Chapitre 6-4

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Rory se mêle à la foule, se balançant au rythme des corps. La sueur colle à sa peau tandis qu'il enchaîne les shots d'alcool. Un faux sourire au visage, il jette des regards indiscrets aux nouveaux couples formés. Ils lui rappellent la situation bordélique dans laquelle il a perdu le contrôle sur ses relations. Sa tête se secoue. Il est justement là pour l'oublier. Alors il noie sa peine dans un cocktail qu'il boit d'une traite. Les lumières foncées éclairent sa peau aussi poreuse que son âme. De gestes lents, il meut sa tête. Quand bien même la pièce monte de quelques degrés, il a froid. Il remarque les regards austères des inconnus. Son corps l'empêche de faire face aux jugements en lui brouillant la vue. Ses pas maladroits dérangent les personnes autour de lui, alors ses oreilles se bouchent pour ne pas entendre les plaintes. Il n'en a rien à faire des autres, lui seul importe à cet instant.

Sa tête lui fait mal, appelle à l'aide, mais il n'en a cure. Il se trouve dans les abimes de l'alcool dans lesquels son corps en désire plus. L'éthylisme se délecte de sa tristesse tandis qu'il réclame de l'attention. Il ne contrôle plus rien. Il n'est plus qu'émotion et sensation. Ainsi, quand il sent le frottement de vêtements étrangers contre son torse, il comprend qu'il a trouvé ce qui le défoulera. Il entrevoit des yeux qui le dévorent, alors que sa taille le surplombe. Il ignore de qui il s'agit, mais meurt d'envie de le connaitre. Alors il le découvre du bout de ses lèvres, du bout de ses doigts. Ses mains détaillent son visage et sentent des poils sur ses joues. Cela l'excite plus que cela ne le dégoûte.

Sa voix rauque lui dicte son prénom qu'il oublie aussi vite qu'il l'apprend. Pas besoin de paroles et de présentations barbantes. Pas besoin de ce romantisme. Pas besoin de ces rendez-vous où on parlait de futilités sans s'intéresser. Juste besoin de se satisfaire, le temps d'un soir, d'une nuit, d'une heure durant laquelle on savourera et célébrera l'amour dans sa plus brute atmosphère. Alors, quand cet inconnu lui demande de le suivre, il obéit, lui prenant sa main rigide. Ils sortent de la boite de nuit pour rejoindre la chaleur d'un immeuble. Durant la montée jusqu'à l'appartement où ils pourront satisfaire leurs désirs, ils ne cessent de s'embrasser, s'enlacer, se découvrir. Et quand la porte de l'appartement s'ouvre enfin, ils se lâchent.

Ils livrent une bataille lorsqu'ils se défont de leurs vêtements, beaucoup trop encombrant dans cette guerre. Rory mord le torse découvert de l'inconnu. Il sent sur sa langue les reliquats de cicatrices sur sa poitrine, mais il l'empêche d'explorer davantage, retenant sa bouche aventureuse grâce à la sienne. Le souffle contre son cou, il lui grogne aux tympans, ce qui appelle son instinct animal. Alors qu'il sent le contrôle de l'inconnu sur son corps, il le pousse dans un lit, s'allonge sur lui avant de prendre d'assaut son jean. Alors qu'il s'apprête à conquérir un nouveau territoire, son amant d'un soir l'arrête et inverse la tendance. À son tour, sa main s'immisce dans le jean, dégainant le sexe triomphant de son adversaire. Et quand celui-ci sent l'air vacillant glissé sur sa nudité, aussi vite remplacer par de l'humidité, entre deux soupirs, il pleure, abattu.

Il ne se reconnait pas dans ses actions. Il se perd dans ses pensées contradictoires, l'envie dictant sa sauvagerie et la raison sa morale. Il vient de quitter sa copine pour son meilleur ami. Et le voilà en train de se satisfaire avec un inconnu. Depuis quand aime-t-il les garçons ? Il l'ignore, mais il ne peut feindre son désir quand il sent une paire de lèvres dans son cou, ses courts cheveux chatouillant sa joue.

Ce brin de lucidité se perd dans l'action, tout comme sa raison. Il boit cette boisson enivrante, cette boisson d'une nuit dont le goût fantasque se glisse sur ses papilles. Ses mains glissent sur la coupe de ses hanches, caressent cette peau de verre. Et avec tout le soin du monde, il retire la couverture qui cache ses courbes, dévoilant la base fragile.

Il découvre ainsi un nouveau monde, l'explore du bout de sa langue, les soupirs de satisfactions animant son aventure. Il découvre un tout nouveau goût, aphrodisiaque dont l'effet mélangé avec l'alcool donne un cocktail aux mille délices qu'il se délecte. Sa chasse s'interrompt un moment quand la personne sur lequel il s'appuie se soulève, une mesure de sécurité le temps de chercher de quoi se protéger. Enfin, le dos tourné, son amant se cambre, effet du premier coup de rein qui s'ensuit d'un autre et d'un autre et d'un autre. Le mouvement répétitif accentue leurs voluptés témoignées par leurs râles de plaisir. Des injures spontanées s'échappent de leurs lèvres tandis que la cadence s'accélère. À cet instant, ils ne sont que des boules de nerfs qui profitent de l'instant. Une parole s'échappe de leur bouche et un cri uni les lie dans cette apothéose exquise qui met fin à l'acte.

De fatigue, Rory, dégoulinant de sueur, s'allonge dans les draps. Sa tête lui fait mal, sa vue s'assombrit de plus en plus. Une larme fugace s'échappe de son œil, qu'il chasse dans un dernier effort. Le dernier bruit qu'il entend est celui d'un grincement avant de rejoindre les bras réconfortant de Morphée. Il le dorlote jusqu'à le reposer dans le monde des songes.

Carnet d'un ami disparuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant