Chapitre 7 Braconnier et contrebandier Point de vue Derreck

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La forêt de Brugge regorge d'animaux en ce début d'année malgré la saison hivernale. Réputée pour son calme et son abondance, les rumeurs restent vraies. Je comprends pourquoi ces bois demeurent la propriété de la famille royale pour les parties de chasse, restant cachés aux yeux de tous, sauf pour ceux ayant l'objectif de se rendre au château.

J'y allais beaucoup étant jeune avec les autres enfants de mon âge. Cette fois, tout est différent, je m'y rends clandestinement à l'aube. Avec mon grappin, j'escalade les murailles à un endroit peu surveillé par les gardes à cette heure très matinale. En plusieurs années d'observation, je connais leur stratégie, le moment des relèves, laissant les lieux à l'abandon, ce qui me permet de m'y rendre discrètement sans être repéré une seule fois.

Entrer et sortir sont les choses les plus compliquées. Une fois sur place, je peux vadrouiller facilement, comme un jeu d'enfant. Je connais la faune et la flore par cœur, ce qui rend la chasse plus facile. Je ne perds pas de temps bêtement à chercher un endroit où grouille abondamment du gibier. Au moins, je ne reste pas des heures, augmentant les chances d'être repéré, puis arrêté.

Le braconnage, un crime puni par la loi, passible de peine de mort ou de mutilation pour les plus chanceux. Faire cela représente un risque, ce qui ne m'empêche pas de le faire. De toute façon, je n'ai pas le choix. Délaissés par la société, ma famille et moi ne possédons plus rien pour vivre de manière décente. Il faut trouver un moyen pour pouvoir subsister, même si c'est illégal.

Une fois sur place, je me dirige dans la direction de la grande rivière, découvrant une biche en train de s'abreuver, croyant être seule, les oreilles baissées, comme si elle ne s'attend à rien. C'est le bon moment pour moi d'agir. Je sors une flèche de mon carquois et la place sur mon arc. La corde bien tendue, j'attends le bon moment pour pouvoir tirer. Quelques secondes me suffisent pour bien viser, rendant un angle parfait sur ma cible. Elle ne peut plus m'échapper.

D'un seul geste, je lâche la boucle continue. Ma flèche se loge ensuite à toute vitesse dans la cage thoracique de l'animal, qui s'écroule sous le coup. Je ne perds pas de temps et cours à toute allure pour l'achever en réalisant les derniers rites qui consistent à lui trancher la gorge après l'évocation d'une courte prière dans l'unique but d'abréger ses souffrances. Je suis peut-être un hors la loi, mais je respecte les traditions à la lettre.

Ma proie tuée, je la place sur mes épaules, puis continue mon chemin. Un peu plus tôt, j'ai déposé un piège camouflé par des broussailles près du sentier afin d'attraper des lièvres égarés. Comme toujours, cela fonctionne. Six d'entre eux sont pris, les mailles dans le filet. Avec ce butin, je peux gagner un bon prix.

Pour ce faire, je dois vite rentrer avant qu'on me mette la main dessus. Les prises en possession, je ne m'attarde pas en ces lieux, faisant rapidement le chemin inverse, tout en retrouvant le mur d'enceinte par où je suis arrivé. Toujours personne, je lance mon grappin et escalade sans plus tarder.

Arrivé à destination, je me mets à fouiller sous les branches d'un arbre afin de mettre la main sur ma petite charrette remplie de sacs en tissu. Je les sors et place les dépouilles de mes captures, et mon arme, ensuite, je les remets pour recouvrir mon crime le plus parfait. Comme cela, je passe inaperçu dans les rues de la capitale. Si un garde m'interpelle, il ne verra que du feu en tombant sur des marchandises légales me servant de couvertures.

Le sourire aux lèvres, je rejoins les rues pavées avec mon chargement pour ne pas paraître suspect, quand le soleil se lève. Il faut que je fasse attention à ma démarche, un simple inconnu peux me balancer aux autorités au moindre faux pas. Je dois donc rester de marbre, quoi qu'il arrive.

Faisant profil bas, en chemin, je croise des gens en train de vaquer à leurs activités quotidiennes, faire la manche pour recevoir assez de sous pour pouvoir se nourrir, quand d'autres flânent tout simplement. La vie à la capitale a beaucoup changé ces trois derniers mois. Les rues qui regorgeaient de vies ne sont plus, la misère règne en maître. A quelques coins de rues, on distingue les habitants jouir de leurs richesses, quand d'autres vivent dans la pauvreté. Les inégalités n'ont fait que croître ces derniers temps.

Sang du dragonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant