Chapitre 12

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Il n'a pas besoin de répondre pour être tout à fait honnête. Son sourire triste suffit amplement. Je hoche simplement la tête. Je n'ai pas besoin de connaître les raisons pour lesquelles il ne m'accompagne pas. C'est peut-être mieux ainsi. Après tout, lui non plus ne me doit rien. Je me sens ridicule de lui avoir posé la question alors que j'étais celui qui ne voulait pas qu'il vienne avec moi à l'origine. Sa vulnérabilité m'a atteint et je me suis emporté. C'est quelque chose qui ne doit pas se reproduire. La vie de Stan est ici, et le malheur que cette ville m'a apporté ne concerne que moi. Il n'a pas à en pâtir en partant quelques jours. Ici, il aura du soutien.
    Une fois séchés et rhabillés, un silence s'installe dans la pièce. Pour la première fois depuis que je l'ai rencontré, ce silence entre nous est lourd, presque suffocant. Je souris en me rappelant ma dernière lecture. « Je pense souvent à cette expression « prendre l'air ». Cela veut dire que l'on va ailleurs, pour le trouver. Cela veut dire littéralement : où je suis, je m'asphyxie. ». David Foenkinos avait raison en écrivant cela. Là où je suis, je manque d'air et je voudrais courir loin d'ici et respirer à pleins poumons. Seulement, la seule raison qui me pousse à rester est assise sur mon lit, le regard vide.

    —Tu devrais aller voir un médecin, je n'ai pas de glace pour ton visage.
    —Je vais bien. Ce ne sont que des bleus. Je n'ai rien de prévu ces prochains jours, ils auront le temps de guérir.
    —À t'écouter, on pourrait croire que tu n'as jamais rien de prévu, notais-je.
    —Je ne vais pas te déranger plus longtemps, dit-il en se levant.
    —Tu ne me déranges pas et tu le sais.
    —C'est vrai, mais je n'ai aucune raison de rester.

    Ses mots font écho à ceux que j'ai prononcé plus tôt dans la journée. Je laisse échapper un rire nerveux, ou plutôt un rire laissant sous-entendre l'ironie de la situation. Je savais que mes mots l'avaient touché. S'il veut partir, je ne vais pas le retenir. Il est celui qui a décidé de ne pas m'accompagner. Je refuse catégoriquement d'insister. S'il veut me revoir, alors il me contactera. Autrement, je le laisse simplement m'embrasser le front avant de le laissé sortir de ma chambre et de rassemblé mes dernières affaires.

