n'a rien de transcendant si ce n'est qu'elle a une vue incroyable sur l'ensemble de la vallée. Je comprends désormais d'où vient le prix exorbitant de ces vacances. Une fois que je parviens à me détacher de la vue, je remarque le miroir suspendu au plafond et je comprends rapidement quelle en est son utilité. Le rouge me monte aux joues, et je prends soin d'éviter tout contact visuel avec Stanislas. La salle de bain, quant à elle, est faite tout en bois et en marbre, tout comme la cuisine. La douche est immense et tout en verre. L'intimité ne sera donc pas permise apparemment. Il y a également une baignoire immense pouvant accueillir facilement deux personnes à l'intérieur. Je m'y vois déjà avec Stanislas, sa tête posé sur mon épaule, soupirant de bonheur.
    Devant la beauté de la pièce, Stan se presse derrière moi, m'attrape par les hanches et m'embrasse dans le cou. Je penche ma tête sur le côté et le laisse faire. Je regarde nos reflets dans le miroir et ne peut m'empêcher de sourire. J'aime la manière dont ses boucles brunes viennent me chatouiller et me font rire. Il relève sa tête et regarde lui aussi nos reflets. Ses yeux sont remplis d'étoiles.

    —Tu as fini par accepter, constate-t-il alors que je hoche la tête. Tu sais ce que ça veut dire, Leclerc.

    Je comprends immédiatement où il veut en venir mais le laisse continuer.

    —Des baisers, beaucoup de baisers... dit-il en embrassant mon cou.
    —Et du sexe, complétais-je.

    Il lève à nouveau sa tête vers moi et ses pupilles sont dilatées. Il me veut. Ici et maintenant.

ADALIAH [bxb]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant