Adaliah est ma muse mais l'image que j'ai fait d'elle, « Ada », est ma propriété. Je suis donc libre de vendre son image à qui j'en ai envie. Je sais que même si je vends tout ce que j'ai pu créer grâce à elle, son image ne disparaîtra pas de mon esprit. Elle est vouée à ne jamais disparaître. La proposition de Minho devient alors plus qu'alléchante : des milliers d'euros pour des œuvres représentant la personne qui occupe mes pensées nuits et jours, c'est le deal parfait.
—Je suis prêt à acheter chaque œuvre que vous produirez dans le futur concernant « Ada » : peintures, sculptures, mosaïques ou qu'importe le procédé utilisé. Nous négocierons un prix pour chaque œuvre. Par courtoisie, je n'imposerai aucun délai de production.
—Asseyez-vous, dis-je en prenant place moi-même. À l'heure actuelle, ce n'est ni le temps ni l'argent qui occupe mon esprit.
—Je crains alors que vous soyez totalement à côté de...
—Pourquoi voulez-vous mes œuvres ? En fait, non. Laissez-moi reformuler. Pourquoi n'êtes-vous intéressé que par « Ada » ?Son visage demeure impassible et pourtant, j'aime à croire que je discerne de l'amusement dans son regard. Je suis persuadé qu'il avait anticipé cette question. Il croise ses jambes et passe sa main sur son visage, comme s'il retirait un masque.
—Si ce que vous voulez savoir est : est-ce que j'ai l'intention de revendre ces œuvres bien plus chères à des amateurs d'art ? La réponse est non.
—Oh, monsieur Choi. Vous êtes un acheteur agréé d'après vos dires. Vous savez donc mieux que personne l'importance et le réel sens des mots. Vous avez très bien compris ma question, ne m'obligez pas à me répéter, dis-je d'un ton ferme.
—Je vois cette femme dans mes rêves chaque soir depuis près d'un an. J'ai découvert vos œuvres lors d'une exposition à Berlin. En tant qu'acheteur, je reste quelqu'un d'assez rationnel alors j'ai décidé de prendre contact avec vous en personne. Je ne sais pas pourquoi, ni même comment vous parvenez à la représenter sous tant d'angles différents mais, je voulais savoir si tout cela était bien réel. Je cherche à savoir si Ada est réelle ou si elle n'est que le fruit de mon imagination.Mens. Mens. Mens. Ne lui dis pas. Ne lui pas qu'elle est réelle ou il te la volera.
Contrairement à lui, je suis loin d'être rationnel à l'instanté. Mes sentiments prennent le dessus et je songe quelques secondes à lui mentir, à lui que nous sommes dans le même cas et que je ne sais nullement si cette femme est réelle. Pourtant, je sais qu'elle l'est. Elle est tout ce qu'il y a de plus réel, pour mon plus grand plaisir.
Soudainement, je n'ai plus l'envie de lui vendre mes œuvres . Au contraire, j'aimerais ne jamais l'avoir vu, ne jamais l'avoir entendu. Si ses propos me laissent pensif et perplexe, je n'imagine même pas à quel point cela devait être déroutant pour lui avant qu'il n'aille à mon exposition à Berlin. Je ne peux qu'imaginer la folie dont il a été victime. J'ai moi-même douté à plusieurs reprises de l'existence d'Adaliah, tant elle me semblait trop présente et parfaite dans mon esprit. J'ai, moi aussi, cru qu'elle n'était qu'une le fruit de mon imagination alors même que j'ai eu la chance de la côtoyer, bien que je n'étais qu'un adolescent lambda.
Pourtant, le dossier sur mon bureau ne fait que confirmer son existence.—Quelles étaient vos attentes en venant ici ? Que vouliez-vous que je vous dise ? Vous êtes prêts à dépenser des milliers d'euros dans des œuvres qui représentent une femme que vous n'avez jamais vue et dont vous doutez même de l'existence ? Vous devez être riche à millions pour n'avoir que ça à faire de votre argent. Pourquoi ne pas avoir payé des cours de dessin afin de la dessiner vous-même si elle vous hante tant ? Je suppose que cela vous aurez coûté moins cher.
—Alors elle est bien réelle, dit-il simplement avec un sourire.
—Elle l'est autant que vous et moi.Pour la première fois depuis qu'il est arrivé, il laisse échapper un petit rire. Ce n'est pas le genre de rire qui vous fait pleurer ou dont vous pouvez vous moquer. Son rire est à son effigie : élégant, calme, contrôlé. Il n'y a rien de plus arrogant et pourtant, je rêve toujours de lui arracher son costume. Là, maintenant. Je pourrais lui demander gentiment de retirer sa veste, puis son veston, dans le seul but de les jeter à l'autre bout de la pièce. Une fois fait, deux options s'offrirait à moi. La première étant que je lui arrache sa chemise d'une poigne ferme alors qu'il laisserait un soupir désireux. La seconde étant que je prenne le temps de défaire les boutons de cette même chemise un à un, tout en l'embrassant dans le cou. De cette manière, je pourrais entendre sa respiration s'accélérer juste dans le creux de mon oreille.
Je ne le vois plus que sur mon bureau, la chemise ouverte, les jambes écartées et les lèvres roses. Son air suffisant aurait totalement disparu, laissant place à un regard plein de désir, plein de soumission. J'aime à croire qu'il me supplierait de le prendre ici, sans aucune pudeur. Je me perdrai dans ses yeux alors même que je m'y suis refusé à le faire à l'instant même où j'ai posé les yeux sur lui. Pourtant, je doute qu'il fasse partie de ceux qui aiment être dominés. Finalement, peut-être que ce serait moi sur ce bureau, la chemise grande ouverte et haletant. Peut-être que ce serait moi qui le supplierais de me baiser sans aucune pudeur, alors même qu'Elizabeth n'est seulement qu'à quelques mètres d'ici.—Auriez-vous l'obligeance de m'écouter ?