    Dans la voiture, sur le trajet du retour, mes pensées sont mitigées entre Adaliah, que je n'ai pas revu avant de prendre la route, et Stan, à qui je n'ai posé aucune question mais que j'aurais peut-être pu venger s'il en avait eu besoin. Une fois de retour dans mon appartement, j'ai les pensées bien trop pleines d'un tas de choses que j'aurais dû dire ou faire.
    Je rejoins la salle dans laquelle je peins habituellement et tout me semble vide. Sans les productions « Ada », plus rien ne semble avoir de sens. J'ai toujours les traits d'Adaliah en mémoire de manière très claire, en particulier depuis la cérémonie, comme si j'étais destiné à revivre cette scène en boucle. Ses yeux remplis de larmes lorsqu'elle est arrivée dans l'église, la manière dont sa robe sirène épousait son corps frêle, la joie d'épousé un homme bien éclairant ses traits. Je pourrais la peindre à travers ma douleur, à travers mes yeux vitreux mais je m'y refuse.
    Allongé sur le sol, j'énumère les raisons pour lesquelles j'aurais préféré ne pas la revoir. Sans surprise, je n'en trouve aucune. Je n'aurais pas dû m'attendre à ce qu'elle ait changé d'adresse, elle a toujours été du genre à accordé de l'importance à ce qui était purement matérielle. Pour elle, les sentiments priment sur tout, notamment la nostalgie. C'est quelque chose que j'admire autant que je méprise.
    Étrangement, en pensant à elle, je repense aux mots de Stanislas. N'ai-je vraiment jamais essayé d'aimer quelqu'un d'autre ? Possible. Il n'avait pas tort lorsqu'il a dit que je n'avais fait qu'essayer de l'oublier elle. J'aime donc pensé que j'aimerai à nouveau. Peut-être que je n'aimerai jamais personne autant que je l'ai aimé, peut-être que j'aimerai quelqu'un bien plus encore. Qui sait vraiment ? Je ne fais pas partie de ceux qui croient en le fait qu'on puisse avoir plusieurs âmes-sœurs. Toutefois, je consens à penser que cette dernière n'est pas nécessairement l'amour de notre vie.
    Lorsque je me relève, je décide de me changer et de sortir. Sans grande surprise, la boîte de nuit dans laquelle je suis accepté est bondée. Je ne suis pas un adepte de telles sorties mais j'y trouve parfois un certain bonheur, une sorte de lâcher prise. Je me paye moi-même mes premiers verres avant de rencontrer un groupe de jeunes qui m'en paient d'autres. L'alcool brouille tous mes sens et pour la première fois, ce n'est pas pour me déplaire. Nous dansons en petit groupe alors que je n'ai retenu aucun de leur nom. Peu m'importe à vrai dire. Je ne les reverrai jamais et ils ne se souviendront sans doute pas de moi demain matin.
    Le corps élancé d'une femme blonde se détache du groupe pour venir se coller contre le mien. Ses lèvres s'étirent en un sourire rempli de sous-entendus. Avant que je n'aie le temps de l'attraper par ses hanches pour l'attirer bien plus à moi, sa bouche rencontre la mienne. Ses lèvres sont fines et n'ont que le goût d'alcool fruité. Ce n'est pas désagréable mais dire que j'y prends plaisir serait mentir. Pourtant, je la suis lorsqu'elle m'attire dehors, puis jusqu'à sa voiture dans laquelle elle retire son haut. J'hésite un instant à faire quoi que ce soit, la regardant dans le blanc des yeux. C'est une femme très belle. Ses yeux bleus s'accordent avec sa peau pâle, ses joues sont rosies par la chaleur qu'il y avait dans la boîte et sans doute aussi à cause de l'alcool.
    En voyant que je ne bougeais pas, elle prends les choses en main et retire son soutien-gorge d'elle-même. Sa poitrine n'est ni trop grosse, ni trop petite, juste assez pour que mes mains les saisissent parfaitement. Alors qu'elle joue avec l'ourlet de mon pantalon, se balançant d'avant en arrière contre moi, je joue avec ses tétons. Ses mains glissent soudainement dans mon pantalon et je laisse échapper un soupir. Je glisse ma main sous sa jupe et la touche à travers son vêtement. Ses mouvements de va-et-vient ne s'arrêtent pas lorsque j'enfonce deux de mes doigts en elle. Ses lèvres glissent sur les miennes, et je peux sentir son souffle court. Je ferme les yeux alors que nous accélérons tous deux nos mouvements.

    —Stan, murmurais-je.

    L'instant suivant, tout s'arrête. Ses mains cessent tout mouvement, me poussant à ouvrir les yeux. Il me faut quelques secondes pour comprendre qu'il ne s'agissait pas de Stan. Comment ai-je pu me méprendre ? Lui et elle n'ont rien en commun. Que ce soit la couleur des cheveux, la chaleur de leur corps, ou tout simplement leur sexe. Comme je le disais, l'alcool brouille mes sens. Seulement, cette fois, cela me déplaît fortement. Je m'excuse auprès de la fille avant de sortir de la voiture, le pantalon encore ouvert.
    Par miracle, malgré l'alcool dans mon sang, je parviens à retrouver le chemin jusque chez moi. Toutefois, je ne m'attendais pas à trouver en bas des marches de l'immeuble la carrure de Minho Choi.

ADALIAH [bxb]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant