quarante-huit

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quarante-huit.

jeudi dix-sept août
deux mille vingt-trois.

Le soleil se lève doucement, diffusant une douce lumière qui se reflète dans la Seine. Louise admire les rayons dorés du soleil alors qu'elle enchaîne les gammes pour s'échauffer avant cette épreuve tant attendue. Elle n'a jamais connue pareil engouement. Les supporters sont déjà massés derrière les barrières autour du parcours qui sillonne les rues de Paris. Ils arborent des drapeaux et les trois couleurs de leur pays. Ils ont des pancartes et ils crient déjà le nom de tous les athlètes français.

Aujourd'hui, c'est la grande répétition.

Parce que dans un an, c'est un tout autre métal qui se gagnera sur les pavés de la capitale. L'or olympique.

Louise termine par quelques accélérations et retourne en trottinant vers son entraîneuse pour prendre des informations. Elle lui répète l'objectif de la matinée. Se faire plaisir. Recueillir un maximum d'indices sur les éléments qui peuvent lui poser problème et qu'elles devront encore travailler pour le jour qu'elles préparent depuis deux ans maintenant.

Une revanche sur une crevaison.

Une envie d'aller chercher ce qu'aucun français n'a encore réussi.

Une récompense pour une carrière et un palmarès impressionnants.

Mais la jeune femme grince des dents. Elle n'est pas sereine lorsqu'elle est appelée sur le ponton de départ, pourtant bien placée grâce à un classement mondial qu'elle parvient à maintenir malgré une saison en dents de scie. Son nom résonne dans les haut-parleurs. Et elle peut mesurer toute la ferveur que le public tente de lui apporter. Elle se force à sourire et à lever la main pour les saluer.

Il n'y a que des yeux bleus pour voir qu'elle n'affiche pas une totale sérénité. Elle a pourtant l'habitude des grandes échéances mais il sait que la nuit a été compliquée. La normande a souffert de fièvre et de maux de gorge qui l'ont empêchée de trouver le sommeil. Et il espère qu'elle fasse abstraction de cette effusion portée par les supporters. Parce que Pierre est persuadé que c'est un poids qu'elle va porter un peu plus sur ses épaules ; l'envie de leur faire plaisir et de les remercier de s'être levés de si bon matin.

Et paradoxalement, il souhaite aussi qu'elle en profite un petit peu. Il veut qu'elle se nourrisse de ce soutien que la foule est prête à lui accorder, elle qui n'a connu que des étapes de coupe du monde à l'étranger. Aujourd'hui, c'est différent. C'est une répétition durant laquelle le peuple français est présent. Et ça ne sera qu'encore plus grand dans un an.

À l'approche de ces Jeux olympiques à domicile, Louise Leroy est de plus en plus sollicitée. Luttant contre ses démons encore présents à la suite des derniers mois mouvementés, elle enchaîne les plateaux télévisés, une aubaine pour parler de sa discipline encore peu connue et les interviews pour défendre le sport féminin et son manque criant de médiatisation. Elle a même déjà été citée pour devenir porte-drapeau de la délégation française. Tout cela s'ajoute aux heures d'entraînement qu'elle maximise pour combler les difficultés qu'elle se persuade de ressentir.

Le pilote Alpine connaît son exigence et son dévouement. Alors il a confiance. Et quand le coup de pistolet retentit, qu'il croise son index et son majeur aux côtés de son père et de leurs deux familles réunies, il a hâte de voir rugir la lionne qui sommeille en elle.

Sans surprise, la française prend la tête de la course. Dans l'eau, c'est elle la patronne. C'est à cet instant qu'elle peut creuser des écarts qui peuvent s'avérer des plus cruciaux par la suite. Elle tient le cap en vélo, alors même que les pelotons se regroupent et se mélangent. Comme souvent désormais, tout va se jouer sur la course à pied.

GLORIOUS - PIERRE GASLYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant