Chapitre 5-6

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Dans un coin de la rue, Rory observe son groupe en train de discuter. Victor suinte de sueur, sortant du match. Des rougeurs semblent pigmenter ses joues alors qu'Alice n'arrête pas de parler. De son côté, Rosemary parait rêveuse, ses yeux rivés vers le ciel nuageux. L'observateur se gratte le poignet pendant que Rayenne, à ses côtés, l'encourage à aller les voir. Lui, hésitant, prend une grande inspiration avant d'entamer le premier pas. Son cerveau n'arrête pas d'imaginer divers scénarios tandis que ses pieds continuent leur marche décidée. À mesure qu'il s'approche d'eux, son cœur bat à vive allure. Cœur qui rate un cycle quand, sans s'en rendre compte, il se trouve enfin devant son groupe. Ces derniers semblent surpris et on pouvait lire une palette d'émotions sur leur visage.

« T'as fait un super match Victor, bravo pour ta victoire ! » commente-t-il, incertain.

Il doit paraitre ridicule. C'est stupide comme phrase d'accroche. Il se maudit dans sa tête. Pourtant, cela ne l'empêche pas de continuer. Le regard fixé au sol, il poursuit.

« Bon ok, c'est pas que pour ton match que je suis venu. Je voulais surtout m'excuser...pour tout. Vous faisiez que vous inquiétez pour moi, et moi, comme un con, je vous ai rejeté, et même blessé... »

Il ose lever les yeux pour se confronter au jugement d'Alice. Cette dernière semble attristée par la situation. Elle fuit le moment, les mains cachées derrière son dos, ses pupilles d'habitude malicieuses désormais déçues. Cette vision lui arrache le cœur. Cette vision le déstabilise. Il a perdu le fil de sa pensée. Peut-être devrait-il s'arrêter là ? Sa pensée confirme vite cette idée. Mais l'arrivée de Rayenne à ses côtés, qui le toise, le rassura. Il peut le faire.

« Ouais, je vous ai grave blessé, surtout toi Alice. Je sais que je peux pas me racheter avec ces excuses bidons, mais j'aimerais au moins que vous sachiez à quel point je suis désolé... S'il vous faut du temps, je comprendrai. Faites-moi savoir quand je serais à nouveau le bienvenu dans le groupe... »

Il s'apprête à tourner les talons et quitter ses camarades, mais un poids sur son épaule l'en empêche. Il relève les yeux, et voit le visage de Victor, ce dernier arborant un petit sourire.

« J'en avais marre de te faire la gueule, alors bienvenu parmi nous ! »

Sur cette parole, il enlace son ami. Plutôt que de rechigner à l'étreinte, il l'accepte, cachant sa tête dans le creux du cou de son camarade. Il lâche un soupir de soulagement, alors que la chaleur de l'instant détend les traits du jeune homme. Puis, quand il se sépare de son camarade, il vit les visages de Rosemary et d'Alice. Ces dernières paraissent moins accueillantes et ouvertes que leur ami tennisman. Rory a encore du pain sur la planche. Il s'approche alors de Rosemary. Ses joues s'empourprent, comme lors de leur première rencontre. Il connait tous ses états, les ayant vécus par le passé. Et si, dans un monde normal, il n'aurait pas à se plier en quatre pour se faire excuser, dans celui-ci il ramait. Mais il sent qu'il peut reconquérir le cœur de sa dulcinée. Alors, il baisse la tête tout en prononçant ces paroles :

« J'ai trahi ta confiance. Je croyais pouvoir gérer, mais je peux pas porter tout ça tout seul : j'ai besoin de vous. »

Il effleure la main de la jeune femme avec la sienne, hésite, avant de la prendre.

« J'ai besoin de toi... »

Une fois la phrase dite, il plante son regard dans celle de son amante. Cette dernière parait calmée. Son air boudeur se défait pour former un visage soulagé, ce qui apaise le cœur de Rory. Il ose enfin se séparer de son anxiété pour la troquer contre de la sérénité. Dans un geste innocent, il embrasse le front de Rosemary qui répond par une embrassade. Le temps semble s'allonger quand il se trouve dans ses bras, si bien qu'il ne remarque pas le mouvement autour d'eux. Quand l'étreinte se termine, il voit qu'Alice et Victor ont disparu. Il ne peut retenir une mine déçue. Lui qui a espère pouvoir retrouver son petit groupe, il doit compter sur le temps pour reconstruire leur dynamique. Il ne reste alors que Rayenne, qui souffle dans le creux de ses mains afin de se réchauffer. Et quand le couple achève leur retrouvaille, Rayenne réduit la distance qui les sépare.

« On rentre ? » propose-t-il.

D'un mouvement uni, ils hochent la tête, la froideur de l'hiver les accompagnant sur le chemin du retour.

Carnet d'un ami disparuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant