Chapitre 21 Le clan des ombres

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Plus très loin de l'endroit où Isidore veut nous emmener, nous atteignons une grotte profonde, dont la noirceur me fait froid dans le dos. Comme je le crains, c'est notre destination. Le vieux forgeron allume une torche en frottant deux silex entre eux, ce qui produit des étincelles. Ensuite, sans nous adresser un moindre regard, il s'y enfonce.

À cet instant, mes pieds refusent de m'obéir, je n'arrive plus à avancer. Mon cœur palpite de plus en plus vite, la sueur perle sur mon front, rendant mes mains moites, ma respiration s'accélère drastiquement. Je ne peux pas me rendre à l'intérieur, c'est impossible pour moi. Ma peur du noir m'empêche de faire le moindre pas.

Lyrina me prend la main, toujours en me soutenant du mieux qu'elle le peut.

— Derreck, je sais que tu as peur, mais nous devons avancer, m'annonce-t-elle. Je resterai à tes côtés. Quand tu te sentiras prêts, prends une grande inspiration. Nous avancerons tout doucement.

Je fais ce qu'elle me conseille sans perdre un instant. Quand cette fois je me sens d'attaque à combattre ma plus grande peur, je commence à poser mon talon plus loin.

J'avance pas à pas, tout en serrant la main de Lyrina très fort. Mes inspirations et expirations se font de plus en plus longues et de plus en plus contrôlées. Je répète sans cesse dans ma tête « Je n'ai pas peur. La peur n'appartient qu'aux faibles d'esprit ».

L'humidité et l'obscurité pesante, malgré la luminosité émanant de la torche, me donnent la sensation de me retrouver au fond du puit. Des frissons parcourent tout mon corps, mes poils de bras se hérissent, des gouttelettes gelées tombent sur le haut de ma tête, qui me donnent l'impression de me retrouver piégé, dans l'incapacité de pouvoir sortir.

Je serre de plus en plus ma prise, comme si la main de Lyrina peut me tirer de ce cauchemar. Même la chaleur qui en émane ne suffit plus à me calmer. Je crois perdre patience quand plusieurs torches plantées sur la cavité de la grotte font leur apparition. Plusieurs personnes déambulèrent au centre, semblable à une rue animée.

Isidore se mélange à la foule, comme si de rien était. Nous le suivons sans broncher. Derrière ses talons, nous sentons le regard des gens se poser sur nous, l'air surpris de nous voir ici. Je sens que leurs réactions mettent mal à l'aise mon amie, qui déteste être le centre de l'attention. Nous faisons tous les deux face à nos plus grandes peurs qui nous rongent de l'intérieur.

À notre droite, nous distinguons des forgerons en train de travailler leurs épées en les trempant dans les flammes, puis dans de l'eau. Avec un marteau, ils tapent frénétiquement dessus. D'autres transportent les armes fabriquées en grand nombre avec des armures de plates et de cuivres. Des heaumes et des boucliers incrustés de diamant brut trônent de part et d'autre à l'intérieur de la forge de fortune.

Quelque chose se prépare en ces lieux. La tension palpable, les préparations en masse, tout atteste qu'une guerre approche, il n'y a pas de doutes là-dessus. La seule chose qu'il reste à savoir, c'est de quels côtés ils vont se ranger.

Concentré sur chaque détail, je ne fais pas attention à ce qui se déroule devant moi.

— Derreck ! hurle une voix plutôt familière, comme sorti tout droit de mon imaginaire.

Ce ne peut pas être possible !

— Derreck !

Cette fois quelqu'un se jette sur moi : une chevelure sombre comme la nuit, une petite taille enfantine, l'odeur du Lila parfumant ses vêtements. J'ai l'impression de me retrouver en face d'un fantôme, pourtant la chaleur qui émane de son petit corps m'atteste qu'elle est bien vivante. J'entends les battements de son cœur embrumant mes yeux de larmes.

Sang du dragonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant