Chapitre 32

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Le temps est interminable. Accroupie et les bras croisés autour de mes épaules, je stresse. Pas pour moi, mais pour Rafael. J'ai tellement peur qu'il lui arrive quelque chose.

Soudain, un sifflement d'oiseau, comme celui que Sergio a fait dans la forêt. Je me redresse vivement, en m'appuyant sur mes mains.

La silhouette des deux jeunes hommes se dessine à travers les arbres. Rafael, toujours torse nu, marche vers Dantae et moi, son t-shirt dans une main. Son corps porte des marques de son combat, notamment une entaille sur l'un de ses pectoraux et de nombreuses taches de boue.

Rafael croise mon regard, affichant une profondeur que je n'avais jamais vue.

Sans hésitation, je saute dans les bras de Rafael, heureuse de le sentir contre moi. Sa chaleur se diffuse dans tout mon corps. Son torse contre mon nez, diffuse une odeur qui m'enivre.

Je sais qu'il m'évite mais, là, maintenant, j'en ai besoin.

Pourtant, au lieu, de me repousser, il enserre ses bras autour de mon dos et me ramène davantage contre lui.

Nous restons silencieux quelques instants, savourant ce contact comme s'il était nécessaire, viscérale. Puis je recule, plongeant mes yeux dans les siens et sur le reste de son visage. Sur son arcade sourcilière, du sang s'écoule encore, jusqu'à sa joue, reste de sa lutte.

Lentement, je pose ma main sur sa joue et pose le bout de mon nez contre le sien, m'enivrant de sa chaleur. Mon guide resserre son emprise dans mon dos, comme pour me garder tout contre lui le plus possible.

Puis, il relâche ses bras et me saisit la main m'entraînant près de Dantae, debout autour du feu de ce matin.

Arrivé près de son ami, il me lâche la main, laissant un vide dans le creux de ma paume.

— Je commençais par me demander si vous jouez aux KUKULI sans moi, rigole Dantae.

Mon guide secoue la tête, un léger sourire collé sur le visage. Pourtant, le visage des deux hommes perd de leurs joies de vivre. Rire fait du bien, mais je pense que chacun n'oublie pas ce qu'il vient de ce passé.

— On s'ennuie tellement qu'une bonne partie pour te voir perdre, ne serait pas de refus, répond malicieusement Rafael.

— Alors, vous avez fait de belles rencontres ? questionne Dantae.

Rafael me jette un regard de compassion avant de reporter son attention sur son ami.

— On a suivi la trace des deux hommes, explique Rafael. On est arrivé jusqu'à un campement à quelques mètres d'ici avec pas mal de monde. Beaucoup de monde !

Un frisson parcourt mon corps. Je savais que l'on était poursuivis, mais je ne m'attendais pas à ce qu'il est autant de monde.

— Ce n'est pas tout. Ils sont armés et équipés pour creuser, continue Sergio.

Creusé la terre. Fouiller et piller l'or qu'ils pourraient trouver.

— Qui sont-ils ? Des pirates ou...

— C'est bien le sentier lumineux, explique Rafael. Ils ont le drapeau et son habillé comme des soldats de l'armée. J'ai reconnu, le chef et sa bande d'idiot qui ont essayé de voler ton sac en plus de tous ces brazos grandes.

— C'était à prévoir. Le sentier Lumineux est dans une lutte armée, alors de l'or à provision pourrait acheter énormément d'armes et de munitions pour pas mal d'année.

La culpabilité s'installe dans mon cœur. Indirectement, j'ai amené le groupe qui a volé mon sac, au fond de la rue, les deux malabars qui mon attaque dans la ruelle et le chef de ce groupe extrémiste sur nos traces.

— C'est curieux qu'ils aient réussi à nous pister aussi vite, ils doivent avoir des renseignements que l'on n'a pas, questionne Dantae. Ou peut-être même qu'ils utilisent la technologie pour nous trouver.

— Ils ont surtout Cortes, explique Rafael en posant ses yeux sur moi. Il nous a sûrement balancés pour de l'argent juste après notre départ.

Le souvenir de la curieuse conversation que j'ai eue avec Cortes me reviens. Ces menaces et ses illusions. "Je connais des personnes qui sont plus qualifiées que ce gringalet pour trouver quelqu'un dans ce foutoir."

— J'aurais dû m'en douter quand il a fait des allusions sur le bateau. Il m'a dit qu'il connaissait des gens et....

— Ce n'est pas ta faute, c'est la mienne, coupe Rafael. Je n'aurais pas dû lui faire appel à lui. Je sais que l'argent est son moteur de vie, alors une cité d'or, c'était en réalité certain qu'il chercherait a en avoir. Je ne sais pas comment il a su pour ton père, mais je n'ai pas...

— Il nous a surveillés sur le bateau. Il me... enfin, j'ai senti qu'il nous surveillait.

La mâchoire de Rafael se crispe.

Mierda ! J'ai joué sur ta rapidité d'être venue au Pérou sur les traces de ton père, pensant que j'avais du temps.

Puis, il se tourne vers moi et saisit mes deux mains.

— Danielle, je te demande pardon.

Je resserre ma main contre la sienne.

— Ne t'excuse pas, personne n'aurait pu prévoir qu'il nous trahirait et puis, ce n'est pas comme s'ils nous avaient capturés ou...

— Ils leur manquent deux hommes. Même si on a caché les corps, ils vont finir par s'en rendre compte.

Instinctivement, mes doigts se serrent davantage dans ceux de mon guide.

— Alors, qu'est-ce qu'on fait ? Questionné-je.

— On récupère nos affaires et on lève le camp, dit mon guide.

Et, il se lève, m'entraînant avec lui. Mes yeux se posent sur nos mains enserrées, un instant.

Alors, tout à l'heure, il y avait une barrière entre nous, a cet instant, j'ai l'impression qu'elle disparaît.

Wauja, j'ai un autre plan, dit Sergio. 

Au cœur de la forêtOù les histoires vivent. Découvrez maintenant