—Je ne fais que ça. Je n'entends que vous mais je veux vous entendre davantage. Ce n'est jamais assez.
—À quoi pensez-vous ?
—À vous monsieur Choi, je ne pense qu'à vous à cet instant.Il me laisse encore entendre son doux rire et je dois faire appel à toute ma concentration pour échappé à mes pensées les plus salaces. Devrais-je lui proposer de venir boire un verre avec moi ? Accepterait-il ? S'il acceptait, mes pensées deviendraient encore bien plus sales, bien plus excitantes. Ce n'est pas raisonnable de vouloir cet homme. C'est sans aucun doute la raison pour laquelle je le veux.
—Revenons-en à l'objet de ma visite si vous le voulez bien monsieur Leclerc.
—Je n'ai aucune raison de vous vendre mes œuvres.
—Vraiment ? Vous avez pourtant des milliers de raisons qui gisent actuellement sur le sol de votre bureau, dit-il ironiquement.
—Ce n'est pas l'argent qui me fera changer d'avis.
—Existe-t-il seulement un moyen de vous faire changer d'avis ?
—Oh, des dizaines, rétorquais-je avec un sourire charmeur.Son sourire s'élargit alors qu'il se lève. Il se penche sur mon bureau en prenant soin d'appuyé l'ensemble de son poids sur ses deux poings. Toujours adossé à mon fauteuil, je n'en perds pas une miette. Tout cela ne peut être réel. Je refuse de croire que lui et moi sommes sur la même longueur d'onde, qu'il n'y aucun malentendu.
—Je ne suis pas là pour assouvir vos désirs pervers, monsieur Leclerc. C'est de l'argent que je vous propose et non mon corps. Dans l'hypothèse où j'étais moi-même à vendre par ma propre volonté, vous ne seriez même pas dans la liste de mes potentiels acheteurs.
—Vous semblez bien sûr de vous, monsieur Choi, dis-je en me levant à mon tour.
—Je connais ma propre valeur aussi bien que vous connaissez celle de vos œuvres.
—Vous vous êtes bien trop valorisé mon cher.
—Ce n'est pas ce que votre corps laisse sous-entendre.Son regard descend sur mon entrejambe. Il est vrai que je ne peux nier l'effet que cet homme me fait. Sa confiance en lui m'excite bien plus que je ne l'aurais cru, et cela n'a pas l'air de lui déplaire. Du moins, c'est ce que son sourire me laisse sous-entendre. Je ne peux m'empêcher de rire alors qu'il vient de me percer à jour sans la moindre difficulté.
—Je suis flatté par cette réaction mais comme je l'ai déjà dit, je ne suis ici que pour acheter votre art. Je ne négocierai rien d'autre que le montant que vous voulez empocher.
—Un million d'euros, dis-je en reprenant place dans mon fauteuil.
—Pour quelqu'un qui ne souhaitait pas d'argent, je vous trouve légèrement excessif.
—Comme vous l'avez si gentiment souligné, je ne fais que reconnaître la valeur de mes œuvres.L'amusement se lit sur son visage.
—Bien. J'aurais seulement besoin d'un peu de temps pour réunir les fonds nécéssaire en liquide.
—Un chèque fera tout aussi bien l'affaire. Je n'ai que faire de tous ces billets. Après tout, si vous voulez que je ne m'intéresse qu'à votre argent, alors c'est ce que je me contenterai de faire.
—Ce n'est pas ce que j'ai dit, monsieur...
—Avez-vous besoin que je vous écrive préalablement mon nom pour l'ordre du chèque ? Je ne voudrais pas qu'il y ait une erreur.
—Je vous trouve d'humeur changeante, dit-il en sortant son chéquier.
—Et je vous trouve incroyablement excitant alors ayez la gentillesse de me signer ce bout de papier et de sortir de mon bureau avant que mes fantasmes ne fassent exploser les boutons de mon pantalon.Une fois qu'il est parti, je me sens vide. Je ne regrette pas ce contrat, je ne regrette pas d'avoir vendu ce que j'ai eu l'honneur de créer de mes propres mains. Toutefois, la sensation d'avoir vendu une partie de moi-même ne me quitte pas. Ce n'est pourtant pas la première fois que je vends mes productions mais savoir que la majorité d'entre elles appartiennent maintenant à quelqu'un qui a la même obsession que moi... C'est quelque peu déroutant.
Pour la troisième fois en l'espace d'une heure, on frappe à la porte.—Monsieur, il y a une jeune femme qui aimerait vous voir, m'informe Elizabeth en ne passant que sa tête dans l'entrebâillement de la porte.
—Je ne suis pas en état de recevoir qui que ce soit, réponds-je en comprenant que quelque chose d'étrange se trame.
—Oh, je sais que tu feras une exception.Si je n'étais pas déjà assis, je m'écroulerais sur le sol.

VOUS LISEZ
ADALIAH [bxb]
RomanceLiam Leclerc, artiste peintre reconnu à seulement 27 ans, n'a jamais cessé de rêver d'Adaliah, sa muse insaisissable, bien qu'il ne l'ait vue que dans ses visions nocturnes. Mais lorsqu'il apprend la mort de son père, il se voit contraint de revenir...